Il est né et il vit aux États-Unis, mais il a des racines québécoises et a grandi à Paris. Chris Garneau dévoile vendredi The Kind, un cinquième album où il règle ses comptes avec son défunt père. Ses chansons au piano sauront toucher vos cordes sensibles, comme celles d’un Patrick Watson ou d’un Sufjan Stevens. Entrevue.

Just let me be, chante-t-il sur la pièce-titre de son album The Kind. Il aura fallu cinq disques et la mort de son père pour que Chris Garneau se sente enfin libre d’être qui il est.

Pour l’artiste dont l’enfance a été difficile, ce fut une véritable révélation d’écrire et de composer sans blocage. « Comme si les chansons faisaient juste sortir de moi. » Cette inspiration salvatrice a donné lieu à de superbes pièces au piano.

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On oserait même dire que Chris Garneau crée des frissons musicaux, comme savent le faire Patrick Watson et Sufjan Stevens (et même feu Jeff Buckley).

Francophile

Chris Garneau — dont le grand-père est né au Québec — vit dans la charmante petite ville d’Hudson, dans l’État de New York, à environ cinq heures de route de Montréal. « J’ai quitté Brooklyn pour vivre ici il y a 10 ans. Je suis parti deux ans à Los Angeles, mais je suis revenu dans la vallée de l’Hudson. C’est ici ma maison », dit-il.

Sa deuxième maison ? Paris. Chris Garneau est né à Boston, mais il a grandi dans la Ville Lumière.

PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

Chris Garneau

C’est là [Paris] que j’ai eu une formation en piano classique. Je me sens bien en France. J’aime la vie et la culture.

Chris Garneau

Le premier album de Chris Garneau, Music for Tourists, est par ailleurs sorti de l’autre côté de l’Atlantique avec un label français (Fargo). On l’a comparé alors à Rufus Wainwright. Une influence majeure, confirme-t-il. « Je suis allé le voir en spectacle par moi-même quand j’avais 16 ans. »

« Juste moi au piano »

Chris Garneau a connu beaucoup de succès avec sa reprise de la chanson Between the Bars d’Elliot Smith, sur la bande sonore du film La peau que j’habite de Pedro Almodóvar. The Kind fait suite à trois albums : El Radio (2009), Winter Games (2013) et Yours (2018). C’est un retour à l’approche plus minimaliste et instinctive des débuts de Chris Garneau. « Juste moi au piano. »

The Kind a par ailleurs été enregistré à Hudson avec le réalisateur Patrick Higgins en formule live dans une église transformée en studio (qui a déjà appartenu à Lenny Kravitz). Chris Garneau y règle ses comptes avec son défunt père. Un père qui a commis des gestes traumatisants. « Mon père est mort dans des conditions horribles alors que cela faisait 10 ans que nous ne nous parlions plus, raconte-t-il. Mon père était troublé et il était lui aussi victime d’une masculinité toxique et d’une homophobie intériorisée. »

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Le deuil et la perte sont des thèmes de The Kind, mais surtout la guérison et la libération. La première chanson, Old Code, est une lettre ouverte de Chris Garneau à son père. L’artiste part à la quête de son moi profond.

L’album se poursuit avec Not the Child. Une pièce où Garneau expose le fait que l’enfance est souvent trop romancée puisqu’un enfant n’est pas libre de vivre pleinement ce qu’il est. Le clip, réalisé par Jeremy Jacob, le met en scène à travers des rêves et des souvenirs du passé, de la famille et d’extraits d’une version queer d’Alice au pays des merveilles.

Après la mort de son père, Chris Garneau a « changé le cours de sa propre histoire », dit-il. Mais retrouver la sérénité ne s’est pas fait sans résistance intérieure.

Quand il n’y avait pas de crise dans ma vie, c’est comme si j’étais mal à l’aise.

Chris Garneau

Pour Chris Garneau, ce fut une véritable révélation de créer dans le bien-être plutôt que dans la souffrance. Les mélodies fortes de son album The Kind témoignent de ce lâcher-prise. Les mots et la mélodie de Now On sont nés alors qu’il roulait à vélo, relate-t-il « Au coucher du soleil lors d’une chaude journée d’été. »

« Mes derniers albums n’étaient jamais à 100 % de ce que je pouvais faire. J’avais des blocages. » Après des années de tourmente, Chris Garneau se sent enfin à la bonne place. Surtout que Joe Biden a remplacé Donald Trump à la présidence de son pays. « Ce fut un cauchemar apocalyptique, dit-il. Quand un média comme le New York Times parle de guerre civile, c’est horrifiant. »

Autre nouvelle réjouissante : Chris Garneau donnera un spectacle virtuel dans la salle historique de l’Hudson Opera House le 14 février.

> Pour plus d’informations sur le spectacle virtuel (en anglais)