Le 29 mars prochain, Noémi Mercier rejoindra Céline Galipeau, Anne-Marie Dussault et Sophie Thibault au sein du club sélect des femmes qui pilotent une émission quotidienne d’information. La nouvelle animatrice de Noovo mène déjà une superbe carrière de journaliste. Mais ce qui l’attend pourrait bien être le plus grand défi de sa vie professionnelle.

Par la fenêtre de son studio tout neuf, angle Papineau et René-Lévesque, Noémi Mercier voit la Maison de Radio-Canada. Le symbole n’échappe pas à l’animatrice de la nouvelle émission d’information Noovo Le fil qui prendra l’antenne lundi prochain, à 17 h.

« C’est gros, dit-elle en parlant de la société d’État. Nous, on est tout petits. » « Nous », c’est la soixantaine de journalistes, d’animateurs et de techniciens qui ont laissé un emploi très enviable – à TVA, Radio-Canada, La Presse Canadienne, L’actualité, La Presse – pour participer à une nouvelle aventure : créer un service d’information. « C’est un saut dans le vide, observe Noémi Mercier. Quand on s’en parle, on se dit qu’on vit un moment unique qui ne repassera pas dans notre vie. Et quand le stress monte, on se répète : “Savoure.” On a même pensé se faire confectionner des t-shirts “Savoure, crisse” [rires]. »

Dans la salle de nouvelles de Noovo
  • De gauche à droite : la productrice de l’émission Noovo Le fil de 17 h, Ariane Lafrenière, l’animatrice Noémi Mercier et la recherchiste Camille Parent préparent le contenu d’une simulation d’émission.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    De gauche à droite : la productrice de l’émission Noovo Le fil de 17 h, Ariane Lafrenière, l’animatrice Noémi Mercier et la recherchiste Camille Parent préparent le contenu d’une simulation d’émission.

  • L’animatrice Noémi Mercier s’entretient avec une des collaboratrices de l’émission Noovo Le fil, l’avocate Sophie Gagnon, directrice générale de Juripop.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    L’animatrice Noémi Mercier s’entretient avec une des collaboratrices de l’émission Noovo Le fil, l’avocate Sophie Gagnon, directrice générale de Juripop.

  • La salle de nouvelles de Noovo a un look industriel avec ses murs de briques blanches, ses conduites d’aération apparentes et ses fausses fenêtres qui donnent l’impression d’être dans un loft.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    La salle de nouvelles de Noovo a un look industriel avec ses murs de briques blanches, ses conduites d’aération apparentes et ses fausses fenêtres qui donnent l’impression d’être dans un loft.

  • La régie est équipée d’une technologie de pointe. Sur la photo, on voit la réalisatrice Stéphanie Marin. La réalisation des émissions d’information de Noovo sera 100 % féminine.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    La régie est équipée d’une technologie de pointe. Sur la photo, on voit la réalisatrice Stéphanie Marin. La réalisation des émissions d’information de Noovo sera 100 % féminine.

  • Au fond de la salle, une cabine téléphonique vintage permet aux journalistes de s’isoler pour faire des appels téléphoniques. Sur cette photo, on voit l’animateur de Noovo Le fil week-end, Meeker Guerrier.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    Au fond de la salle, une cabine téléphonique vintage permet aux journalistes de s’isoler pour faire des appels téléphoniques. Sur cette photo, on voit l’animateur de Noovo Le fil week-end, Meeker Guerrier.

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Se faire des peurs

À 44 ans, Noémi Mercier a déjà une très belle carrière dans le monde des médias, mais aucune expérience à l’animation d’une émission de nouvelles. Jusqu’en 2018, elle était reporter au magazine L’actualité, où elle s’est notamment illustrée grâce à une enquête percutante sur les agressions sexuelles au sein des Forces armées canadiennes. On l’a aussi vue à l’animation de la série Kebec, ainsi qu’à Dans les médias, à Télé-Québec. On l’a également entendue sur ICI Première, au micro de Plus on est de fous, plus on lit et à l’animation de Longueur d’onde avec son chum, le réalisateur et animateur Philippe Desrosiers.

Elle l’avoue, elle n’avait jamais rêvé d’animer une émission quotidienne d’information. Mais Noémi Mercier est une touche-à-tout curieuse qui carbure à la nouveauté. C’est aussi une skieuse de haut niveau qui aime les parcours difficiles. Noovo lui a fait une offre qu’elle ne pouvait refuser.

