Le mois de mai n’est pas que le mois de Marie, c’est aussi celui du coup d’envoi de la saison des festivals. Métro Métro, Santa Teresa, Pouzza Fest et le Piknic Électronik lanceront le bal. Sans restrictions. Coup d’œil sur ce qui vous attend.

Métro Métro

PHOTO MARIA ALEJANDRA CARDONA, ARCHIVES REUTERS

Lil Baby lors du festival Coachella, en Californie, en avril dernier

Le festival en bref

Trois journées consacrées au hip-hop, du 20 au 22 mai. Des artistes québécois et internationaux, en commençant par les têtes d’affiche Lil Baby, Playboi Carti, ainsi que Trippie Redd et Tory Lanez, qui remplaceront le rappeur Young Thug, arrêté au début du mois par le FBI. On comptera aussi sur la présence de Loud, A Boogie with Da Hoodie, Dababy, Naya Ali, Koriass, Nate Husser, Don Toliver et de nombreux autres. Un cadre idéal, sur l’esplanade du Stade olympique. « Le hip-hop permet d’avoir des artistes old school qui rejoignent aussi les jeunes, affirme Olivier Primeau, organisateur de l’évènement. Et c’était aussi important pour nous d’avoir de grosses têtes d’affiche québécoises, comme Koriass ou FouKi. » La deuxième édition du festival Métro Métro (annulé en 2020 et en 2021) devrait ravir les amateurs de rap.

À quoi s’attendre

L’ambiance est électrisante à Métro Métro. Les scènes accueillent des artistes hip-hop qui n’avaient pas vraiment de point d’atterrissage pendant la saison des festivals à Montréal. Il y a bien des soirées rap dans plusieurs festivals québécois, mais Métro Métro lui donne toute la place. Et parlant de place, l’esplanade du Stade olympique permet à l’évènement de s’étendre sur un large terrain, avec plusieurs scènes aux ambiances différentes et de l’espace pour déambuler. « On n’a même pas besoin d’investir pour le décor, l’esplanade fait vivre la vibe de la ville, c’est comme une immersion au centre de Montréal », lance Olivier Primeau. Le décor en béton convient aux prétentions urbaines du festival. Cette année, des artistes locaux réaliseront des graffitis sur le site, a dévoilé l’organisateur.

Le retour des activités

Métro Métro n’a existé qu’une seule fois, en 2019, lors de son lancement. La pandémie s’en est mêlée et les deux dernières éditions n’ont pas eu lieu. Pour ce retour très attendu, les organisateurs n’ont peut-être pas égalé la programmation de l’année d’inauguration, mais frappent tout de même un bon coup pour l’ensemble de son programme, qui inclut plusieurs têtes d’affiche. « On avait un énorme line-up, dit Olivier Primeau. On avait plein d’artistes qui ont annulé leur présence à cause d’Omicron, dont deux headliners, une femme et un énorme old school, qu’on va essayer d’avoir l’année prochaine. » La nouvelle programmation a dû être imaginée en 25 jours. Pour Olivier Primeau, c’est mission accomplie. « On a dû se revirer de bord, mais on a dépassé les ventes de l’année de Cardi B [2019]. Il va y avoir du monde à la messe. »

Santa Teresa

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Hubert Lenoir est l’une des têtes d’affiche attendues à Santa Teresa.

Le festival en bref

« L’identité du festival, c’est que ça part dans tous les sens. C’est ça, notre richesse », résume fièrement Patrick Kearney, directeur général de l’évènement « de retour dans une banlieue près de chez vous ». Du 19 au 22 mai, sur des scènes extérieures, dans des bars ou dans la somptueuse enceinte d’une église, Sainte-Thérèse accueille les spectacles gratuits ou payants de jeunes héros de la musique québécoise (Hubert Lenoir, Cœur de pirate, Safia Nolin), d’une des formations phares de la troisième vague emo (Jimmy Eat World), de la souveraine new-yorkaise du rap coloré (Princess Nokia) et du pianiste Sofiane Pamart (sa première visite au pays de Jean-Michel Blais). Ajoutez, pour faire bonne mesure, quelques vénérables vétérans (Martha Wainwright, Pierre Lapointe, Jesuslesfilles), ainsi qu’une flopée d’artistes dits émergents (Virginie B, Douance, N Nao) et beaucoup de hip-hop (Skiifall, Tizzo, Calamine).

