De Henri Duparc, on possède 16 mélodies pour voix et piano les plus connues: Chanson triste, L'invitation au voyage, La vie antérieure, Le manoir de Rosemonde, Lamento, Soupir, Phidylé et un duo, La fuite. Tout cela sur des poèmes de Baudelaire, Théophile Gautier, Sully-Prudhomme et autres.

Plusieurs chanteurs, des chanteuses aussi, ont enregistré des «intégrales» Duparc qui n'en sont pas vraiment, omettant le duo (pour des raisons pratiques) et les trois premières mélodies, Sérénade, Romance de Mignon et Le galop (toutes trois de 1868), désavouées par Duparc.

 

Des 13 mélodies reconnues par lui, les «intégrales» de Charles Panzéra (la toute première, datant des années 30) et de Gérard Souzay (trois différentes, pour autant de marques) omettent Au pays où se fait la guerre, dont le texte appelle nettement une voix de femme («Mon bel ami s'en est allé... et moi, toute seule en ma tour...»), ce qui réduit leurs enregistrements à 12 mélodies, alors que les versions de Hélène Bouvier et de Jane Rhodes contiennent la mélodie en question.

Ce problème de «genre» ne se pose pas ailleurs, où les vagues allusions à «mon bien-aimé» et «ma bien-aimée» ne gênent pas, que la pièce soit chantée par un homme ou par une femme. Dans certains enregistrements à voix masculine, on a réglé la question d'Au pays où se fait la guerre en confiant la pièce à une chanteuse. C'est le cas des versions de Bernard Kruysen, Jacques Herbillon et Bruno Laplante, alors que Léopold Simoneau, dans sa quasi-intégrale de 1955, s'était risqué à chanter lui-même la pièce «féminine».

On le voit, la discographie des mélodies de Duparc est assez complexe. François Le Roux a signé en 1987 la première intégrale Duparc vraiment complète: il rétablit les trois mélodies de 1868, confie Au pays... à Danielle Borst et fait le duo avec elle. Mais, alors que tous les enregistrements mentionnés sont bons ou même très bons, celui de Le Roux, avec son crooning, est le plus mauvais.

Une autre version tout aussi complète a paru en 1999, partagée entre Gerald Finley (neuf mélodies) et Catherine Robbin (sept mélodies). Les deux Canadiens chantent le duo, mais Au pays... se révèle trop haut pour la mezzo Robbin.

Dernière parution: Michèle Losier, mezzo canadienne elle aussi, avec Daniel Blumenthal au piano. Tout est là, sauf le duo. Donc, 16 mélodies. Le timbre est beau, la voix est égale sur toute la tessiture, la diction est plutôt bonne, sinon parfaite. Mais le vrai style français n'y est pas. La première version de Souzay, celle de Bouvier: voilà le grand Duparc. Autres défauts de la nouvelle version: un piano trop présent par rapport à la voix et une réverbération qui brouille les traits.

DUPARC: 16 MÉLODIES

MICHÈLE LOSIER, MEZZO-SOPRANO. AU PIANO: DANIEL BLUMENTHAL.

FUGA LIBERA, FUG552

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