Entre deux rendez-vous au tribunal et trois curieuses publications sur Instagram, Britney Spears a connu un énième rebondissement mardi avec l’arrivée d’un nouveau documentaire choc de Netflix. Est-ce que Britney vs Spears mérite le détour malgré la surabondance de reportages et d’articles qui circulent depuis des mois ? Réponse courte : oui.

Démence et médication

Fruit du travail de Jenny Eliscu, rédactrice en chef du magazine Rolling Stone, et d’Erin Lee Carr, réalisatrice et admiratrice avouée de Britney Spears, le documentaire explore en profondeur la tutelle de l’artiste, et particulièrement les circonstances entourant sa mise en place. Selon le document, la descente aux enfers a commencé en 2007 quand Britney Spears a divorcé de Kevin Federline. Alors nouvelle maman d’un deuxième enfant, la chanteuse a sombré. Et pour mettre en place une tutelle provisoire sans qu’elle puisse la contester, son père, Jamie Spears, qui a refait surface après plusieurs années d’absence, a invoqué sa « démence ». En entrevue avec Eliscu, le psychiatre gériatrique responsable du diagnostic paraît tout sauf fiable. Le documentaire expose également le cocktail de médicaments administré à Britney Spears durant toutes ces années. Un mélange qui comprenait de l’Adderall, stimulant du système nerveux central, et du lithium.

CAPTURE D’ÉCRAN DE BRITNEY VS SPEARS

La réalisatrice de Britney vs Spears, Erin Lee Carr (à gauche), en compagnie de la journaliste Jenny Eliscu

Intervenants crédibles

En entrevue avec le Los Angeles Times, la réalisatrice Erin Lee Carr a récemment raconté qu’en 2019, alors qu’elle commençait à travailler sur Britney vs Spears, quelqu’un l’a informée des difficultés qu’elle risquait de rencontrer en chemin, notamment pour trouver des témoignages. Finalement, ça n’a pas été un problème. Le film de 1 heure 33 minutes s’appuie sur de nombreux intervenants crédibles. Parmi les plus intéressants, citons Adnan Ghalib, paparazzi que Britney Spears a fréquenté en 2007, au moment où tout partait en vrille. Sans apparaître devant l’objectif, l’homme livre un témoignage en apparence sincère. « Ce qui m’a sauté aux yeux pendant le divorce avec Kevin [Federline], c’est qu’elle n’avait jamais eu personne à qui faire confiance. Ni maman, ni papa, ni amis. Personne. » Directeur photo sur For the Record, documentaire de MTV censé redorer l’image de Britney Spears en 2008, Andrew Gallery s’avère également touchant, particulièrement lorsqu’il révèle le contenu d’une lettre qu’elle lui avait remise en secret pour qu’il aille la lire « à la télé ». Dans cette missive écrite à la troisième personne, la vedette pop dévoilait au monde entier sa vision des choses : « On empêche Britney de dénoncer tout ce qui se passe. Ceux qui contrôlent sa vie ont gagné 3 millions cette année. Elle aimerait que d’autres yeux voient sa situation, mais si elle en parle, elle est menacée. Les tuteurs menacent de prendre ses enfants. Combien de temps est-ce censé durer ? » Cette lettre n’a finalement jamais été éventée, puisque des avocats l’ont interceptée, indique-t-on dans le film.

CAPTURE D’ÉCRAN DE BRITNEY VS SPEARS

Andrew Gallery, directeur photo

Le faux méchant

Contre toute attente, le documentaire rétablit – du moins, en partie – la réputation de Sam Lutfi. Sorti de nulle part en 2007, le producteur californien est rapidement devenu l’agent de Britney Spears alors qu’elle traversait une période de crise. Dans l’œil du public, il était perçu comme une mauvaise influence, un dangereux arnaqueur et prédateur, un parasite qui droguait la vedette. En entrevue avec Erin Lee Carr, l’homme de 47 ans donne plutôt l’impression d’être du côté des gentils qui voulaient protéger Britney contre son père, le véritable méchant. « J’étais le bouc émissaire parfait, affirme Lutfi devant l’objectif. J’étais nouveau. Ils ignoraient qui j’étais. Je n’étais qu’un type remplaçable. »

PHOTO ARCHIVES GETTY

Britney Spears et Sam Lutfi, en 2007

Documentaires rivaux

Netflix n’est pas l’unique plateforme qui veut profiter de l’appétit du public pour l’affaire Britney Spears. Depuis vendredi, aux États-Unis, Hulu propose Controlling Britney Spears, suite de Framing Britney Spears, fameux documentaire du New York Times sorti en février dernier qui dénonçait le traitement médiatique réservé à Spears au début de sa carrière, en plus d’explorer sa mise sous tutelle. Controlling Britney Spears n’est pas encore offert au Canada. Il atterrira sur Crave vendredi, à 21 h. Mais selon la presse américaine, ce deuxième volet révèle que l’interprète a déjà été mise sur écoute. Toutes ses communications – courriels, messages textes, appels téléphoniques – étaient interceptées au moyen d’un système de surveillance institué par – vous l’aurez deviné – son père. Le documentaire de Netflix n’est pas sans défauts, mais chose certaine, il s’avère beaucoup plus nuancé que Framing Britney Spears. La preuve ? Bien qu’elles soutiennent la théorie du complot, Jenny Eliscu et Erin Lee Carr donnent quand même du temps d’antenne à Mark Vincent Kaplan, avocat de Kevin Federline, qui vient tempérer le discours des admirateurs qui croient que leur idole est prisonnière. « Los Angeles n’est pas un goulag fasciste, rappelle-t-il. Si [Britney Spears] voulait dire qu’elle était retenue contre son gré, elle pouvait le faire d’un million de façons. »

IMAGE TIRÉE D’UNE VIDÉO

Framing Britney Spears

Réaction de Britney Spears

PHOTO EDUARDO MUNOZ, REUTERS

Britney Spears au gala des MTV Video Music Awards, en 2016

Britney Spears n’a pas participé au documentaire de Netflix. Dans les dernières minutes du film, on l’entend bel et bien parler, mais il s’agit d’extraits audio du témoignage qu’elle a fait en juin devant un tribunal de Los Angeles. La réalisatrice reprend les moments forts du discours, dans lequel la chanteuse implorait le tribunal de faire cesser la tutelle. « Je mérite d’avoir les mêmes droits que tout le monde et d’avoir un enfant, une famille, tout ça. […] Je veux juste reprendre ma vie. Ça fait 13 ans et c’est assez. » Le souhait de Britney Spears pourrait finalement être exaucé, car ce mercredi, un tribunal de Los Angeles annoncera s’il retire à Jamie Spears son statut de tuteur. Au début du mois, ce dernier avait déposé une requête dans laquelle il affirmait être en faveur d’une levée pure et simple des mesures de tutelle, comme sa fille l’avait précédemment demandé. En d’autres termes, les heures du mouvement #FreeBritney sont peut-être comptées.

Le documentaire Britney vs Spears est offert sur Netflix. Version sous-titrée en français également offerte.