Cinq mois après la sortie de son très bon deuxième album Blanc Mercredi, Caracol offrait mardi soir à l'Astral sa première montréalaise en bonne et due forme, et en formation de cinq musiciens, elle qui avait tourné ces derniers mois en duo et trio.

Encore verte, la proposition à cinq fait de belles promesses, dont celle d'une conquête du marché anglophone: presque la moitié des chansons interprétées mardi était dans la langue de Sarah McLaughlan. Surpris? So are we.

Carole Facal avait tâté de l'angliche sur Blanc Mercredi, dans la forme des All The Girls, Strange Film et Good Reasons, jolies chansons qui ne supportaient cependant pas la comparaison avec les Quelque part, Certitudes et Feu d'artifice, moments forts du concert d'hier.

Les onze chansons de Blanc Mercredi étaient au programme ainsi que les six nouvelles de son nouvel album en anglais, Shiver, paru début mars sur iTunes (onze chansons avec de ses reprises) ou en format EP (les inédites) destiné à la vente en concert. Reste que le message est clair: Caracol n'a pas fait sa valise pour ne tourner que dans la francophonie, après avoir déjà goûté aux territoires anglophones sur le circuit world, à l'ère DobaCaracol.

On lui souhaite bonne chance, évidemment, mais avant de prendre la planète d'assaut, le groupe assemblé pour la tournée devra démontrer davantage de cohésion.

Caracol avait certes du mal à chasser la nervosité apparente de cette première, mais s'est tout de même démenée avec le professionnalisme et le bagout qu'on lui connaît. Ses accompagnateurs l'ont bien accompagné aussi, n'en doutez point; reste que ça manquait de tonus dans les quelques moments plus rock, que les enchaînements entre les chansons étaient parfois laborieux et qu'on aurait apprécié un peu plus de finesse dans les arrangements, ce dont ne manquait justement pas Blanc Mercredi.

La performance s'est ouverte sur Feu d'artifice, parfaite pour briser la glace, après quoi la musicienne nous a confié son bonheur d'enfin jouer à Montréal. J'ai soif, ballade pop aux accents de doo-wop rehaussée par les choeurs (les accompagnements vocaux sont un des points forts du concert) a ensuite laissé place à la première chanson en anglais de la soirée, Strange Film.

Le genre de chanson qui attire les comparaisons. Parce qu'en anglais, parce qu'on jugera aussi presque la moitié du concert sur son potentiel d'exportation. Dans le ton, dans le swing, le son plus doux des Cranberries nous est alors passé par l'esprit, en tous cas lorsque Caracol et sa bande ne bifurquent pas vers le folk et le country.

La bluesée La Route a ensuite été servie, puis All The Girls (Caracol avait alors sorti son ukulélé) et Good Reasons, duo d'anglos de Blanc Mercredi. Après, le rock de Certitudes qui manquait un peu d'étincelles, Fantômes et cette Quelque part heureuse ayant valu à la chanteuse son récent prix Génie, la composition étant de la B.O.F. de Starbuck. Une de ses meilleures, tant dans le texte que dans la mélodie.  

Exit ensuite les hommes, ne restant sur scène que Carole, sa bassiste Amélie Mandeville et sa choriste-percussionniste (et confidente, a-t-on appris au fil des présentations de chansons qui la concernaient souvent, à sa surprise!) Audrey-Michèle Simard. Petit moment feu de camp tout à fait charmant où on a offert les Je volerai ton baiser, l'attachante Viens vers moi et une reprise du duo country américain Secret Sisters (Tennesse Me, belle découverte).

Philippe B et le violoniste Marc Papillon ont alors rejoint les filles pour enfiler une version vaguement hawaïenne et tout à fait adorable d'un classique de Gainsbourg, La Chanson de Prévert. Avant les rappels, un dernier droit constitué notamment du rock Le Mépris, de Le Livre de la colère (qui avait perdu le côté ska-roots, hélas!) et la nouvelle Horseshoe Woman. Donnons encore quelques essais à Caracol, tout souriante et forte en voix hier, et son orchestre, on sent qu'avec le temps et l'usure de la route, ce sera bientôt un très bon spectacle.