Au terme de trois week-ends consécutifs, l'Igloofest a frôlé le cap des 70 000 spectateurs -  69 772 pour être précis, et donc environ 10 000 de plus que l'an dernier. Le happening hivernal a été particulièrement achalandé au cours des quatre derniers soirs de sa présentation, c'est-à-dire à guichets fermés. Samedi soir, tous les billets avaient été vendus avant même qu'on ouvre les portes de l'aire des festivités.

Si le ciel ne nous tombe pas sur la tête, le prochain rendez-vous est fixé l'an prochain. D'ici là, comment l'Igloofest pourra-t-il envisager son développement ?

Le festival extérieur devra faire face à un problème de surface. Comment accueillir encore plus de monde sur la même aire ? L'emplacement actuel ne laisse plus beaucoup de marge de manoeuvre... Faudra-t-il négocier quelques lopins supplémentaires sur les Quais du Vieux-Port ? Ce ne sera pas chose facile... Derrière la scène principale, le Cirque du Soleil dispose d'infrastructures permanentes et l'on ne peut empiéter sur ce terrain. En direction opposée? Ne reste plus grand espace...

L'Igloofest devra peut-être aussi songer à la diversification de sa clientèle. Au-delà de sa portion 18-25 ans, l'auditoire de musique électronique présent  à l'Igloofest constitue une minorité visible. L'électro est un phénomène multi-générationnel, pourtant. Plusieurs DJ présents sur la grande scène de l'Igloofest sont quadragénaires ou affichent la fin de la trentaine... et la perspective de se retrouver dans un vaste happening dans le froid rebute généralement les adultes ayant dépassé le quart de siècle - quoique la température augmente de 10 degrés Celsius lorsqu'on se trouve lové dans la masse des danseurs, a-t-on observé !

Soyons réalistes, les DJ set présentés à l'extérieur au coeur de l'hiver ne s'adressent essentiellement qu'aux (très) jeunes adultes. Toutefois, les éléments plus pointus pourraient se retrouver dans un lieu beaucoup plus vaste que ne l'est le petit dôme (Igloo Virgin Mobile) actuellement utilisé. Pourquoi ne pas ériger un immense Igloo, tant qu'à exploiter cette image ? Et ainsi y présenter le nec plus ultra de la culture technoïde pendant que les kids s'esbaudissent devant la scène principale, affublés de leurs combinaisons (une pièce, c'est le grand chic! ), de leurs lunettes de ski et autres fringues hivernales aussi exubérantes les unes que les autres ? Bien sûr, cela n'empêcherait en rien la présentation de contenus plus substantiels sur la grande scène.

Ainsi, ce week-end on a eu droit au très attendu tandem que forment Marcel Dettmann et Ben Klock, que l'on peut considérer parmi le nec plus ultra de la techno allemande. Difficile d'imaginer plus carré, plus industriel, plus droit que cette musique élaborée par ces DJ de renom, célèbres en Europe et respectés par les connaisseurs nord-américains. Ensemble, Dettmann et Klock ont mixé pendant quatre heures samedi soir. À travers ce flot continu de groove germanique, on a certes perçu quelques ornements visionnaires mais, grosso  modo, l'exigence de la danse pour grand public réduisait un tant soit peu l'éventail des propositions esthétiques. Ce qui est tout à fait normal dans le contexte.

Vendredi soir, la jeune Anglaise Maya Jane Coles devait aussi composer avec les mêmes paramètres : devant des milliers de fans dont l'objet essentiel est de s'éclater, le groove proposé fut forcément moins substantiel que ce que le suggèrent ses enregistrements. Les insertions de soul / R&B/ hip hop dans sa house/dubstep m'ont semblé plus substantiels durant la première moitié de son set, alors que la deuxième m'est apparue plutôt redondante. La prestation subséquente de Green Velvet, vétéran de la house/techno from Chicago eut d'ailleurs l'effet d'un électrochoc. Au bout de 45 minutes, cependant, cette suite incessante de spirales ascendantes de sons acidulés n'avait plus d'autre utilité que de stimuler  les pieds et le bas-ventre des festivaliers.

Ce fut néanmoins plus réjouissant que le set du Britannique Diplo, jeudi soir. L'ex-acolyte de M.I.A., à qui l'on doit plusieurs fondements de la facture sonore, m'a franchement déçu. Hormis ses zigonnages ad nauseam de friture technoïde (non sans rappeler le sabre-laser de Luke Skywalker), le DJ vedette nous a balancé des éléments mélodiques qui frôlaient la ritournelle et le mauvais goût. Racolage ou panne d'inspiration ?  Qu'importe...

Les prochaines observations électro-hivernales sont prévues à l'Igloofest 2013.