Les artistes sont sur un pied d'alerte, les fauteuils roulants sont alignés, les préposés s'affairent, les bénévoles veillent au confort de tous. Il y a de la fébrilité dans l'air au CHSLD quand vient le temps d'un concert de la Société pour les arts en milieu de santé (SAMS). La Presse a assisté à l'un de ces événements qui mettent de la lumière dans la vie des personnes âgées.

Depuis sa fondation en 2009, la SAMS a offert près de 3000 concerts à 130 000 personnes dans une centaine d'établissements de santé. Ce faisant, elle donne aussi du travail à une centaine de musiciens professionnels qui sont rémunérés pour leurs services. Environ 80% d'entre eux se consacrent au répertoire classique.

C'est le cas de la soprano Christina Tannous, du ténor Éric Thériault et du pianiste Dominic Boulianne, présents au CHSLD Henri-Bradet du CSSS Cavendish, la semaine dernière.

«C'est ma cinquième saison avec la SAMS, dit Christina Tannous. Je donne environ une quinzaine de concerts par an. C'est une belle mission sociale et ça nous rend de meilleurs artistes de chanter pour cette clientèle.»

«Ce sont des gens qui ne peuvent pas souvent sortir, alors on leur amène des concerts de qualité professionnelle. On a énormément de plaisir à le faire. Chaque fois, il y a des surprises», ajoute son partenaire, Dominic Boulianne.

En matière de surprise, les artistes en ont eu une bonne lors de ce concert, alors qu'une résidante a entonné, d'une voix plutôt solide et sans prévenir, L'amour est un oiseau rebelle, un air tiré de l'opéra Carmen. Alors que les musiciens s'apprêtaient à chanter autre chose, Dominic Boulianne a réagi au quart de tour en accompagnant la dame au piano tandis que Christina Tannous reprenait avec elle cet air bien connu.

Les bienfaits

«On nous a expliqué que la musique fait réagir des zones particulières du cerveau chez les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, dit Dominic Boulianne. Dès qu'ils entendent un air qui leur rappelle leur jeunesse, leur regard s'illumine et certains se mettent à chanter avant de retomber dans leur mutisme. Les paroles leur reviennent. Pendant l'espace d'un instant, on leur fait revivre leur passé.»

Les expériences vécues par les musiciens sont parfois bouleversantes. Christina Tannous se souvient avec émotion d'avoir chanté pour une dame qui vivait ses dernières heures, dans la période de Noël, en compagnie d'une harpiste.

«La dame était toute chétive. Je lui ai chanté Sainte Nuit et ç'a a été très difficile d'aller jusqu'au bout. Sa fille était à côté de nous en train de pleurer. C'était un moment suspendu», dit-elle.

De toute évidence, ces concerts sont très appréciés des résidants. Lors de notre visite, plusieurs tapaient des mains, quelques-uns ont chanté et une dame s'est même levée pour esquisser quelques pas de danse.

«J'ai toujours aimé la musique et les spectacles, dit Helen, résidante du CHSLD. Quand j'étais jeune, je participais à des pièces de théâtre à mon église. J'aimais aussi chanter. À ce point dans ma vie, je n'aurais pas accès à des spectacles s'ils ne venaient pas ici. C'est vraiment magnifique.»

Sa compagne, Margaret, renchérit: «Cela vous fait oublier tous vos soucis.»

Concert-bénéfice

Cette année, la SAMS s'est associée à Michel Frigon, qui devient son compositeur en résidence. Il s'est inspiré d'un poème de Baudelaire pour écrire Par delà les éthers, une pièce pour piano qui sera jouée dans les CHSLD et présentée en première publique à l'occasion d'un concert-bénéfice pour la SAMS qui au lieu le 20 mars.

Au programme de cette soirée, mentionnons, entre autres, la présence du jeune ténor Jean-Michel Richer, de l'Atelier lyrique de l'Opéra de Montréal, d'un trio de musiciens d'I Musici, d'Andréanne Paquin, soprano, de Jean-François Normand, clarinettiste, et de l'Early Jazz Band.

Concert-bénéfice de la SAMS, le 20 mars, 19h30, salle Bourgie.