C'est le lieu de résidence de la chanteuse Loreena McKennitt et de l'acteur Colm Feore, la ville-hôtesse d'un prestigieux festival de Shakespeare et de musique classique, mais surtout le berceau de la star pop de l'heure auprès des préadolescentes, Justin Bieber, 16 ans. La Presse s'est rendue à Stratford, en Ontario, pour suivre les traces de ce phénomène plus grand que nature.

Ryan Butler est suivi par 68 000 personnes sur Twitter. Il figure dans un clip vu 200 millions de fois sur YouTube. On raconte, sur les sites à potins, qu'il a mangé avec Miley Cirus. Le jeune homme de 16 ans reçoit même des appels de fans inconnus de partout dans le monde plusieurs fois par semaine. Pourtant, en ce matin de novembre ensoleillé, c'est une journée d'école comme les autres pour Ryan Butler, à la Stratford Northwestern Secondary School.

 

 

 

Ryan Butler est un des meilleurs amis de la star pop de l'heure auprès des préadolescentes, Justin Bieber. Pendant qu'il s'affaire à la bibliothèque de son école, son grand ami d'enfance, lui, est en tournée et fait la promotion de sa biographie. «Nous nous textons, indique-t-il. Et quand ça fait longtemps que je ne l'ai pas vu, il me fait prendre l'avion pour le visiter dans de grandes villes.»

«J'ai rencontré Usher, Akon, Eminem et Will Smith», ajoute Ryan Butler. Mais il y a aussi de mauvais côtés à faire partie de la garde rapprochée de Bieber. «Quelqu'un a mis mon numéro sur Twitter. J'ai des appels de filles d'Allemagne, de France et d'Australie. C'est un peu lassant. Mes parents ne répondent plus au téléphone», blague-t-il.

Ryan ne changerait pas de vie avec son ami, qui est devenu le protégé du chanteur R & B Usher, et qui est déménagé avec sa mère, dans la ville de son mentor, à Atlanta. «À mon âge, j'ai du mal à juste gérer l'école. Je ne sais pas comment Justin fait avec toutes les entrevues», précise-t-il.

Nous avons rencontré Ryan en compagnie du professeur de multimédia de son école, Al Booker. Comme sa femme était l'enseignante préférée de Justin, ce dernier a invité le couple à New York pour son concert au Madison Square Garden, le 31 août dernier. Ryan Butler était là aussi. En fait, Justin Bieber avait invité tous ses proches de Stratford. Pendant sa chanson Baby, il les a invités à monter sur scène et à danser. Le tout a été filmé pour le documentaire sur Bieber qui sortira en 3D en février, Never Say Never.

«Je ne l'avais jamais vu en spectacle et j'ai été très impressionné par son talent. Il danse, il chante, il joue de la guitare, du piano et de la batterie, indique Al Booker. Il faut voir les filles crier quand elles le voient... Et dans les coulisses, c'est fascinant de voir les centaines de gens qui gagnent leur vie grâce au succès de Justin.»

Photo: François Roy, La Presse

Ryan Butler

Le concours Stratford Idol

 

 

 

C'est Nathan McKay qui nous a ouvert les portes de l'école secondaire de Justin Bieber. Il a gardé plusieurs fois son petit voisin Justin quand il était enfant. Il a toujours été proche de lui et de sa mère Pattie Mallette, qui a donné naissance à Bieber alors qu'elle n'avait que 18 ans, et qui s'est rapidement séparée du père de son fils. «En 2002, j'ai organisé un spectacle-bénéfice pour lui acheter une batterie. Nous avions amassé 1800 $», raconte Nathan, surnommé The Lion King dans la biographie de Justin qui vient de paraître, à cause de sa coupe de cheveux.

Nathan McKay est plus qu'un promoteur de musique à Stratford. Il est une sorte d'ambassadeur culturel qui connaît tout le monde. C'est un peu comme un parrain pour Bieber.

Il nous a présenté Lea Keeley, qui aurait toutes les raisons du monde d'être jalouse de Justin Bieber, mais qui ne l'est pas. Dans les notices biographiques officielles de Bieber, on dit qu'il est arrivé deuxième dans un concours de chant local quand il avait 12 ans. Mais dans les faits, il est arrivé troisième. C'est Lea Keeley qui est arrivé au deuxième rang.

«C'est bizarre, je ne peux pas croire qu'il est devenu si big», nous a confié celle qui a remporté les honneurs l'année suivante, et qui déménagera sous peu à Montréal pour tenter sa chance. «Je suis fière de Bieber. Il voulait tellement et il est très talentueux.»

Nathan McKay nous a fait rencontrer Lea Keeley dans la salle communautaire où a eu lieu la Stratford Idol Competition. La jeune chanteuse de 19 ans est même remontée sur scène pour chanter magnifiquement Hallelujah de Leonard Cohen.

