Mardi, journée de répétition au Théâtre Outremont. Daniel Clarke Bouchard est assis au piano mais il ne joue pas. Il observe le maestro Yannick Nézet-Séguin diriger l'Orchestre Métropolitain dans une création du compositeur en résidence Éric Champagne.

Tout à coup, le pianiste de 13 ans se penche, ramasse la partition qui traîne par terre et s'y plonge, histoire d'être fin prêt quand viendra son tour d'interpréter le deuxième Concerto de Chostakovitch.

Juste avant de répéter le deuxième mouvement de l'oeuvre du compositeur russe, Nézet-Séguin confie à ses musiciens que c'est pour lui le plus beau mouvement de l'oeuvre de Chostakovitch. Le maestro se penche vers le jeune pianiste pour solliciter son avis qu'il relaie aussitôt à l'orchestre: «C'est la plus belle pièce de toute la musique classique.»

Daniel en est convaincu. C'est la deuxième fois qu'il joue ce concerto avec un orchestre et il est fier de souligner que pour «Yannick», c'est une première. «L'émotion était là», dira-t-il plus tard de l'interprétation de cet andante qu'il compare à une petite ballade dans l'espace.

Oui, l'émotion était au rendez-vous même si le piano de Daniel était désaccordé et que le jeune homme n'a pas l'habitude d'utiliser autant les pédales de son piano. Les musiciens de l'OM ont souri devant le talent, la fraîcheur et la spontanéité de leur jeune collègue d'un jour qu'ils ont applaudi pendant que de la salle leur parvenaient des bravos lancés par un groupe d'élèves de Vincent-d'Indy.

Le lendemain, Daniel, l'OM et le narrateur Benoît Brière ont proposé deux fois devant un public scolaire un programme écourté dont le deuxième mouvement de Chostakovitch était exclu. En soirée, le pianiste a enfin pu s'attaquer à «la plus belle pièce de toute la musique classique» et atteindre «l'expression d'un interprète de longue expérience», selon les mots du collègue Claude Gingras qui a qualifié son accomplissement de génial. À la fin de la soirée, des fans de tous les âges ont fait la queue pour qu'il leur dédicace son premier album, Scènes d'enfants.

En début de semaine, Daniel filera vers Toronto pour un blitz médiatique qui passera aussi bien par l'émission Canada A.M. que par le talk-show de fin de soirée de George Stroomboulopoulos.

Puis retour à Montréal pour donner, le 7 décembre à la salle Claude-Léveillée de la Place des Arts ­ l'ancien Studio-théâtre -, un concert solo au cours duquel il interprètera l'essentiel de Scènes d'enfants. Sans son mentor Oliver Jones mais avec, peut-être, une petite surprise à la fin.