Bien que l'OSM soit rentré ce week-end de sa tournée en Amérique du Sud, c'est son Choeur de chambre, de formation récente, qui donnait le dernier concert du dimanche de la saison. Inscrit dans une catégorie à part, «Les concerts spéciaux», le programme jumelait deux des Requiem les plus célèbres du répertoire français, soit le Fauré et le Duruflé.

Les deux oeuvres étaient présentées en ordre inverse et dans des versions où l'orgue remplace l'orchestre. Faut-il préciser que l'orgue entendu n'était pas celui qui doit trôner à la Maison symphonique, même si on en voit déjà une partie des tuyaux ainsi que la console. Cet orgue, un gigantesque Casavant, sera inauguré dans un an. Pour le présent concert, on poussa jusqu'à l'avant-scène un petit orgue électronique Rodgers de deux claviers, pédalier et 27 jeux dont François Zeitouni parvint à tirer quelques registrations intéressantes.

Son travail était particulièrement délicat dans le Duruflé. Le compositeur a livré son Requiem en trois instrumentations différentes. On choisit celle où l'orgue seul accompagne le chant. Lui-même organiste, Duruflé y a indiqué les jeux avec précision. Il n'est pas certain que nous ayons entendu, par exemple, une soubasse 16-pieds à la pédale. Par contre, l'instrument possède la Voix céleste requise pour le In Paradisum et Zeitouni l'a bien fait sonner.

Les notes de programme - dont on se demande parfois à quoi elles servent - ne précisaient pas que la version avec orgue du Requiem de Duruflé est du compositeur lui-même. Quant au Requiem de Fauré, il n'a pas été créé «le 16 janvier 1988» (lit-on en page 13) mais un siècle plus tôt. Et si Fauré en a signé plusieurs instrumentations, aucune n'est pour orgue seul, comme chez Duruflé. C'est John Rutter qui a préparé le présent arrangement, et ce, à partir des versions avec orchestre. Autres précisions que ne donnait pas le programme.

Le Choeur de chambre de l'OSM - 20 femmes et 22 hommes, disposés en demi-cercle devant leur chef Andrew Megill - s'est révélé une formation de toute première grandeur. Bougeant peu, mais toujours avec efficacité, M. Megill dirige d'une façon claire et précise, il laisse les voix chanter avec naturel, il ne les force jamais, et il apporte un soin tout particulier à la prononciation et aux fins de phrases. En même temps, il amène ses choristes à interpréter ce qu'ils chantent, à rendre le texte vivant, à créer des contrastes.

Curieusement, M. Megill a conféré au Duruflé une émotion qui habite rarement cette partition plutôt froide et il a montré dans le Fauré une sorte de retenue, comme s'il craignait d'y tomber dans la sentimentalité. Chez les quatre solistes, tous sortis du choeur, deux mentions : la soprano Miller pour son chant pur et intérieur, le baryton d'Aragon pour son intelligence du texte. Pothier est plus écoutable en mezzo qu'en soprano, mais Kennedy chevrote et détonne.

D'autres voix se firent entendre pendant le concert: celles des tousseurs. On en a rarement entendu autant. Et on dirait qu'ils choisissent toujours les passages les plus doux pour se manifester. Cela devient un véritable fléau. Il fallut que quelqu'un, à un moment donné, lance un «Chut!» retentissant pour que, tout à coup, on cesse de tousser.

CHOEUR DE CHAMBRE DE L'OSM. Dir. Andrew Megill. Solistes: Jana Miller, soprano, Stéphanie Pothier, mezzo-soprano, Marc-Antoine d'Aragon et Clayton Kennedy, barytons. À l'orgue: François Zeitouni. Dimanche après-midi, Maison symphonique, Place des Arts.

Programme: Requiem, pour mezzo-soprano, baryton et choeur, op. 9 (1947) - Duruflé (version avec orgue, de l'auteur)  Requiem, pour soprano, baryton et choeur, op. 48 (1885-1900) - Fauré (version avec orgue, arr. John Rutter)