C’est arrivé la semaine dernière au talk-show La tour à TVA. En entrant dans l’appartement de Gildor Roy, Bruno Pelletier a levé les mains en guise de high five, mais l’animateur avait déjà les bras grands ouverts pour l’accueillir de manière plus chaleureuse. Après une brève hésitation, les deux hommes ont échangé une accolade légèrement malaisante pendant laquelle Bruno Pelletier a demandé : « Qu’est-ce qu’on a le droit de faire ? »

À pareille date l’an dernier (et davantage en 2020), une telle situation ne serait jamais survenue, puisqu’une pléthore de mesures sanitaires strictes régissait nos vies et l’ensemble des enregistrements d’émissions de variétés, de jeux et d’entrevues en période de pandémie.

Ces règles étant tombées au printemps, notre télévision présente cet automne des scènes qu’on aurait jugées impensables jusqu’à tout récemment, comme Pierre-Yves Lord qui saute dans les bras d’un concurrent à Silence on joue, des choristes d’En direct de l’univers qui chantent sans plexiglas, et Patrick Lagacé qui trinque avec Louis Morissette à Deux hommes en or et Rosalie.

Public en studio

Le retour du public en studio confère un sentiment de normalité (qu’on pourrait qualifier de « pré-mars 2020 ») aux émissions actuellement en ondes. Depuis quelques semaines, on voit des inconnus enthousiastes applaudir, réagir et parfois rire en arrière-plan dans Génial, Ça finit bien la semaine, Les enfants de la télé, Tout le monde en parle, La semaine des 4 Julie, Cette année-là, Qui sait chanter ? et Chanteurs masqués.

Ces mêmes anonymes font également sentir leur présence chaque dimanche soir dans Révolution, l’une des rares émissions auxquelles ils avaient accès en 2021. Mais cette année, les visages sont découverts. Du moins, à l’écran. « On demande aux membres du public de porter un masque en tout temps, sauf lorsqu’on tourne », indique le producteur du populaire télécrochet de TVA, Martin Métivier.

Et pour ceux qui veulent savoir pourquoi Sarah-Jeanne Labrosse paraît parfois loin des danseurs, c’est pour éviter qu’elle contracte la COVID-19 et s’absente d’une partie des tournages, qui s’étirent jusqu’en novembre. En d’autres mots, Révolution a besoin d’une égérie en pleine forme.

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Plateau de tournage de Révolution

En direct de l’univers est aussi revenue transformée en septembre. Aux dires des dirigeants de Radio-Canada, le happening du samedi est ressorti « bonifié » de l’ère coronavirale. L’équipe de France Beaudoin a notamment conservé la scène secondaire qu’elle avait installée pour profiter de l’espace vide créé par l’absence de public en studio.

« Ça veut dire qu’on accueille un peu moins de gens qu’avant [la pandémie], mais côté look, ça fait plus ambitieux. On priorise le rendu télévisuel », souligne la première directrice, Culture, variétés et société de Radio-Canada, Sophie Morasse.

PHOTO ERIC MYRE, TIRÉE DE FACEBOOK

Choristes d’En direct de l’univers

« La pandémie, ça n’a pas seulement été du négatif », ajoute Dany Meloul, directrice générale, Télévision, de Radio-Canada. « On a découvert des choses par obligation, mais qui marchent mieux, comme Tout le monde en parle, qu’on préfère en direct. »

Des exceptions

Seules trois émissions n’ont pas rouvert leurs portes à monsieur et madame Tout-le-Monde. À Télé-Québec, Normand Brathwaite et Mélissa Lavergne continuent d’animer Belle et bum au cœur d’un théâtre National dépourvu de spectateurs.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Normand Brathwaite durant un enregistrement de Belle et bum

La situation sera toutefois réévaluée au cours de l’hiver, nous indique la direction du diffuseur. L’équipe du rendez-vous musical hebdomadaire suit l’évolution des infections pour « prendre la meilleure décision possible pour tous et toutes », précise-t-on.

À TVA, Guy Jodoin pilote Le tricheur en compagnie des artistes invités et personne d’autre. Même chose pour Patrice L’Ecuyer à Silence on joue sur ICI Télé. Il s’agit d’un choix, déclare Sophie Morasse.

On trouvait parfois qu’avec le public, les jeux, le pop-corn… le niveau sonore était élevé. À 17 h 30, les gens reviennent du travail. On n’a pas envie d’être agressant.

Sophie Morasse, première directrice, Culture, variétés et société de Radio-Canada, au sujet de Silence on joue

Autre émission qui n’est pas encore totalement revenue comme avant, 100 génies compte, pour la troisième saison consécutive, beaucoup moins de concurrents que son titre l’indique. L’étape du recrutement des concurrents ayant débuté en mars, alors qu’il régnait encore beaucoup d’incertitude sur l’évolution du virus, Radio-Canada a préféré user de prudence en maintenant le plafond de candidats à 31, pour éviter d’être obligée d’annuler la participation de certains, advenant une flambée d’infections.

« On n’a pas voulu prendre de risque, explique Sophie Morasse. On aurait trouvé ça odieux de prendre 100 jeunes, et finalement, d’en laisser tomber. On n’avait pas envie d’en décevoir. »

Le diffuseur public vise le véritable retour des 100 génies en studio l’an prochain. Et, bien entendu, le retrait des plexiglas disposés entre les joueurs.