La saison du Rideau Vert s’ouvre avec la pièce L’ombre, signée par un collectif de jeunes auteurs et interprètes, mise en scène par Marie Brassard. Porté par neuf diplômés d’écoles de théâtre en 2022, le spectacle est un étrange prologue au lancement du 75anniversaire de la compagnie fondée par Yvette Brind’Amour et Mercedes Palomino.

« Pas d’horizon ! » C’est cette absence de perspective qui a troublé l’homme de théâtre Mani Soleymanlou, après une discussion avec des finissants en jeu durant la pandémie. Cette « impossibilité de rêver », « de se projeter », a été le déclencheur de L’ombre, un spectacle coproduit par le Rideau Vert et le Théâtre français du Centre national des Arts. Une proposition sombre, très intense, et qui illustre une chose claire : l’avenir est tout sauf radieux pour la jeunesse d’aujourd’hui.

PHOTO JEAN-FRANÇOIS HAMELIN, FOURNIE PAR LE RIDEAU VERT

L’ombre est un spectacle multisensoriel créé jeudi soir au Rideau Vert.

L’ombre est un spectacle « multisensoriel ». Le jeu, la lumière, la gestuelle, le son, la musique et les voix sont aussi au premier plan que la parole. La metteure en scène Marie Brassard, avec la collaboration de son équipe à la conception des costumes, éclairages, décor et musique (celle-ci signée Alexander MacSween est omniprésente et envoûtante !), a bien ficelé ce spectacle visuellement très riche… Mais dramatiquement pauvre.

Le vent dans’face !

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Marion Daigle se détache du chœur dans L’ombre au Rideau Vert.

En un acte de 80 minutes, un chœur de huit acteurs se détache pour livrer chacun un monologue, entrecoupé des interventions du coryphée (Marion Daigle). Sans préambules, les interprètes livrent leurs histoires sur un mode poétique, voire cérémonial. Il est question de vertige, de spleen, de fantômes… De sang, de peur et de vent. On parle beaucoup de vent dans cette production. Est-ce une allégorie à la difficulté d’avancer vers l’avenir ?

« Chaque matin, je vomis mon vide », dit un personnage au chevet d’un mourant dans une chambre d’hôpital. Enfin, on imagine que c’est un hôpital. Car d’une scène à l’autre, on change brusquement de lieux (on passe d’un rave à une forêt, d’un lac à la ligne orange du métro…). Sans mettre le récit en contexte. On se perd souvent dans les méandres de ces monologues mystérieux.

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Diplômée de l’École supérieure de théâtre de l’UQAM en interprétation en 2022, Ahlam Gholami livre un monologue et un chant dans L’ombre.

L’ombre est une expérience théâtrale courte et répétitive. Un austère « hommage à l’imagination » qui évoque une messe noire. Un rituel pour expier le côté obscur d’une génération sans avenir. Or, celle-ci n’est pas la première à se sentir mise de côté par la société. Après tout, chaque génération d’artistes veut se révolter contre la précédente. Les boomers l’ont fait avec L’Osstidcho ; les « X » avec Cabaret Neiges noires…

Encore faut-il pouvoir brasser la cage ; et faire passer notre message de la scène à la salle.

L’ombre

L’ombre

Une création du Collectif 2023. De et avec Élodie Bégin, Samuel Boulianne, Marion Daigle, Ahlam Gholami, Stella Lemaine, Cassandre Loiselle, Charles-Olivier Maltais, David Noël et Kevin Pereira.

Théâtre du Rideau Vert, Jusqu’au 9 septembre

Consultez le site du Théâtre du Rideau Vert

Le spectacle sera présenté du 28 au 30 septembre, au Théâtre français du CNA, à Ottawa.

Consultez le site du Théâtre français du CNA