Réunis pour la première fois au disque, Alain Lefèvre, Kent Nagano et l'Orchestre Symphonique de Montréal reprennent le programme particulièrement ambitieux - quatrième Concerto de Rachmaninov et poème symphonique Prométhée: le Poème du Feu de Scriabine - qu'ils ont présenté deux fois l'an dernier: d'abord en mai, à la salle Wilfrid-Pelletier, puis en septembre, dans la toute nouvelle Maison symphonique, lors d'un concert spécial (les 75 ans de Radio-Canada) enregistré par Analekta. Le disque sort mardi mais les médias l'ont déjà.

Toujours insatisfait de son quatrième et dernier Concerto (sol mineur, op. 40), Rachmaninov en a rédigé trois versions. On joue toujours la dernière, celle de 1941, qui fait environ 25 minutes, et on ignore généralement la deuxième, de 1928. Lefèvre a choisi la toute première, de 1926, qui est un peu plus longue que les deux subséquentes. Jusqu'à présent, le seul enregistrement portant la mention «version originale» était celui d'Alexander Ghindin, chez Ondine, d'une durée de 31 minutes. L'enregistrement de Lefèvre prend plus de

33 minutes, et pour cause: on y entend, à l'orchestre comme au piano, des détails absents chez Ghindin. Lefèvre estime que Ghindin a modifié l'original et il a manifestement raison.

Au surplus, il joue Rachmaninov avec puissance, subtilité et expression tout à la fois et le dialogue avec Nagano et l'OSM est tout aussi convaincant. Le Scriabine, ici sans le «clavier de lumières» qui encombrait le concert, reste une chose énorme et vide, une sorte de démente improvisation où piano et groupes orchestraux se répondent en multipliant les trilles. À un moment donné, des voix émergent de l'infernal tohu-bohu où sombrent les deux harpes et bien d'autres éléments de l'épaisse partition. On peut oublier. Mais il faut retenir le Rachmaninov!

Rachmaninov, Scriabine. Alain Lefèvre, pianiste, orchestre symphonique de Montréal. Dir. Kent Nagano. Analekta, AN 29288

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En magasin mardi.