Subaru a commencé à produire la troisième génération de son célèbre moteur plat à quatre cylindres et promet qu'il sera plus vif et un peu moins gourmand que l'ancien, dans ses versions 2 litres et 2,5 litres (seul celui-ci sera offert au Canada, dans la Forrester 2011, pour commencer). Un changement qui rappelle les racines aéronautiques de ce moteur presque tombé du ciel sous le capot des Subaru.

Subaru est un des rares constructeurs automobiles, avec Porsche, qui utilisent ce type de moteur. Sa configuration aplatie et son volume relativement compact permettent d'abaisser le centre de gravité de la voiture. Sa position basse sous le capot facilite aussi le travail des ingénieurs en sécurité: en cas de collision frontale, un moteur plat passe plus facilement sous l'habitacle (et non sur les jambes des passagers avant) tout en absorbant l'impact.

Dans les avions

Historiquement, le moteur plat est plus caractéristique des avions à hélice des années 50 et 60 que des automobiles. De nombreux pilotes militaires nord-américains, puis, par la suite, japonais ont fait leurs classes aux commandes de Beechcraft T-34 Mentor mus par un moteur 4 cylindres plat fourni par le motoriste aéronautique américain Continental. Environ 125 ont été construits au Canada sous licence, selon l'auteur Ed Phillips, qui a écrit l'histoire de l'avionneur Beechcraft. Des centaines de T-34 (et de ses versions dérivées) à moteur plat volent encore aujourd'hui, comme avions d'entraînement et de plaisance civils.

D'ailleurs, l'arrivée du moteur à plat dans les Subaru s'est faite par la voie des airs. Subaru est la filiale automobile de Fuji Heavy Industries, qui a aussi une filiale aéronautique. Cette filiale est la descendante de l'avionneur Nakajima Hikoki Kabushiki Gaisha, fournisseur de la majorité des avions de combat (y compris des avions suicide) pour l'aviation japonaise durant l'expansion japonaise des années 30 jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Cependant, tous les avions militaires produits par Nakajima étaient équipés de moteurs radiaux, et non plats.

Expertise d'avionneur

Durant l'expansion japonaise des années 30 jusqu'à la fin de la Seconde guerre mondiale, une des compagnies ancètres de Subaru, l'avionneur Nakajima, a construit plus de 50 % des avions de l'aviation japonaise. Ici, le chasseur Ki-27.

Après la guerre, Nakajima a été démantelé par les autorités militaires américaines et des lambeaux d'anciennes firmes industrielles ont été raboutés pour former le holding Fuji Heavy Industries. Durant les années d'après-guerre, le commandement suprême allié interdit la recherche et la production d'avions. Plusieurs grands ingénieurs aéronautiques qui travaillaient anciennement pour Nakajima travaillèrent alors au volet automobile de Subaru.

Durant les années 60, l'interdiction fut graduellement levée et Fuji mena de front des projets de conception d'avions et de voitures, souvent avec les mêmes ingénieurs.

La filiale aéronautique de Fuji a acheté de Beechcraft une licence pour construire une version japonaise des T-34 Mentor. Rebaptisés Fuji LM-1 Nikko, les 27 premiers exemplaires construits par Fuji étaient propulsés par des moteurs plats américains Continental O-470 quatre cylindres de 225 CV. Plus tard, Fuji a augmenté sa familiarité avec les moteurs plats en plaçant un Lycoming O-480 de 340 CV dans une version augmentée du Nikko, le Fuji KM-2, lancé sur le marché en 1962.

Le premier avion produit par Fuji aéronautique fut le Fuji FA200 Aero Subaru, mu par un moteur plat Lycoming O-320 et qui vola pour la première fois à l'été 1965.

La même année, la filiale automobile a présenté la Subaru 1000, une traction avant mue par un moteur plat Subaru, «la toute première traction avant japonaise produite en grande série», indique Subaru Canada. L'avion et la voiture ont été lancés en 1966.



Photo: Wikipedia

La division aéronautique du holding industriel auquel appartient Subaru s'set familiarisée avec les moteurs plats durant les années 60 en construisant sous licence le Fuji LM-1, version japonaise de l'avion d'entraînement américain T-34 Mentor.

La première traction avant japonaise

Les ingénieurs de Subaru de cette époque ont choisi le moteur plat comme solution aux contraintes techniques venant du passage des voitures à propulsion arrière aux voitures à traction avant, explique Josh Sanders, de Subaru Canada. Les prototypes de traction avant mus par des moteurs en V ou en I avaient une mauvaise tenue de route et ils transmettaient beaucoup de vibrations à la voiture. Par ailleurs, la forme et le volume des moteurs en I ou V mettaient trop de poids vers l'avant, ce qui donnait aux prototypes de traction avant une vilaine tendance au sous-virage.

«Pour résoudre les problèmes de vibration et de stabilité, Subaru a utilisé une technologie empruntée à son expertise d'avionneur, le moteur horizontal à pistons opposés, ou moteur plat», indique M. Sanders, qui dit tirer cette information directement de la base de données de Subaru. Le design plat a donné un moteur vibrant beaucoup moins que les moteurs en I et en V généralement en usage et sa forme basse et aplatie abaissait le centre de gravité. En le positionnant sur le long, sur la ligne centrale de l'auto, on obtenait un meilleur équilibre latéral.

«Les ingénieurs de Subaru savaient que ça prenait un moteur linéaire, avec le moins d'engrenages et d'angles possible, dit Richard Marsan, directeur technique de Subaru Canada depuis des lustres. Dès qu'ils ont décidé que le moteur irait devant les roues avant, ils savaient que cette masse importante aurait des effets négatifs sur la tenue de route et la conduite. Alors, le moteur plat était le choix naturel, parce qu'il dépassait d'à peine un pied (30 cm) devant l'essieu avant, ce qui garderait la masse aussi près que possible des roues avant.»

Dans un même plan

Le moteur plat est aussi appelé «moteur à cylindres horizontaux opposés», ce qui est toute une mâchée à prononcer, et ce qui explique pourquoi tout le monde préfère dire simplement «moteur plat» (ou carrément boxer, en anglais). Mais le terme plus technique explique bien que, dans ce moteur, les quatre cylindres se déplacent tous dans un même plan, chacun étant opposé à un autre. L'étymologie anglaise du moteur boxer vient de ce que chaque paire de pistons se déplace l'une vers l'autre, comme les poings de deux boxeurs.

La Subaru 1000 a été lancée en 1966, la même année que l'avion Fuji Fa-200 Aero Subaru, qu'on voit en haut de cet article. Les deux machines étaient mues par des 4-cylindres plats.