Une distribution de grandes vedettes est rassemblée pour raconter l’un des pans les plus sombres de la vie de l’écrivain américain Truman Capote. La Presse a assisté à la conférence de presse virtuelle qui réunissait les comédiens Tom Hollander, Naomi Watts, Diane Lane, Chloë Sevigny, Calista Flockhart, Demi Moore et Molly Ringwald.

L’inspiration

PHOTO ANGELA WEISS, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Le scénariste Jon Robin Baitz, Diane Lane, Chloë Sevigny, le producteur Ryan Murphy, Naomi Watts, Tom Hollander, Molly Ringwald, Demi Moore et Calista Flockhart à la première de la série, à New York, le 23 janvier dernier

Capote Vs. The Swans est la deuxième saison de la série FEUD (Rivalité, en français), créée par Ryan Murphy (American Horror Story, Glee). Inspirée de faits véritables – à l’instar du premier volet, qui se penchait sur la rivalité entre les actrices Bette Davis et Joan Crawford –, elle explore le conflit entre Truman Capote, auteur de Breakfast at Tiffany’s et d’In Cold Blood, et un groupe de femmes de la bourgeoisie new-yorkaise que l’excentrique homme de lettres appelait amicalement ses cygnes avant leur déchirure. « Il était le plus grand écrivain de sa génération, alors, pour ces femmes riches, il était un accessoire éblouissant à leur table, estime Tom Hollander, qui l’incarne. De plus, il les comprenait mieux que leurs maris et comblait un vide émotif. C’était un homme divertissant, perspicace, brillant, intéressant et singulier. » Le scénario de Jon Robin Baitz (Brothers & Sisters) est tiré du livre Capote’s Women, de Laurence Leamer. Bien que les sauts dans le temps soient nombreux, le récit relate davantage les conséquences de la publication du chapitre « La Côte Basque 1965 » dans le magazine Esquire, en novembre 1975.

La trahison

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Tom Hollander incarne Truman Capote.

Avant-goût du roman Answered Prayers – qui devait initialement être lancé en 1968, mais qui ne sera partiellement publié qu’en 1986, deux ans après la mort de Capote –, le chapitre dévoile des secrets intimes de certains des « cygnes ». Alors qu’il utilise des pseudonymes pour Babe Paley (Naomi Watts), Slim Keith (Diane Lane) et Ann Woodward (Demi Moore) – il accuse même cette dernière de meurtre –, l’auteur nomme directement Lee Radziwill (Calista Flockhart) et sa sœur, Jacqueline Kennedy Onassis. Profondément blessées par cette trahison, elles l’excluent de leur influent cercle social. « En dépit de leur statut, ces femmes étaient des laissées-pour-compte de la société et n’obtenaient aucun mérite pour le succès de leur mari. Babe parvenait à tolérer les infidélités afin de préserver son mariage, mais son ressentiment était grand. En se confiant à Truman, elle se sentait comprise pour la première fois », explique Naomi Watts. « Pour elle, leur relation était la plus importante de sa vie, ajoute-t-elle. La trahison a non seulement causé une grave blessure, mais a aussi révélé toutes les autres accumulées dans sa vie. »

Les répercussions

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Naomi Watts (Babe Paley), Chloë Sevigny (C. Z. Guest) et Diane Lane (Slim Keith)

Souvent qualifiée de « suicide social », la publication de « La Côte Basque 1965 », qui tire son nom du restaurant où Capote et ses cygnes se réunissaient régulièrement, a eu un effet qui semble avoir pris l’écrivain de court. La majorité des épisodes de la série est consacrée aux divers points de vue des principaux intéressés. « Mon personnage [Joanne Carson] n’était pas un cygne, mais elle était sa dernière amie, indique Molly Ringwald. Je crois que l’effet de la trahison fut si grand parce qu’elles l’adoraient. Même si elles savaient que les auteurs s’inspirent de leur vie et de celles des autres, elles se croyaient immunisées. Son geste était assez autodestructeur, mais je ne pense pas qu’il ne voulait plus de leur amitié. Il ressentait peut-être une frustration d’être leur genre de fou du roi. » « Il a aussi écrit à propos de Joanne, poursuit l’actrice vedette des années 1980. Elle était tellement amoureuse de son génie qu’elle a validé ses actions et l’a soutenu jusqu’à la toute fin. »

Notre avis

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Naomi Watts dans la peau de Babe Paley dans l’épisode du bal en noir et blanc

FEUD : Capote Vs. The Swans est une somptueuse série qui prend son temps. Au fil des huit épisodes, on découvre les nuances des personnages qui semblent tous assez détestables au départ. On les aime, puis on les méprise, puis on les aime de nouveau. On tient compte de leur vulnérabilité et du fait qu’ils vivaient à une époque qui les empêchait de s’affirmer. L’écriture est sans faille, mais finit tout de même par être répétitive. Toutefois, l’interprétation est si juste et les personnalités si colorées qu’on accepte les longueurs. D’une certaine manière, celles-ci permettent une plus grande immersion dans un monde qui n’existe plus. Du moins, pas de la même manière. Naomi Watts est particulièrement touchante, alors que Diane Lane est fort divertissante. Le regretté Philip Seymour Hoffman avait accompli un travail remarquable dans le film Capote, mais la performance de Tom Hollander est tout aussi convaincante. Il est au centre des quelques scènes d’anthologie, dont celles jouées avec Jessica Lange, qui incarne la mère de Truman. La réalisation de Gus Van Sant (Milk, Good Will Hunting) est sobre, avec quelques moments plus audacieux, notamment pour l’épisode sur le mythique bal en noir et blanc organisé par l’excentrique écrivain.

Les deux premiers épisodes de FEUD : Capote Vs. The Swans seront diffusés sur Disney+ le 6 mars.