On avait prédit une quasi-apocalypse. Près de 80 000 personnes quittant le site de l'ancien Hippodrome de Montréal en même temps avec pour seule option le transport en commun. Selon les organisateurs, l'apocalypse n'a pas eu lieu. Mais, pour plusieurs spectateurs qui ont assisté, hier, à ce premier de deux spectacles du groupe irlandais U2 à Montréal, les services de transport et de police n'ont pas été à la hauteur.

L'accès au site et le transport des spectateurs représentent l'un des importants défis qu'avaient à relever les producteurs de ce concert et leurs partenaires. La Société de transport de Montréal (STM) avait prévenu les usagers qu'il faudrait faire preuve de patience pour monter à bord d'un wagon de métro ou d'une des navettes se dirigeant vers la station de métro Jean-Talon. Or, elle n'avait pas prévu qu'une douche froide s'abattrait sur la foule à la toute fin du spectacle. Résultat: des dizaines de milliers de personnes détrempées, grelottantes, qui souhaitaient quitter le site au plus vite pour rentrer chez elles.

Alors que certaines personnes se disent néanmoins satisfaites du service déployé par la STM, d'autres, dans des courriels envoyés à La Presse et sur les réseaux sociaux, se plaignent des délais d'attente. «Comment cela fait-il qu'à la sortie du spectacle de U2, il a fallu attendre près de 1h30 pour avoir accès à un de vos autobus spéciaux, et cela en plein orage en plus?, demande Martin Lamontagne dans une plainte qu'il a fait parvenir à la STM.  Je la comprends pas celle-là. Les autobus passaient et personne ne savait ce qui se passait. L'anarchie totale. Les usagers commençaient à se disputer entre eux. La tension était palpable partout.» «La STM a échoué, a publié Jessica Grana sur son compte Twitter. Deux heures après le spectacle, nous étions encore coincés.»

La porte-parole de la Société de transport de Montréal, Marianne Rouette, soutient qu'il est peu probable que des gens aient attendu si longtemps pour accéder au transport en commun. Selon elle, 90 minutes après le spectacle, il n'y avait plus de file d'attente pour prendre les autobus. Elle indique que l'objectif était de permettre à tous les spectateurs de quitter le site à l'intérieur d'un délai de trois heures, ce qui a été respecté. Elle reconnaît toutefois que l'accès au service de transport a été compliqué par le mauvais temps. «On avait tout prévu sauf l'imprévisible, affirme-t-elle. On avait demandé aux gens de demeurer sur le site après le spectacle, mais tout le monde a quitté en même temps à cause de la pluie et il y a eu engorgement. Il n'y a rien qu'on puisse faire face à une telle mer de monde.»

Pour répondre à la demande, la STM a ajouté une quarantaine d'autobus articulés aux 126 navettes déjà prévues. Les heures d'ouverture du métro ont également été prolongées. Le dernier train a quitté la station Côte-Vertu à 2h25. «Nous n'avons laissé personne en plan», assure Marianne Rouette. Elle ajoute que la STM a reçu plusieurs commentaires positifs de la part des usagers et que le compte Twitter @U2stminfo a été mis à jour régulièrement et consulté par plusieurs personnes. La STM n'entend pas changer son plan de match pour le second spectacle qui sera présenté ce soir. Mme Rouette invite les gens à demeurer sur le site après le spectacle pour éviter la cohue.

Bien que la STM et le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) ne signalent aucun incident majeur, l'impatience de la foule s'est fait sentir à quelques reprises. Des gens ont notamment fait tomber les clôtures érigées sur la rue Jean-Talon, perturbant pendant un moment le service de navette.  Le travail des policiers a été critiqué par certaines personnes qui déplorent ne pas avoir été dirigées correctement vers le métro et les autobus. «Moi, ma famille, et des milliers de personnes se sont retrouvées dans un cul-de-sac derrière des clôtures de contrôle de foule près du Wal-Mart, et ceci après avoir couru près d'un kilomètre, raconte Benoit Deniger. C'était la cohue. Des gens sautaient par-dessus la clôture. Pendant tout ce temps, les agents du SPVM ne sont jamais sortis du véhicule pour aider et diriger.» Le SPVM, qui dressera plus tard un bilan de l'événement, n'a pas voulu commenter. Selon son porte-parole, André Leclerc, la soirée s'est bien déroulée et aucune arrestation n'a été effectuée.

Urgences-Santé signale pour sa part une trentaine d'interventions mineures dont une vingtaine ont nécessité un transport par ambulance. Les ambulanciers sont principalement intervenus pour des cas d'épuisement, d'intoxication à l'alcool ou aux drogues et d'hypothermie, en raison de la pluie. Les préposés d'Ambulance Saint-Jean ont également fait une centaine d'interventions.

Grand ménage

L'heure était au grand ménage ce matin sur le site de l'hippodrome où plusieurs centaines de personnes attendaient déjà en ligne pour assister au spectacle de ce soir. «Le travail de nettoyage est énorme, souligne Jacques Aubé, vice-président et directeur général de Evenko, le producteur du spectacle. La tempête a causé quelques dégâts, mais rien de majeur. Quelques lumières et des tables de pique-nique ont été endommagées.»

Aucune modification ne sera apportée à la logistique de l'événement. Jacques Aubé, qui se dit très satisfait du déroulement de la soirée d'hier, invite les spectateurs à se rendre sur le site tôt pour participer au Fan Jam et éviter la cohue au début du spectacle. Hier, le groupe Interpol est monté sur scène une demie-heure plus tard que prévu afin de permettre aux nombreuses personnes qui étaient toujours à l'extérieur du site de franchir les tourniquets.