«C'est une station qui vient au monde, nous on vient au monde comme auteures et la série se présente au monde, lance Karina Goma, coauteure de la série, avec Sophia Borovchyk, au cours d'une entrevue accordée récemment à La Presse. Il y a quelque chose de très spontané et de fou dans leur décision de mettre Prozac en ondes», dit-elle humblement. Elle admet du même souffle qu'il y a moins de pression à se lancer dans le vide avec une jeune chaîne que sur les ondes de Radio-Canada ou de TVA. «C'est vraiment une prise de risque collective», estime l'auteure.

Sujet de l'intrigue: la maladie des temps modernes, c'est-à-dire la dépression. Mais ironiquement, pour aborder ce thème délicat et encore tabou les deux scénaristes ne voulaient pas verser dans la déprime.

Ainsi, Prozac - nom d'un célèbre antidépresseur - met en vedette Philippe (Patrice Robitaille), un homme dans la trentaine qui a le profil-type du winner. Mais un jour, notre monsieur parfait craque et commet une erreur monumentale en tant que tout nouvel éditorialiste en chef du quotidien Le Courrier. Philippe prend alors conscience qu'il est en train de sombrer dans une profonde dépression. Avec l'aide de ses deux fidèles amis, Mathieu (François Létourneau) et Sophie (Isabelle Blais), il décide de se joindre à un groupe de thérapie. L'homme y fera la connaissance de personnages colorés et excentriques qui contribueront à amener une touche d'humour à l'émission, réalisée par François Bouvier (Les hauts et les bas de Sophie Paquin). France Castel, Gilles Renaud et Louis Morissette font également partie de la distribution.

Et ce scénario original, qui a exigé beaucoup de recherche sur la dépression, a presque été écrit en un jour par ces deux néophytes de la télévision. Sérieusement, Karina Goma et Sophia Borovchyk, n'ont évidemment pas pondu leur texte en 24 heures, mais elles ont disposé de peu de temps: quatre mois et demi pour accoucher de onze épisodes. Selon la norme, une émission de trente minutes s'écrit en deux semaines; elles, le faisaient en six jours. Leur aventure, racontée avec intensité, témoigne d'un marathon essoufflant et douloureux. C'est qu'elles ont eu le feu vert de V en mars. Comme la chaîne souhaitait inscrire l'émission à sa programmation d'automne - qui marque le coup de sa première année d'existence -, le tournage devait se faire au plus tard cet été. Résultat: les textes devaient être livrés en juin.

Elles ont d'abord commencé l'écriture chacune de leur côté: l'une à New York, l'autre à Saint-Lambert. Elles communiquaient ensemble tous les matins, pour une séance de brainstorming, comme on dit dans le métier.

Ensuite, les deux complices se sont littéralement barricadées dans un chalet à la campagne où elles ont bu du thé vert, mangé des salades de graines germées à profusion, fait quelques séances de yoga et écrit presque 14 heures par jour. «On a développé certaines techniques comme les power naps de 15 minutes», souligne fièrement Sophia Borovchyk.

Et, à une semaine de la diffusion du premier épisode de Prozac, les auteures n'ont pas encore mis le point final à leur projet. Au moment de l'entrevue, il restait les quatre dernières émissions à tourner. Elles étaient donc encore sollicitées pour apporter retouches et ajustements au scénario. «Si on n'avait pas eu à remettre les textes, je pense qu'on serait encore en train d'écrire», disent-elles d'une même voix.

Si les péripéties de Philippe et de son groupe d'entraide plaisent aux téléspectateurs cet automne, seront-elles prêtes à revivre l'aventure de l'écriture pour une deuxième saison? La réponse ne se fait pas attendre.

«C'est difficile de ne pas penser à la suite, admet Sophia Borovchyk. On avait beaucoup de matériel cette année, qu'on n'a pas pu utiliser parce que les épisodes sont courts. Et c'est long, une dépression», ajoute-t-elle, avec un sourire en coin.

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Prozac. Début: le mardi, 7 septembre à 20 h 30.