Un cercueil. Des couronnes de fleurs. De la musique funèbre. Voilà le décor de la manifestation organisée hier à Montréal par le Syndicat des communications de Radio-Canada en guise de soutien aux 800 personnes qui perdront leur emploi d'ici septembre. Une mise en scène à l'image de l'humeur des troupes.

L'inquiétude règne dans la tour du boulevard René-Lévesque, où l'on attend le verdict de la direction concernant les coupes annoncées en mars.

D'ici vendredi, la société d'État fera savoir aux employés admissibles à la retraite si leur demande de départ volontaire est acceptée. Puis, la semaine prochaine, elle dévoilera la liste des emplois qui seront abolis.

«Le programme incitatif de retraite a pour but de réduire le nombre de postes qui pourraient ensuite être supprimés», mentionne Hélène Lachance, agente aux communications institutionnelles de Radio-Canada. Sur les 800 emplois abolis, environ 336 devraient l'être au service français.

Par solidarité, quelque 200 employés de Radio-Canada sont donc sortis sur le trottoir hier midi. Deux autres rassemblements du genre avaient également été organisés à Québec et à Moncton.

Tenu dans l'ignorance en ce qui concerne les suppressions, le Syndicat des communications de Radio-Canada - qui représente notamment quelque 1600 journalistes, recherchistes, annonceurs au Québec et à Moncton - dénonce l'attitude de la direction.

«Je pense que Radio-Canada procède à des ajustements de main-d'oeuvre qui nous paraissent un peu inacceptables, a déploré le président du syndicat, Alex Levasseur, lors d'un point de presse tenu à l'occasion de la manifestation. La convention prévoit que lorsqu'il y a des mises à pied en raison de compressions économiques, il y a un comité qui est créé avec le syndicat et on discute des postes qui sont jugés excédentaires.»

Dans ce cas-ci, M. Levasseur a plutôt l'impression que la direction fait cavalier seul. Il soutient qu'aucune discussion poussée n'a été engagée entre le syndicat et la SRC à ce sujet.

«Ce qu'on sent actuellement, c'est que sur le terrain, l'employeur, lui, il bouge, il commence déjà à faire des choses, il commence déjà à déplacer des gens.» Le président du syndicat croit qu'une centaine de ses membres pourraient être affectés par ces suppressions.

«On ne sait toujours pas qui va être touché, mentionne Nancy Wood, journaliste à la télé anglaise. C'est triste et inquiétant à la fois.»

«L'ambiance est mauvaise, ajoute Guy Lapointe, journaliste et rédacteur à Radio-Canada. Au bout du processus, ce sont les jeunes qui n'auront plus de travail.» Autre conséquence de ces coupes: l'augmentation de la charge de travail pour ceux qui resteront, souligne-t-il. «À force de toujours en faire plus, nous allons perdre notre espace de réflexion.»

Campagne publique

Par ailleurs, le syndicat lancera dans quelques jours un vaste mouvement de sensibilisation auprès de la population. Avec le slogan «Je suis, nous sommes pour un service public de qualité» la campagne a pour objectif de laisser la parole aux citoyens, notamment grâce à un site internet, annonce Alex Levasseur.

«Nous souhaitons que le public dise à ce gouvernement-ci en particulier et à tous ceux qui pourraient le remplacer: Radio-Canada est une institution à laquelle on tient, c'est un service public de qualité et on ne veut pas le voir disparaître.»