Une page importante se tourne dans l’univers télévisuel. L’animateur Pierre Bruneau prend sa retraite. La légende de l’information présentera son dernier bulletin le 16 juin prochain, après 46 ans comme chef d’antenne à TVA.

La gorge nouée par l’émotion, Pierre Bruneau a annoncé la nouvelle au bulletin de 17 h jeudi. Le journaliste de 69 ans a indiqué qu’il s’agissait d’une décision mûrement réfléchie, à laquelle il songeait depuis longtemps.

« J’ai toujours la passion du métier, a déclaré le lauréat de 23 prix Artis. Venir au boulot n’a jamais été une corvée pour moi. Au contraire, c’est un plaisir quotidien. Mais après 45 ans [bientôt 46] sous les projecteurs de TVA et 50 ans de journalisme, j’ai le goût d’un peu d’ombre. »

Bien qu’il quitte l’animation de TVA Nouvelles dans trois mois, Pierre Bruneau retrouvera, élections provinciales obligent, son poste aux commandes du débat des chefs de TVA l’automne prochain. Il pilotera également la soirée électorale Québec 2022.

Joint au téléphone en soirée, Pierre Bruneau se sentait « libéré » et « serein » après une journée mouvementée. « Quand je suis rentré au travail ce matin, ça m’a rappelé la première fois que j’ai mis les pieds à TVA en 1976. J’étais fébrile », a-t-il confié.

C’est également avec fébrilité qu’il envisage les prochaines semaines, les prochains mois, les prochaines années, avec sa conjointe, Ginette, et avec ses proches.

« Malgré toute la passion que j’ai encore pour le métier, et tout le plaisir que j’ai à côtoyer mes collègues, je veux profiter des bons moments avec les miens. »

En bonne santé après avoir discrètement combattu un cancer en 2016 et 2017, Pierre Bruneau jure qu’il continuera d’emprunter les escaliers de TVA jusqu’à son départ, une habitude qu’il a adoptée en 2007 alors qu’il s’entraînait pour gravir le Kilimandjaro. Chaque jour, il monte en tout 26 étages. « Ça fait partie de mon rituel. Ça me permet d’être seul », a-t-il expliqué.

Une pluie de réactions

L’annonce du départ à la retraite de Pierre Bruneau a suscité de nombreuses réactions. Sur Twitter, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a souhaité une « merveilleuse retraite » au chef d’antenne réputé. « C’est la fin d’une époque, a noté le leader libéral. Pendant plus de quatre décennies, Pierre Bruneau a tenu les Québécois informés depuis le bureau de TVA Nouvelles. Il m’a aussi mis sur la sellette une fois ou deux. Merci pour tout ton travail, Pierre. »

Le premier ministre québécois François Legault a également rendu hommage au journaliste en ligne. « Les Québécois vont s’ennuyer de Pierre Bruneau, a tweeté le chef caquiste. Après 46 ans de carrière, on peut dire que c’est une retraite méritée. »

En entrevue avec La Presse, Gino Chouinard, une autre figure emblématique de TVA, n’a pas caché sa grande admiration pour Pierre Bruneau, sur les plans tant professionnel que personnel. « Tenir l’antenne aussi longtemps, avec des résultats aussi extraordinaires, ça relève de l’exploit. Pierre n’a jamais baissé les bras devant les défis. Il les a toujours pris de face. »

L’animateur de Salut bonjour ! a salué l’impact social du roi des cotes d’écoute, rappelant qu’il a créé, en 1990, la Fondation Charles-Bruneau pour poursuivre le travail qu’avait entamé son fils aîné, mort d’une leucémie à l’âge de 12 ans.

Ami proche et ancien collègue de Pierre Bruneau, Philippe Lapointe a également applaudi son œuvre philanthropique. « Avec sa fondation, il a fait la différence pour tellement de gens, a souligné l’ex-vice-président principal du réseau TVA au téléphone. Il a mis sa notoriété au service du bien commun. C’est admirable. »

Philippe Lapointe décrit Pierre Bruneau comme un « gentleman ». Il vante sa rigueur et, surtout, son dévouement sans limites. Peu importe le jour ou l’heure, le récipiendaire de l’Ordre du Canada (2012) et de l’Ordre national du Québec (2008) est toujours prêt à livrer la nouvelle quand l’actualité l’exige.

« Les gens ne réalisent pas à quel point c’est un job difficile, être chef d’antenne, a insisté Philippe Lapointe. C’est exigeant, parce que c’est tous les jours. Tu n’as pas le droit d’être mauvais ou moyen. Il faut le dire : Pierre Bruneau a été Wayne Gretzky tous les jours. Il était bon tout le temps. »

À l’autre bout du fil, Mario Dumont a qualifié ses 10 années passées à côtoyer Pierre Bruneau de « privilège ». « C’est un grand professionnel. Je garde le souvenir de soirées électorales mémorables. C’est toute une époque sur laquelle on tourne la page. »

Sur les réseaux sociaux, le milieu politique n’est pas resté indifférent à l’annonce du pilier de l’information. La mairesse de Montréal Valérie Plante, le chef du Bloc québécois Yves-François Blanchet, la cheffe du Parti libéral du Québec Dominique Anglade, la co-porte-parole de Québec solidaire Manon Massé et plusieurs autres élus ont applaudi ses réalisations.

Les éloges ont également abondé du côté journalistique. « Le facteur le plus important pour mesurer le succès d’une carrière, c’est la durée », a souligné le chef d’antenne du Téléjournal de 18 h à Radio-Canada, Patrice Roy, avant de souhaiter bravo et bonne route à son confrère.

Dans un communiqué, le président de Groupe TVA, Pierre Karl Péladeau, a remercié Pierre Bruneau pour sa passion et son professionnalisme. « Au cours des six dernières décennies, Pierre Bruneau a su nouer un lien très particulier avec les Québécois et les Québécoises de toutes générations. Il fait partie intégrante de leur quotidien en les accompagnant chaque soir avec rigueur, pertinence et humanité. »

Pierre Bruneau s’est fait connaître du public dès 1972 comme journaliste radio à Victoriaville. Il s’est également illustré au micro de CKAC à Montréal pendant quelques années.

À titre de chef d’antenne de TVA, Pierre Bruneau a couvert la plupart des évènements marquants des 40 dernières années, comme la tentative d’assassinat de Ronald Reagan de 1981, la tuerie de Polytechnique de 1989, la crise d’Oka de 1990, le déluge du Saguenay de 1996, les attentats du World Trade Center de septembre 2001 et, bien entendu, la pandémie de COVID-19.

En 2019, il a fait paraître son autobiographie, Même heure, même poste, aux Éditions de l’Homme.