Chambriste au premier concert, accompagnateur au deuxième, Marc-André Hamelin jouait Haydn et Beethoven avec les Violons du Roy vendredi, cette fois devant un parterre bien rempli à Maisonneuve.

Le très haut niveau de jeu que le pianiste a maintenu soir après soir, depuis le début de la série de Pro Musica centrée sur lui, permet de prédire une soirée mémorable pour le plus attendu des quatre événements: son récital de demain comprenant du Haydn, du Chopin, du Godowsky, du jazz à la Weissenberg et... du Hamelin compositeur.

 

Vendredi soir, Hamelin a d'abord joué le Concerto en ré majeur de Haydn. On entend habituellement l'oeuvre au clavecin, soit l'instrument de sa destination première, et Hamelin a tenu compte de ce contexte. Mais il n'a pas cherché à imiter servilement l'ancêtre du piano. Avec sa connaissance infinie du piano moderne, il a adapté les ressources de celui-ci en une poétique évocation du pianoforte.

Détail absent du programme: les cadences étaient de la légendaire claveciniste Wanda Landowska (je tiens la précision du pianiste lui-même). Sous les doigts de Hamelin, la cadence du mouvement lent remplit la salle silencieuse d'une indicible beauté. Des accents vigoureux marquèrent le finale, mais, là encore, toujours dans le contexte d'un instrument plus limité que le piano actuel.

Hamelin apporta ensuite au troisième Concerto de Beethoven la technique irréprochable qui est la sienne, la profondeur d'un grand interprète et - autre illustration de sa science pianistique - une façon nouvelle de colorer certaines phrases. Cadences de Beethoven cette fois. La petite qui termine le mouvement lent, et marquée «sempre con gran espressione», constitua un autre moment de grâce où chaque note était pensée et sentie.

Ovationné et visiblement heureux, le pianiste ajouta en rappel la Fantaisie en do majeur de Haydn, s'attardant avec humour aux mystérieux silences qui y interrompent le discours.

Labadie et son orchestre augmenté à quelque 40 musiciens dialoguèrent avec lui sur un pied d'égalité. Ils donnèrent aussi un Coriolan on ne peut plus beethovénien et tumultueux et ouvrirent le concert avec une lecture renouvelée de la Symphonie no 104 de Haydn. Violons de part et d'autre du podium, exécution de toutes les reprises sans exception, tempi toujours très justes: tout est là, et davantage. Labadie maintient le vibrato à un degré restreint, à la différence que, cette fois, il évite la sécheresse baroque et livre un Haydn que je qualifierais de chaleureux.

LES VIOLONS DU ROY.

Chef d'orchestre: Bernard Labadie. Soliste: Marc-André Hamelin, pianiste. Vendredi soir, salle Maisonneuve de la Place des Arts. Présentation: Société Pro Musica. Radiodioffusion: Radio-Canada, 19 mars, 20h.

Programme:

Symphonie nº 104, en ré majeur, Hob. I: 104 (1795) - Haydn Concerto pour piano et orchestre en ré majeur, Hob. XVIII: 11 (1784) - Haydn Ouverture Coriolan, op. 62 (1807) - Beethoven Concerto pour piano et orchestre nº 3, en do mineur, op. 37 (1800-03) - Beethoven