J’aime ça, avoir la chienne. J’ai besoin que ce soit difficile, sinon je m’ennuie à mourir.

Noémi Mercier

Autour de Noémi Mercier, outre les journalistes, on trouvera une trentaine de collaborateurs qui commenteront l’actualité du jour, en solo ou en duo. Noémi Mercier les a choisis avec soin, avec la productrice Ariane Lafrenière. Le mot-clé : diversité. « La diversité, ce n’est pas juste moi sur le poster », lance celle qui sera la seule femme racisée aux commandes d’un bulletin de nouvelles francophone au Québec (Marie-Anna Murat, aujourd’hui directrice des communications chez Bell Média, société mère de Noovo, avait été la première en 1989, à TVA). Et pas question que ces commentateurs se crêpent le chignon. « Je n’ai pas envie de débats stériles où personne ne s’écoute », précise-t-elle.

Pour se différencier de ses principaux concurrents – Radio-Canada et TVA, qui disposent tous deux d’un service de nouvelles en continu –, Noovo Le fil proposera une information plus « incarnée ». Doit-on s’attendre à une animatrice qui commente la nouvelle ?

Je ne suis pas Jean-Luc Mongrain, je ne ferai pas de commentaire. Quand je dis “incarner” la nouvelle, c’est d’abord entendre les gens qui sont directement touchés par l’actualité. Et ça passe aussi par les journalistes, dans leurs reportages.

Noémi Mercier

Incarner la nouvelle, c’est aussi dans le ton. Son style, Noémi Mercier le souhaite convivial, plus près de la radio parlée que du bulletin d’information classique. Elle ne cache pas son admiration pour Paul Arcand, le morning man du 98,5. « Il a le doigté de se mettre au diapason de l’émotion collective des Québécois, de porter ça dans ses entrevues, observe-t-elle. Ça prend beaucoup de métier pour se servir de ça de manière informative. »

Son autre influence, c’est Marie-Louise Arsenault. « La première chose que j’ai animée dans ma vie, c’est un atelier dans un congrès de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec [FPJQ], en 2015, se souvient-elle. Je me suis demandé : que ferait Marie-Louise ? Ça fait des années que je la vois travailler et j’ai retenu plusieurs choses : sa grande chaleur humaine, l’importance qu’elle accorde au fait que les gens soient bien autour d’elle, sa capacité de poser des questions tough avec le sourire. C’est une femme qui soutient beaucoup les femmes. Je lui dois beaucoup. »

Une image différente

Ce serait hypocrite de ne pas parler de l’image quand on sait à quel point celle des présentateurs de nouvelles est scrutée à la loupe par le public. Noémi Mercier en est consciente et apprivoise cet aspect du métier. « Je suis contente d’avoir l’âge que j’ai, dit-elle. Mon estime professionnelle ne dépend pas de mon apparence. Cela dit, tous mes rendez-vous chez le coiffeur sont bookés jusqu’à Noël [rires]. »

Noovo a embauché la styliste Chanelle Riopel, qui travaille avec Véronique Cloutier, pour définir le look de sa nouvelle cheffe d’antenne. L’objectif : en finir avec l’uniforme un peu austère traditionnellement associé au monde de l’information. « Ce ne sera pas aussi flyé que Véro, je ne fais pas de la variété, précise Noémi Mercier, qui adore la mode. Mais il y a quelques choix qui pourraient surprendre ma maman. »

On pourrait donc la voir portant un tailleur coloré avec des baskets ou un jeans avec un haut plus habillé et des talons hauts. « On parle d’un look edgy et sophistiqué », résume-t-elle.

Rencontrée à une dizaine de jours de la première, l’animatrice se familiarisait encore avec l’aspect plus technique de son nouveau boulot : le chronomètre qu’on lui souffle à l’oreille, le télésouffleur qu’elle opère elle-même, les déplacements dans le studio. Mais au-delà de cette gymnastique qu’elle devrait maîtriser rapidement, et la gestion serrée de son temps, ce qui la stresse le plus, ce sont les attentes des gens.

« Je ne veux pas décevoir, souffle-t-elle. En ce moment, il y a un bon buzz, tout le monde a hâte. J’essaie de ne pas trop y penser. Il faut avoir du fun en le faisant. Et se dire qu’au début, on n’offrira pas 100 % de notre potentiel. Le 29 mars, ce que les gens verront, ce n’est pas l’aboutissement de quelque chose, c’est le début. »