Pendant la pandémie, Sara Dufour a vécu un petit miracle : son album sorti en avril 2019 a littéralement « pris en feu ». « Il a redécollé en 2021 comme s’il venait de sortir. C’est vraiment capoté », dit l’autrice-compositrice-interprète qui lance vendredi On va-tu prendre une marche ?, nouvel album à l’énergie brute dans lequel elle raconte autant son amour pour sa mère que son retour en région.

Les spectacles qui se sont multipliés au Québec, les scènes de plus en plus grosses, les premières parties pour les Cowboys Fringants, la France, les hits radio, les plateaux de télé… Sara Dufour profite de chaque instant de cette grande récolte inattendue, pour laquelle elle a semé « tout le temps un petit peu » depuis sa sortie de l’École nationale de la chanson de Granby il y a 11 ans.

Je me sens privilégiée. C’est comme si on m’avait prise et qu’on m’avait dit : “Regarde, c’est à ton tour”.

Sara Dufour

La chanteuse de 39 ans aime aussi raconter s’être accrochée à une prédiction que sa mère lui avait faite avant sa mort, le 30 mars 2021. « Elle m’a dit : “Sara, quand je pense à ta carrière, je vois une grosse vague qui s’en vient”. Je lui ai répondu : “Maman, check-moi bien faire du surf”. »

Se rechoisir

On va-tu prendre une marche ? est un album-bilan des dernières années, qu’elle estime « plus mature et plus posé vocalement ». Elle y raconte le chemin parcouru et les remises en question, et beaucoup comment elle s’est « rechoisie » en retournant vivre en région.

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« Ça faisait 17 ans que je laissais traîner du stock un peu partout à la grandeur du Québec. » Cette quête l’a animée profondément ces dernières années, et s’est conclue par l’achat d’une maison dans la forêt aux alentours de Dolbeau-Mistassini, d’où elle vient.

Cela a donné des chansons comme J’m’en va dans l’bois ou l’amusante Maison frette – ladite maison était en fait un chalet trois saisons où elle a gelé beaucoup l’hiver dernier. « Je me couchais avec ma couverte chauffante, le bas de mon lit était gelé, tout blanc, j’aurais pu passer un scraper ! »

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Sara Dufour

En entrevue, la colorée fille du Lac se promène d’anecdotes en digressions qu’il est impossible de toutes raconter ici. Mais on vous rassure : elle a fait isoler sa maison, qui est dotée maintenant d’un poêle à bois.

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Si elle sait que sa carrière ne lui permet pas d’être là-bas à temps plein, des décisions ont découlé de ce retour en région, comme celle d’enregistrer l’album à Dolbeau-Mistassini. « On y a fait aussi le shooting photo. Je ne pouvais pas faire les affaires à moitié. Il fallait que les bottines suivent les babines. »

Les musiciens sont montés au Lac deux fois pour des séances d’enregistrement, mais elle ne leur avait rien envoyé d’avance. « Je ne voulais pas qu’ils se pratiquent, qu’ils trouvent une belle ligne. Je voulais le gros frame de base, l’instinctif, le fun. »

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Dany Placard, son « âme sœur des mots », a de nouveau été son complice à l’écriture et à la réalisation. Ce qu’il lui amène ? « Une simplicité. » Le résultat est très roots, très direct – « On a mis les amplis à broil, pas d’effet, let’s go on roule ! » –, très à la manière country-rock un peu punk de Sara Dufour, quoi.

Mais il y a aussi des chansons douces, comme Ma mère, bouleversant hommage à sa maman disparue.

Mes tounes parlent pas juste de skidoo ! J’ai des chansons qui peuvent faire réfléchir aussi.

Sara Dufour

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Historique

Parmi les choses incroyables qui sont arrivées à Sara Dufour, il y a eu bien sûr les premières parties pour les Cowboys Fringants. Une relation qui s’est développée graduellement depuis 2018, qui l’a menée jusqu’au Centre Bell en novembre 2021, puis au concert mémorable des plaines d’Abraham lors du Festival d’été de Québec cette année.

« J’ai tout noté dans mon cell pour ne jamais oublier les détails de ces deux journées. » Elle se souvient de l’annulation crève-cœur du 13 juillet pour cause d’orage, du tourbillon médiatique suivant l’annonce que les spectacles étaient reportés au 17, de son état d’esprit le soir fatidique. « Je me sentais prête. Je m’en allais en mission, j’étais excitée et calme à la fois. »

Environ 60 000 personnes étaient déjà sur le site lorsqu’elle est montée sur scène, mais elle préfère raconter comment Robert Charlebois, qui chantait après elle, lui a dit qu’elle l’avait impressionné. « Eille, Charlebois, un monument historique ! » À la fin du spectacle des Cowboys, elle est allée les rejoindre pour chanter Marine marchande, puis est restée pendant Les étoiles filantes.

Si quelqu’un était là et n’a pas pleuré ce soir-là… C’est le plus grand moment de ma carrière, avec la plus grosse foule. Des fois, je me dis mais qu’est-ce qui va détrôner ça ? S’il n’y a rien, c’est ben correct, parce que je fais partie de cette journée historique de la musique au Québec.

Sara Dufour

Pour la suite, Sara Dufour souhaite humblement rester en bonne santé et garder son énergie, « deux affaires fondamentales » pour continuer à faire ce métier. Et elle espère que son album aura une portée plus large, qu’on y verra la profondeur et pas juste le côté party.

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« Je suis beaucoup associée à l’aspect festif et dynamique. C’est vrai que j’aime ça, je mords, je suis comme un cheval qui attend de courir. Mais il porte aussi une vulnérabilité, il est plus doux et plus tendre. J’espère que ce sera perçu. »

On va-tu prendre une marche ?

Country-rock

On va-tu prendre une marche ?

Sara Dufour

Coyote Records