Ni Vijay Iyer ni Craig Taborn n'ont reçu une formation scolaire «normale» en musique, ce qui est de plus en plus rare à notre époque où le «désapprentissage» et la liberté conceptuelle sont moins valorisés dans le jazz.

Ces pianistes américains ne sont certes pas autodidactes, mais ils ont tous deux pris des détours qui auraient pu les contraindre techniquement dans leur expression. Il n'en est rien... ou si peu.

De fait, ces détours non scolaires ont été payants pour ces musiciens ayant mis au point des langages inédits au clavier. Ce qui n'enlève rien, remarquez, à l'incontestable virtuosité de leur langage propre ni à leurs capacités extraordinaires en tant qu'improvisateurs, compositeurs et interprètes ayant intégré et transcendé le vocabulaire du jazz contemporain.

Ils sont ici réunis dans une série d'oeuvres communes (dont les trois dernières dédiées aux regrettés visionnaires Muhal Richard Abrams, Cecil Taylor et Geri Allen), oeuvres enregistrées devant public à l'Académie Franz Liszt de Budapest (mars 2018).

Les discours s'entrelacent, s'entrelardent, s'unissent, fusion de langages contemporains à la fois connus et distincts. Ainsi, on assiste virtuellement à une rencontre parfaitement réussie entre deux jazzmen parmi les plus marquants de l'époque actuelle.

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Jazz contemporain. The Transitory Poems. Vijay Iyer & Craig Taborn. ECM.