C’était au tour de l’Orchestre Métropolitain d’effectuer son retour en salle vendredi après l’Orchestre symphonique de Montréal, Les Idées heureuses et I Musici. Une soirée inégale, mais qui valait à coup sûr le déplacement.

Le concert était en grande partie consacré à la musique d’ici, avec le Concerto de Québec d’André Mathieu et Promenade d’Isabelle Panneton. Il y a peu à dire de cette dernière œuvre, qui constitue la première commande faite par Yannick Nézet-Séguin après qu’il est devenu chef du Métropolitain, il y a une vingtaine d’années.

Déplacée après le concerto – qu’elle devait au départ précéder –, elle est composée d’enchaînements de longs accords dissonants avec des notes répétées et quelques gazouillis aux bois. Elle nous a plutôt laissé de marbre.

L’œuvre d’André Mathieu est d’un tout autre acabit. Parfois maladroite sur le plan de la composition, elle touche toutefois directement l’auditeur par sa sincérité et sa générosité.

Il est connu qu’Alain Lefèvre a beaucoup fait pour populariser la partition, qu’il a gravée à deux reprises. Il est néanmoins heureux que d’autres interprètes, comme Jean-Philippe Sylvestre (mais aussi Jean-Michel Dubé), mettent aussi la main à la pâte.

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Le pianiste Jean-Philippe Sylvestre

Le soliste invité avouait il y a quelques jours en entrevue s’être beaucoup inspiré de l’enregistrement qu'en a fait le compositeur dans les années 1940. Pour quiconque connaît bien la version de Lefèvre avec l’Orchestre symphonique de Québec, la surprise est cependant de taille. On passe de 27 minutes (Lefèvre) à 21 minutes (Sylvestre).

Il ne s’agit évidemment pas de sacraliser l’enregistrement de Lefèvre, mais il reste que le premier mouvement est marqué « allegro moderato » et non « presto ».

Sylvestre semble vouloir donner à la partie pianistique le caractère d’une improvisation débridée, au détriment de l’opulence sonore, du chant et de la tenue rythmique.

L’enregistrement d’André Mathieu est sans doute un document précieux, mais il est le produit d’un tout jeune homme (avec l’impétuosité que cela implique) et a été réalisé pour un film, avec toutes les contraintes de minutage que cela peut entraîner.

Un chef en contrôle

En rappel, le pianiste a offert l’irrésistible finale de la Sonate n° 7 de Prokofiev avec un tempo un peu prudent, mais un irrésistible déhanché.

Le concert se terminait par la Symphonie n° 4 en la mineur, opus 63, de Sibelius, enregistrée par ATMA dans le cadre de l’intégrale en cours réalisée par Nézet-Séguin et le Métropolitain.

Il ne s’agit pas d’une œuvre « facile » comme celle de Mathieu. Elle est reconnue comme la plus austère du compositeur finlandais, qui l’a écrite à un moment difficile de sa vie. La Quatrième est belle, mais froide comme un bloc de glace. Mais Nézet-Séguin l’a patiemment, amoureusement sculptée sous nos yeux pour lui donner un visage humain.

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Yannick Nézet-Séguin s’est adressé au public vendredi.

C’est un privilège de voir en direct un grand chef graver pour la postérité une œuvre dont il possède une impressionnante maîtrise et une conception bien définie. L’orchestre, qui a dû la travailler deux fois plutôt qu’une en prévision du disque, l’interprète avec une égale assurance. Il fallait être là pour entendre les sonorités de cordes luxuriantes du troisième mouvement. Tout est noblesse, vraie émotion, sans sentimentalisme, sans complaisance.

Le concert était diffusé en direct et sera offert sur le site web de l’orchestre toute la fin de semaine.

Consultez le site de l’Orchestre Métropolitain