À quoi s’attendre

L’ambiance dans le Vieux Sainte-Thérèse, ou au « village », comme on dit sur place, rappelle un peu celle d’une petite ville universitaire qui grouillerait pendant quelques jours de la présence de souriants visiteurs. « Ce qu’on aime, dit Patrick Kearney, c’est qu’il y ait des gens qui sortent du spectacle de Pierre Lapointe à l’église, qu’ils croisent une gang de vingtenaires qui sort d’un autre spectacle et qu’ils aillent tous ensemble veiller dans un bar, découvrir des artistes en fin de soirée. » Pour le programmateur, ces rencontres entre jeunes et moins jeunes, entre fervents mélomanes et néophytes, entre banlieusards et citadins sont la marque distinctive de son saint évènement. « Il y a dans notre public un bel amalgame de locaux, qui n’ont aucune idée c’est qui, Thierry Larose, et de gens de Montréal, qui arrivent chez nous et qui s’étonnent qu’on ait autant de bars et de restaurants. »

Le retour des activités

Après avoir dû torpiller comme tout le monde son édition 2020, Santa Teresa a présenté en 2021 une programmation réduite, en pleine zone rouge et en plein couvre-feu. « C’était une édition magique. J’avais juste à lancer la phrase “Bienvenue dans un festival” et j’avais une ovation », se rappelle Patrick Kearney. S’il a forcément dû aiguiser sa « tolérance à l’ambiguïté » en élaborant cette nouvelle programmation, alors qu’il ignorait sous l’égide de quelles mesures sanitaires elle prendrait vie, le directeur général n’aura dû faire qu’assez peu de deuils d’artistes. Il espère cependant pouvoir accueillir plus de musiciens européens l’an prochain, une fois que la pandémie ne sera qu’un mauvais souvenir (doigts croisés). « Il faudra aussi cet été qu’en tant que festivaliers, on soit compréhensifs et qu’on ne tire pas de roches aux organisateurs. Des annulations à cause de la COVID, on n’en souhaite pas, mais il va encore y en avoir. »

Le Piknic Électronik

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Kaytranada sera au parc Jean-Drapeau jeudi et vendredi.

Le festival en bref

On le tient peut-être aujourd’hui trop pour acquis, mais le Piknic Électronik fait rayonner Montréal à l’étranger depuis près de 20 ans et il a fait des petits à Melbourne, Paris, Miami et Santiago. Pendant la belle saison, au parc Jean-Drapeau, sous la brise du fleuve Saint-Laurent, le Piknic est le rendez-vous dominical par excellence des amateurs de musique électronique ou des gens qui aiment tout simplement danser en plein air. Avec des billets à 20 $, c’est un évènement accessible, qui se prête à la spontanéité, ajoute le programmateur Lucas Jacques. Avec le succès de Kaytranada à l’étranger et celui de CRi, qui a remporté le prix de la Révélation de l’année à l’ADISQ, la musique électronique est mieux comprise et moins marginalisée, se réjouit le vice-président musique, programmation et concerts de Multicolore, l’agence qui produit le Piknic et Igloofest. La tenue du projet-pilote d’une soirée sans dernier service d’alcool ce samedi à la SAT en marge du Sommet de la nuit va aussi en ce sens.

À quoi s’attendre

En plus des rendez-vous du dimanche, de nombreux évènements Off Piknic auront lieu pendant tout l’été. Une façon de présenter des artistes de renom, qui devaient se produire notamment à l’automne au dernier Igloofest, dont Diplo, Maceo Plex, Claptone, Fatboy Slim, Bonobo, sans compter celui du Montréalais étoilé Kaytranada qui se produira jeudi et vendredi soir sur le site de la plaine des Jeux du parc Jean-Drapeau. « Ce sera l’ouverture de notre saison en grand. Il a gagné des Grammy, un Juno, c’est un gros symbole d’avoir Kaytranada. On s’attend à avoir 15 000 personnes. C’est rare pour un artiste québécois », souligne Lucas Jacques. Avec le jour férié lundi, il y aura exceptionnellement deux jours de festivités dimanche et lundi. Dimanche, la French touch sera à l’honneur avec Breakbot & Irfane, qui seront accompagnés du Français Darius et du duo montréalais Voyage Funktastique. Sur l’autre scène, se succéderont Sugarface Belfo et le Montréalais Poirier, qui mixera en B2B avec KYOU. Lundi, la Montréalaise Sierra et la Française Salomé Le Chat sont à l’affiche avec Victor Rodriguez et Hernan Cattaneo.

