Julie Boulianne et Tyler Duncan donnaient le concert d'ouverture de saison chez Turp hier après-midi. Un auditoire d'une centaine de personnes les a écoutés séparément dans deux groupes substantiels de Mahler et de Richard Strauss, puis en alternance dans un cinquième groupe de quatre mélodies et finalement dans trois duos de Brahms.

La présence de Julie Boulianne est la meilleure impression qu'a laissée cette longue heure de musique. On est d'abord étonné qu'une personne aussi menue fasse entendre une voix aussi égale en volume et en couleur. Cette voix n'est pas un gros mezzo qui se prend pour un contralto, plutôt une sorte de mezzo léger à l'authentique couleur sombre.

La jeune Québécoise n'a chanté hier que ce qui correspond exactement à sa tessiture. Conséquemment, chaque note est parfaitement à sa place; jamais on ne sent d'effort. Entre de telles mains, on peut s'abandonner à la pure interprétation. Hier, en l'écoutant, j'ai pleuré. Une telle réaction ne me trompe jamais.

Natif de la Colombie-Britannique, M. Duncan projette un baryton ferme et chaleureux au médium et au grave; il possède aussi des dons d'interprète. Malgré un aigu douteux, il se risque dans les notes élevées au lieu de se tourner vers celles que Mahler a prudemment ménagées un peu plus bas. Autre problème: la réverbération de la salle créait une insupportable surcharge dans les passages «fortissimo», que le chanteur lançait automatiquement à pleine force, comme dans un vaisseau de 3000 places.

Créatrice d'atmosphère, la pianiste Erika Switzer (l'épouse du baryton) fit oublier bien des redites et banalités de ce programme pour inconditionnels.

JULIE BOULIANNE, mezzo-soprano, et TYLER DUNCAN, baryton. Au piano: Erika Switzer. Hier après-midi, Conservatoire, Société musicale André-Turp. Radiodiffusion: Radio-Canada, 27 octobre, 20h.