La saison télévisuelle de l'automne prochain est en péril. L'attente et l'incertitude liées à l'entrée en vigueur du Fonds des médias du Canada, en avril, risquent de provoquer une diminution du nombre de nouvelles émissions prévues à l'horaire pour la rentrée de septembre 2010, craignent plusieurs réalisateurs et producteurs.

Les lignes directrices de ce nouveau programme, qui financera à la fois les productions destinées au petit écran et également celles conçues pour le web, devraient être dévoilées au début du mois de mars.

Le fonds sera officiellement mis en place en avril. En attendant le jour J, plusieurs chaînes de télévision mettent des projets sur la glace car elles ignorent, pour le moment, les nouveaux critères de financement et ne connaissent pas la valeur de la somme d'argent dont elles disposeront.

«Les diffuseurs vont devoir prendre des décisions rapidement, souligne la présidente de l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec (APFTQ), Claire Samson. Ce n'est pas l'idéal.»

Résultat: les producteurs qui obtiendront le feu vert pour l'automne devront faire vite s'ils souhaitent que leur émission se retrouve à l'antenne en septembre.

Les étapes de scénarisation, de tournage et de montage devront se faire dans un laps de temps beaucoup plus restreint. Les équipes de production feront face à environ deux mois de retard par rapport à l'échéancier traditionnel.

«Si j'étais diffusé en septembre, je serais bien inquiet», admet Louis Choquette, réalisateur du Gentleman et de Mirador.

C'est d'ailleurs le cas de Jean-Pierre Morin, président de Vivavision, la boîte qui produit Tactik. La diffusion de la troisième saison de cette émission jeunesse diffusée à Télé-Québec est justement prévue pour l'automne.

«Les chaînes sont en mode prudence, mentionne le producteur. Malgré tout, avec les gens de Télé-Québec, on a réussi à négocier une entente pour commencer l'écriture de Tactik 3, car on doit amorcer le tournage en mars pour être prêts à l'automne. Mais c'est certain que la chaîne est très nerveuse. Elle n'a aucune idée de ce qui l'attend.»

Mais tous les producteurs ne pourront faire comme Jean-Pierre Morin. En raison du manque de temps, certaines émissions pourraient être compromises ou encore insérées dans la grille-horaire de l'hiver.

«On est tout à fait conscients que ça pose un défi», concède Stéphane Cardin, vice-président des politiques et relations avec l'industrie du Fonds canadien de télévision (FCT). Il ajoute toutefois qu'il aurait été difficile de rendre publiques les grandes lignes du programme avant le mois de mars.

Rappelons que le Fonds des médias du Canada est né de la fusion entre le FCT et le Fonds des nouveaux médias.

Au cours des derniers mois, les représentants du FCT ont sillonné le pays afin de connaître les préoccupations des gens de l'industrie avant de déterminer les politiques qui régiront le nouveau programme de financement, notamment liées aux succès d'écoute. Bien que plusieurs chambardements soient à prévoir, Michèle Fortin, présidente de Télé-Québec, croit que la transition entre les deux fonds se fera en douceur, du moins la première année.

«Il n'y aura pas de changements radicaux cette année, estime-t-elle. Il va y avoir une période de transition pour permettre aux diffuseurs et aux producteurs de passer à travers. Il n'y a personne qui veut mettre l'industrie de la télé à terre.»