Télé-Québec n'aura pas à diffuser d'émissions en anglais, tranche le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). L'organisme réglementaire estime toutefois qu'il est temps d'avoir une réflexion sur la diversité culturelle à la télé.

L'organisme English Language Arts Network (ELAN), qui regroupe 6000 artistes anglo-québécois, voulait que Télé-Québec consacre 10 % de sa programmation et de son budget à des émissions en anglais sur la communauté anglo-québécoise. Télé-Québec, la chaîne éducative créée et financée par le gouvernement du Québec, s'y opposait. Le CRTC a tranché que Télé-Québec devait demeurer une chaîne qui diffuse 100 % de son contenu en français.

«Nous avons une licence de radiodiffusion francophone. [Diffuser en anglais] n'est pas le mandat de Télé-Québec, mais celui des diffuseurs anglophones au Québec. [...] Mais nous allons continuer à faire ce qu'on a toujours fait: refléter la diversité du Québec, notamment la réalité anglo-québécoise», a dit Marie Collin, PDG de Télé-Québec.

ELAN n'est pas surpris de la décision du CRTC, mais se dit «encouragé» par la volonté de Télé-Québec «d'avoir une conversation avec la communauté anglophone» afin qu'elle soit bien représentée sur les ondes de Télé-Québec, indique Guy Rodgers, directeur général d'ELAN.

L'organisme réglementaire fédéral renvoie la balle dans le camp du gouvernement du Québec. «Les provinces ont la possibilité de mettre en place des télévisions éducatives dans les deux langues officielles pour leurs citoyens s'ils le désirent», écrit le CRTC dans sa décision rendue la semaine dernière sur le renouvellement de licence de Télé-Québec. En Ontario, le gouvernement provincial finance les chaînes TVO (en anglais) et TFO (en français). La création d'une chaîne éducative anglophone au Québec n'est pas une priorité pour l'organisme ELAN.

Une réflexion sur la diversité

ELAN et d'autres organismes demandaient aussi que 20 % du budget et de la programmation de Télé-Québec servent à refléter les minorités et les communautés culturelles québécoises, qui représentent environ 20 % de la population. Le CRTC n'a pas imposé un tel quota à Télé-Québec, mais il a indiqué qu'il ferait bientôt une réflexion sur la diversité à l'écran pour «l'ensemble des diffuseurs» télé. Le CRTC n'a pas encore indiqué sous quelle forme il fera cette réflexion.

Télé-Québec estime que des quotas de diversité à l'écran «seraient très difficiles à gérer» en vertu de ses multiples mandats. La chaîne éducative révise actuellement sa politique sur la diversité à l'écran.

«S'il y a quelqu'un qui fait de la place à la diversité [à la télé], c'est bien Télé-Québec. On en tient compte dans nos productions et nos acquisitions de contenu, mais il y a toujours place à l'amélioration. C'est une préoccupation constante, c'est dans l'ADN de Télé-Québec», estime Marie Collin.

«On fait partie de la société, on a vu tous les débats, on veut une approche intéressante, novatrice, mais qui fait la part des choses avec la réalité. Comme l'Union des artistes, on veut davantage de gens issus de la diversité qui entrent dans les écoles [d'art dramatique].»

Une modification aux émissions jeunesse

Le CRTC a fait un seul changement aux conditions de licence de Télé-Québec: élargir la définition d'émissions jeunesse, de 2-11 ans à 2-17 ans, comme le demandait la chaîne éducative. Télé-Québec conserve son obligation de diffuser 21 heures par semaine d'émissions jeunesse.

Télé-Québec indique vouloir continuer à dépenser la quasi-totalité de son budget jeunesse pour les 2 à 11 ans. «Nous voulions juste plus de flexibilité réglementaire afin de pouvoir inclure des occasions de faire une différence comme le gala Mammouth [qui s'adresse aux ados], dit la PDG Marie Collin. Pour les trois prochaines années, nous n'avons pas d'investissements prévus dans le 13-17 ans. Notre choix, c'est d'avoir une offre plus substantielle dans le 2-11 ans.»

Télé-Québec, qui a fêté ses 50 ans cette année, consacre 91 % de son budget d'émissions canadiennes à des émissions originales en langue française. Dans ce contexte, pas besoin pour le CRTC d'imposer un seuil d'émissions originales comme il l'a fait avec les groupes télé privés (75 %). Le CRTC a renouvelé la licence de Télé-Québec pour cinq ans, jusqu'en août 2024. Sans imposer de seuil précis, l'organisme réglementaire s'attend toutefois à ce que Télé-Québec fasse davantage appel à des producteurs télé à l'extérieur de Montréal.