Un an et demi après avoir remporté le concours Les Francouvertes, le groupe hip-hop LaF lance son premier album complet, Citadelle, carte de visite explosive, riche et prometteuse.

LaF (prononcez « La F »), c’est la famille. Une bande d’amis musiciens âgés de 23-24 ans qui se connaissent depuis des années, et qui est officiellement formée de trois auteurs-rappeurs et de trois compositeurs-beatmakers.

Bien des choses ont changé pour eux depuis les Francouvertes : ils ont signé un contrat avec LE label hip-hop au Québec, Disques 7ième Ciel, ils ont eu un « boost de professionnalisme » et ont fait une entrée dans « l’industrie de la musique » qui tombe à point – depuis leurs débuts, ils ont tout fait eux-mêmes, ils ont monté leurs albums, réalisé leurs spectacles, assuré leurs relations de presse.

LaF débarque ainsi dans le paysage à un moment où le milieu s’ouvre de plus en plus au rap et à ses différentes déclinaisons, ainsi qu’à la fusion des genres symbolisée par Les Louanges et ses neuf sélections à l’ADISQ. « Il représente bien son époque », croit Thomas Thivierge (Mantisse), qui estime qu’en ce moment, « la musique est juste décomplexée et le public aussi ».

Rap alternatif

Leur victoire aux Francouvertes en 2018, puis celle du groupe O.G.B. cette année, montre aussi l’émergence d’un rap plus métissé que jamais, souvent plus mélodique et musical, qui va puiser dans le soul, la chanson, la pop et plein d’autres choses encore.

« C’est du alt rap, du rap alternatif », lance Thomas quand on lui pose la question – même si, évidemment, aucun d’entre eux n’aime mettre la musique dans une case.

Mais c’est aussi exactement à cet endroit qu’est rendu le hip-hop, précisent-ils, dans le mélange et l’intégration. Leur musique est donc tout à fait dans l’air du temps.

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« Je ne sais pas si l’industrie au Québec est rendue là, mais ceux qui l’écoutent et qui la produisent, oui », dit Justin Boislair (Bkay). Avec Julien Bergeron (BLVDR), il énumère tout ce qu’on peut trouver dans le « son LaF » : des bouts plus musicaux, de l’expérimentation, des hooks, des back vocals, du jazz, de la house… Mais « la colle » qui unit le tout, ce sont les textes, précise Thomas. « On reconnaît la facture LaF à travers les voix et les intentions textuelles. »

On n’est pas dans un rap de rue ici et, même si les chansons restent souvent autoréférentielles, que les tournures sont résolument contemporaines et qu’on note la présence d’une forme de franglais et d’habitudes langagières propres à ces années-ci, l’écriture de LaF est riche, variée et pas du tout banale.

« Moi, je suis plus du côté instrumental, je découvre leurs textes au fur et à mesure et je vois la profondeur », dit Julien.

C’est qu’ils puisent dans plein de choses, la littérature, la poésie, la chanson – « Si le rap est notre médium, ce qui nous inspire est souvent out of rap », dit Justin – et font mentir ceux qui prétendent que les jeunes n’écoutent plus de musique en français.

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On écoute tout ce qui se fait au Québec. J’écoute plus de musique queb que quoi que ce soit d’autre. Et je suis fier de notre génération d’auteurs-compositeurs qui prend toutes sortes d’avenues.

Julien Bergeron (BLVDR)

Le rap sauvera-t-il la chanson francophone ? « Peut-être ! répond Thomas. Mais ce n’est pas juste le rap. Il y a tellement de bons projets francos dans notre tranche d’âge ; on s’en est rendu compte aux Francouvertes. »

Continuer

Avec une tournée bien chargée cet automne, LaF a l’intention de transporter partout au Québec son rap empreint d’une certaine douceur. « On est proches des émotions qu’on vit, alors oui, il y a de la mélancolie. Mais on peut être aussi joyeux, énergiques ou dansants », souligne Thibault de Castelbajac (Jah Maaz). « Ils sont sans filtre, ils ne s’inventent pas de personnages », ajoute Julien.

Ce qu’ils espèrent des années à venir ? Alors que pour la première fois, ils ont vraiment les moyens de faire de la musique et qu’ils arrivent (modestement) à en vivre, les gars de LaF veulent continuer.

« On veut avoir de la job ! », lance Thomas, alors que Julien glisse en souriant qu’à moyen terme, ils voudraient aussi « écrire les classiques du futur ». Les autres rigolent et opinent : « C’est vrai parce que l’album, c’est un peu la fin d’un chapitre, et on a très hâte de retourner en studio ! », ajoute Thibault.

« C’est notre projet charnière, alors on veut installer les assises de l’identité de notre groupe et notre présence sur la scène québécoise, complète Thomas. L’idée est de faire nos preuves, de défendre le projet aux yeux de tout le monde, d’aller plus loin, de défricher… Alors pour vrai, oui, avoir de la job. Et être stimulés par ça. »

Citadelle. LaF Disques 7ième Ciel. Sortie aujourd’hui

PHOTO FOURNIE PAR DISQUES 7IÈME CIEL

Citadelle, de LaF

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