Le retour des activités

L’an dernier, le Piknic a eu une saison écourtée et une capacité réduite. « C’était extrêmement difficile, souligne Lucas Jacques. On fait de la dance music. L’ADN est la célébration en communauté. » Heureusement, on revient à pleins gaz cette année avec 18 dimanches de musique jusqu’au 2 octobre. Soulignons que la programmation est paritaire. « Ce n’est pas la première fois et c’est très important pour nous », fait valoir Lucas Jacques. Soulignons aussi la venue le 29 mai des légendes du house de Detroit Octave One, qui succéderont aux Montréalaises CMD et Claire. Le 2 juillet, il y aura une collaboration avec Boiler Room pour la visite d’Armand Van Helden. Sinon, Lucas Jacques attire notre attention sur l’énergique Torontoise Chippy Nonstop (aussi le 2 juillet) ainsi que sur la star montante polonaise VTSS (2 octobre) et la Montréalaise TDJ, qui se produit le même jour que le Lavallois High Klassified (26 juin). Il invite surtout les gens à parcourir la programmation de fond en comble parmi les 200 artistes attendus au Piknic jusqu’au 2 octobre. « Il y a beaucoup de diversité et de profondeur dans la musique électronique et c’est ce qu’on veut faire rayonner », fait valoir le programmateur.

Pouzza Fest

PHOTO FOURNIE PAR LE FESTIVAL

Le groupe de Winnipeg Propagandhi

Le festival en bref

Évènement phare de la scène punk montréalaise, qui accueille pendant trois jours ses amis de partout au Canada et aux États-Unis, l’édition 2022 du Pouzza Fest marque officiellement la résurrection de tous ces petits lieux dans lesquels il vaut mieux s’aventurer avec des bouchons bien enfoncés dans les oreilles. Du 20 au 22 mai, quatre salles du centre-ville — les Foufounes électriques, Turbo Haüs, le Théâtre Sainte-Catherine et le Café Cléopâtre — présentent des alignements réunissant parfois jusqu’à dix groupes punks ou ska différents, de la fin de l’après-midi jusqu’à la fermeture. Parmi ceux-ci : certaines figures majeures des musiques qui arrachent la tapisserie, dont Propagandhi, Good Riddance, Cancer Bats et Cloud Nothings, ainsi que des formations locales, comme les chantres du chandail noir Thick Glasses ou les démons normaux d’Oktoplut.

À quoi s’attendre

« Pour moi, le Pouzza, c’est vraiment un festival de découvertes », plaide un des responsables de sa programmation, le chanteur et membre de Lost Love, Guilhem Benard. Il espère qu’en venant trinquer au son des hymnes de l’artiste fétiche de leur adolescence, les fêtards tombent amoureux de leur nouveau groupe préféré. L’évènement demeure aussi fidèle à son désir de mettre en lumière de la musique créée par des femmes, des personnes non binaires et des représentants de la communauté LGBTQ+ (dont Margaret Tracteur, Dilly Dally, Bad Cop/Bad Cop et Teenage Halloween). « Au début, c’était comme une mission, il fallait faire un petit effort, se souvient Guilhem, mais depuis quelques années, c’est très, très facile de trouver des bands de femmes. Quand je vois des festivals qui programment juste des hommes, je me dis toujours : “Voyons, on dirait que ça ne leur tente juste pas.” »

Le retour des activités

Deux ans après le début de la pause obligée, le Pouzza Fest aura eu la chance de pouvoir remettre à l’affiche plusieurs des gros canons qu’il avait promis à ses habitués en 2020. Ses organisateurs ont cependant préféré renoncer à leur scène extérieure sur la place des Festivals, de peur que le grand public ne soit pas au rendez-vous, ce site étant essentiellement financé par les ventes de bières. Afin de participer à ces trois jours de salvatrice distorsion, il faudra donc se procurer un laissez-passer à 150 $ ou un billet journalier à 60 $. Guilhem Benard est surtout heureux que ce congrès pour keupons puisse renaître sans distanciation ni plexiglas, un tue-l’amour dans un contexte punk. « On avait songé à tenir une édition en septembre 2021, mais en visitant les Foufs pour voir comment ça se passait en mode COVID, on avait conclu qu’on ne pouvait pas faire ça, que ça n’allait pas être le fun pour personne. » Et le fun, on le sait, c’est essentiel.