Les titres de Rub ne font pas dans la dentelle: Vaginoplasty, Dick in the Air, Pickles, Dumb Fuck... À trois semaines de ses 47 ans, la performeuse canadienne Peaches ne s'est vraiment pas calmé le pompon!

Tous les pitons collés, toutes les pédales dans le tapis. Provocation, irrévérence, porno mise en rap, frotti-frotta mis en rimes, «so much beauty comin' out of my ass»... Les organes sexuels se confondent, les filles sont des garçons, les rapports intimes peuvent devenir d'étranges jeux de rôles.

Nous revoilà plongés dans cet univers sonore d'une facture jadis nommée électroclash, et qui se transforme en un séditieux vaudeville devant public.

Au bout du fil, pourtant, la voix de Merrill Beth Nisker est douce, légèrement enrouée, conviviale. Jointe quelques jours avant son escale montréalaise dans le cadre du Rub Tour, demain à la SAT, notre interviewée répond courtoisement à toutes les questions, ne se fait prier pour rien.

On lui demande d'abord de revenir sur le long intervalle qui sépare la sortie de ses deux derniers albums studio - I Feel Cream, lancé en 2009, et Rub, sorti officiellement le 25 septembre dernier.

«J'ai choisi de faire autre chose que des albums. Entre autres activités, j'ai produit récemment un groupe de musiciennes thaïlandaises; mon opéra électro-rock Peaches Does Herself est devenu un film, présenté dans plusieurs festivals; j'ai mis six mois à apprendre à chanter en italien pour la relecture de l'opéra L'Orfeo de Monteverdi, présenté à Berlin. J'ai aussi voyagé avec la production Peaches Christ Superstar, ma version solo de l'opéra rock d'Andrew Lloyd Webber. J'ai été très occupée!»

Au terme de ce cycle d'intenses activités, Peaches est retournée en studio afin d'y réaliser Rub, de concert avec Vice Cooler.

«Je le connais depuis qu'il a 15 ans; il était alors dans un groupe noise d'Alabama. Il a ensuite été invité à tourner en première partie de groupes importants, tels Deerhoof, Fugazi ou Sonic Youth... D'après moi, il est devenu un grand performeur, et c'est pourquoi j'ai souvent travaillé avec lui.»

«Lorsque je me suis mise au travail pour créer les chansons de Rub, j'ai rapidement trouvé mes beats valables, voire bons, mais il me fallait les améliorer avec un autre artiste.»

«Je ne voulais pas de réalisateur mais plutôt un égal, un ami qui me connaît bien, poursuit l'artiste. Dix heures par jour, nous avons discuté musique et avons travaillé d'arrache-pied dans le garage de ma maison à Los Angeles, mon deuxième chez-moi où se trouve mon studio. À Berlin, où je vis également, il y a trop de distractions pour que je puisse me concentrer sur la réalisation d'un album.»

Impact majeur

Rub, fait-on observer à sa conceptrice, creuse le même sillon que ses opus précédents. Peaches corrobore: 

«Depuis The Teaches of Peaches (2000) et Fatherfucker (2003), j'ai toujours misé sur une énergie maximale avec une instrumentation minimale. Avec l'album Impeach My Bush (2006), j'ai travaillé avec des musiciens et réalisateurs qui ont respecté cet esprit [Mickey Petralia et Greg Kurstin]. Encore aujourd'hui, je cherche à mettre ces sons électroniques au service d'un impact majeur: force, méchanceté, dureté, mais aussi chaleur d'expression et spontanéité. C'est pourquoi je commence à écrire seulement lorsque j'entre en studio. Je veux ainsi exprimer ce qui me préoccupe au moment présent, dans ma vie personnelle et dans le monde qui m'entoure.»

Voici donc Rub, cinquième album studio signé Peaches et d'un style qu'on pourrait qualifier d'électro-rap hardcore. On y remarque en outre la participation de trois invités de marque sur trois chansons différentes: Kim Gordon, célébrissime bassiste de Sonic Youth, sa nièce Simonne Jones et Feist, amie et collaboratrice de longue date qui se passe de présentation.

Pour le Rub Tour, Peaches s'amène à Montréal seule avec une paire de danseurs et son attirail électronique. On ne va pas s'ennuyer, assure la principale intéressée.

«Tout spectacle de Peaches est très visuel: il y a de la lumière, des costumes, de la comédie.»

Burlesque hardcore, somme toute.

Rub en trois collaborations

Kim Gordon

Close Up

 «Kim Gordon passe beaucoup de temps à Los Angeles; elle travaille actuellement sur un livre et sur un projet en arts plastiques. Je l'ai invitée à mon garage, elle a accepté que je lui présente mon travail. Je ne savais pas si elle trouverait son compte, mais elle a eu tôt fait de trouver une accroche de choix dans ma chanson. C'était vraiment super de la voir travailler.»

Simonne Jones

Vaginoplasty

«Simonne Jones est une artiste extrêmement talentueuse. Je veux la mettre de l'avant autant que je le peux. Nous avions une occasion de le faire, alors j'en suis très heureuse.»

Feist

Mean Something

«Je cherchais le moment idéal pour Feist dans une de mes nouvelles chansons. J'avais déjà un refrain conçu à sa mesure, puis elle a contribué à trouver une accroche intéressante. Nous avions eu une bonne discussion préparatoire ensemble et son travail s'avère magnifique.»

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À la SAT demain, 20 h. Première partie: Deap Vally.