Dimanche soir, d’Hubert Lenoir
Hubert Lenoir a beau intellectualiser la démarche de Pictura de ipse : musique directe, la valeur d’un album se mesure en grande partie grâce à la règle du plaisir. Mission accomplie dans cet album déjanté, qui regorge de fulgurances comme Octembre, Mtl style libre, Quatre-quarts ou encore Dimanche soir, un morceau pop mâtiné de jazz et de hip-hop. Le jeune artiste a fait appel au « faiseur de sons » High Klassified pour nous ensorceler « du living room jusqu’au living high ». Une pièce savamment écrite, qui plus est.
Feu roulant, de Lary Kidd
Le rappeur Lary Kidd a offert une imposante livraison en 2021 : des collaborations et deux mini-albums, entre autres. Du Poids des livres, album dense qui touche à la fois les tripes et les neurones, nous retenons surtout Feu roulant. Cette enfilade autobiographique, en franglais, est découpée et balancée par un échantillonnage de Piece of Me, de Lady Wray. Avec son collaborateur Ajust, le « Kidd » s’amuse comme un enfant dans une production impeccable qui défonce le quatrième mur.
Anyone Who Loves Me, de Charlotte Cardin
Impossible de rester insensible face à cette ballade au piano qui dissèque les difficultés d’être une femme dans l’espace public. La voix de Charlotte Cardin, emportée par des chœurs, transmet autant de rage que de combativité. « We’re not your fancy dolls / You better set us free, or еlse we’ll fuck you up. » Écrite en compagnie d’Oclair et de Jason Brando, la pièce a joué en boucle dans nos écouteurs, parmi d’autres perles pop de l’album Phoenix.
Les amants de Pompéi, de Thierry Larose
Vrai, le simple est sorti en 2020, mais il est apparu officiellement sur l’album Cantalou en mars de l’année suivante. Sous des vapeurs de fièvre adolescente, Thierry Larose a construit une pièce pop intelligente et hyper efficace, aux arrangements entêtants. On pardonne même les coups de grelots en fin de piste. Il faut aussi faire un détour pour goûter le fruit de la pièce-titre ; sous une peau rock et texturée, la chair est tendre.
Caroline, d’Arlo Parks
C’est d’abord la voix feutrée et délicate qui nous happe à l’écoute d’Arlo Parks, jeune chanteuse néo-soul et poétesse britannique. Or, plus on s’imprègne de son récent disque, Collapsed in Sunbeams, mieux on apprécie cette manière faussement naïve de raconter des histoires ordinaires. Celle de Caroline, par exemple, dont le couple implose en pleine rue Oxford, à Londres, sous le regard des passants. Pour encore plus de groove, direction Too Good, Hurt ou Eugene.
Maladie mentale, de JP « Le Pad » Tremblay
Avec sa plume tendre et colorée, JP « Le Pad » Tremblay, débauché de Québec Redneck Bluegrass Project le temps d’un album solo réalisé par Marc Déry, sait mettre le doigt sur le bobo. Il aborde ici ses « maladies mentales » et leur médication corollaire sur des strates de guitares aux relents westerns. L’album en entier, Rrrik thffu (l’onomatopée d’un crachat), mérite bien davantage d’oreilles tendues.
1977, de Patrice Michaud
Créer une énième chanson d’amour sans offrir un bouquet de clichés ? Une chanson de mariage de surcroît ? C’est le pari — risqué — réussi par Patrice Michaud avec la fort accrocheuse 1977, tirée du magnifique album pop-rock Grand voyage désorganisé. L’année réfère non seulement à l’union de ses parents, mais aussi à celle du lancement de la sonde Voyager 1, avec à son bord le Golden Record, « bouteille à la mer interstellaire » qui a elle aussi sa chanson.
STL Vice, de Connaisseur Ticaso
Malgré la légende qui l’accompagne depuis les années 1990, Connaisseur Ticaso n’avait jamais fait paraître d’album complet. Incongruité résolue avec Normal de l’est, habile collection de récits street rap récompensée d’un Félix. Steve Casimir, de son vrai nom, montre toute l’étendue de sa plume et de son flow sur STL Vice, qui se déploie comme un documentaire sur la vente de cocaïne dans Saint-Léonard. Aux consoles : nul autre que Ruffsound et son comparse Kable Beatz.