Depuis 15 ans, Julie Crochetière navigue entre deux langues et deux provinces. Francophone de souche née à Montréal, elle vit à Toronto et chante en anglais. Peu connue chez nous même après avoir vendu 400 000 disques, elle est de passage au Québec pour une tournée avec les chansons de Counting Dreams, son dernier album.

Comme bien des enfants, la petite Julie a commencé le piano classique à 6 ans sans savoir que cela la mènerait à une carrière.

«Rapidement, j'ai voulu apprendre les chansons que j'entendais à la radio, mais mes professeurs de piano refusaient de me les enseigner! On me disait qu'il fallait d'abord apprendre la base en lisant les notes sur une portée. Je suis allée acheter moi-même des partitions de musique populaire et je voyais des accords au-dessus des portées, mais on me disait que ça, c'était pour la guitare! C'est seulement au cégep, en musique, que j'ai appris comment les chansons étaient formées avec des accords. Ce fut comme une illumination. J'aurais bien aimé savoir cela quand j'avais 10 ans.»

À 14 ans, elle écrivait sa première chanson, simplement pour s'exprimer. À 17 ans, elle donnait des spectacles de chansons populaires à succès pour des entreprises avec un groupe nommé 1945.

Après un an, elle a voulu essayer autre chose, et elle a chanté du country au Casino de Montréal pendant trois mois.

«J'ai grandi en écoutant beaucoup de musique des années 60 et 70 que mes parents faisaient jouer. Beaucoup de soul, de funk: James Brown, Aretha Franklin. J'avais besoin d'avoir du groove et le son qui est dans la langue anglaise, mais aussi d'avoir un beau texte comme dans la chanson française. L'anglais et le français se tiraillaient déjà dans mon coeur.»

À 19 ans, elle remportait les honneurs à l'émission Popstars, sans doute l'une des premières téléréalités au Canada.

«Ça voulait dire que je devais déménager à Toronto, parce que le concept de l'émission était de former un groupe de musique chapeauté par Universal. Ils avaient peut-être auditionné 4000 filles et nous étions 5 dans le groupe final, qui s'appelait Sugar Jones. On a fait une grosse tournée en première partie de Destiny's Child et eu un album certifié platine. Ç'a été une énorme chance d'apprendre comment fonctionnait l'industrie de la musique.»

Assise entre deux chaises

Après cette gloire instantanée, elle s'est retrouvée seule dans son petit appartement torontois et les années qui ont suivi n'ont pas toujours été faciles. Elle est déjà passée à un cheveu de vendre son piano pour payer ses factures. Mais elle s'est accrochée.

Quinze ans plus tard, elle fait encore de la musique et vit toujours à Toronto, avec son conjoint et leur bébé Samuel.

«Quand je suis à Montréal, j'ai l'impression de revenir chez nous, mais quand je retourne à Toronto, j'ai la même impression. C'est vraiment ça, ma vie. Je viens de Montréal, mais je vis depuis 15 ans dans un environnement anglophone. Je suis toujours assise entre deux chaises. D'un côté, cela fait mon affaire, mais de l'autre, il y a des moments où je cherche ma place.»

Son premier disque solo a été lancé en 2003. Son quatrième, Counting Dreams, a vu le jour cette année. Il comporte neuf compositions originales et deux reprises, For All We Know et On va s'aimer encore.

«Pour moi, ce sont des chansons d'auteur-compositeur pures et simples, dans un style que je considère comme intemporel. C'est l'album que je rêvais de faire depuis 10 ans, avec mes idées. Il y a une histoire derrière Counting Dreams. Depuis deux ans, j'ai décidé de réaliser de vieux rêves et de faire des choses que je n'avais pas osé faire avant, comme d'avoir un bébé au beau milieu d'une carrière ou de rénover une vieille maison d'un bout à l'autre. Ça m'a libérée et donné confiance en moi, le goût d'écrire des chansons et la force de faire cet album-là.»

Le 23 octobre au Lion d'or avec l'Orchestre à cordes des jeunes de Laval.