Photo: François Roy, La Presse

Nathan McKay

La carte Bieber-iffic

 

 

 

Le centre communautaire Hiwanis figure sur la carte Bieber-iffic, conçue par le bureau touristique de Stratford, qui permet de suivre les traces de Justin Bieber, de l'endroit où il a eu son premier rendez-vous galant à son comptoir de crème glacée préférée, en passant par son école d'immersion en français (Bieber est bilingue, dit-on) et son magasin d'instruments de musique préféré.

«Tu vois la guitare accrochée en haut? Justin l'a signée», nous lance Aimee Jesso, une employée du Stratford Music Store. «Il passait beaucoup de temps dans la salle acoustique», dit-elle, en faisant payer un jeune qui a déjà joué au golf avec Bieber (tout le monde se connaît ou presque à Stratford).

«Pendant le festival de théâtre, deux ou trois étudiants par jour venaient nous voir pour nous demander des détails sur Justin Bieber. Nous avons donc décidé de préparer une carte touristique avec ses grands-parents et ses amis», explique Eugene Zakreski, directeur de la Stratford Tourisme Alliance. «Depuis avril, la carte a été téléchargée des milliers de fois, dans des pays aussi lointains que l'Argentine, Singapour et l'Allemagne. Pour nous, c'est une bonne façon de rajeunir notre clientèle. Justin revient ici presque tous les mois. Il est proche de ses grands-parents, donc nous avons un sentiment d'honnêteté par rapport à la carte. C'est la carte de ses racines.»

Le Avon Theatre est l'un des arrêts de la carte Bieber-iffic. C'est devant ce théâtre du centre-ville que Bieber chante alors qu'il est encore un enfant, dans plusieurs clips qui l'ont rendu populaire sur YouTube.

Avant les pièces de théâtre, Bieber venait y jouer de la guitare à côté des portes d'entrée, accompagné de sa mère ou de son grand-père. Parfois, il pouvait faire plus de 100 $ par jour.

«C'était il y a quelques années, un p'tit gars est passé devant moi, il s'est mis à chanter à quelques pieds de moi et des filles ont couru vers lui en criant. J'ai trouvé ça difficile, car lui, il n'avait pas à payer pour se loger et se nourrir», dit Matthew Murphy, un musicien de rue qui accuse Bieber de lui avoir volé son spot. «Mais je lui souhaite bonne chance et j'espère qu'il peut mener une vie normale. Moi, je pense que j'aime encore mieux être pauvre.»

Photo: François Roy, La Presse

Le Avon Theatre

La machine à karaoké du YMCA

 

 

 

Justin Bieber a ses détracteurs à Stratford. Son succès ne fait pas parler qu'en bien, mais la plupart des gens de sa communauté sont fiers de lui. Dans son bureau, Mimi Price a une photo d'elle et de Justin, prise l'an dernier à Noël. «Il y a trois semaines, il était ici avec son père pour jouer au basketball», souligne la directrice du YMCA de Stratford. «On a aussi tourné des images dans le gymnase pour son documentaire. Justin se pratiquait sur la machine à karaoké de notre centre pour les jeunes et il restait jusqu'à la fermeture, se souvient-elle. Nous ne pouvions nous empêcher de le regarder tellement il était mignon. Il avait la musique en lui. À 12 ans, il était déjà un vrai showman

Pour Mimi Price, Justin Bieber restera toujours juste un «kid from Stratford». «Je lui demande toujours comment il va. Je suis toujours un peu inquiète pour lui. Mais à Stratford, il est dans sa zone de confort», dit-elle.

Justin Bieber est un ambassadeur pour sa ville natale, croit le maire Dan Mathieson. «Il représente très bien Stratford à l'échelle mondiale. Il parle beaucoup de ses débuts ici comme busker (musicien de rue). Nous sommes surtout perçus comme une ville de théâtre établi. Cela nous permet d'aller chercher une clientèle plus jeune et plus hip.»

Pour les adultes qui l'ont vu grandir, Bieber est un phénomène plus grand que nature. «Justin Bieber est probablement le premier exemple d'une star dont le succès a purement été basé sur le web, sans disque et sans grosse machine de promotion derrière lui. Il est devenu un phénomène culturel mondial», dit Eugene Zakreski.

«Il a sa vie de star populaire, mais il a aussi sa vie ici, quand il revient voir ses grands-parents dans une petite ville de 32 000 habitants», conclut son meilleur ami, Ryan Butler.

Photo: François Roy, La Presse

École secondaire de Justin Bieber

Quelques  dates

 

 

 

1er mars 1994: Pattie Mallette a 18 ans quand elle donne naissance à Justin Bieber à Stratford, en Ontario.

À l'âge de 12 ans: Après avoir appris à jouer de la guitare, du piano et de la batterie (en grande partie par lui-même), Bieber participe à un concours de chant dans sa ville natale.

2007: Sa mère met en ligne sur YouTube un clip de la performance de son fils au concours, de même que d'autres numéros musicaux. L'agent Scott Braun découvre alors Justin Bieber et l'invite à rencontrer Usher à Atlanta.

Octobre 2008: Bieber signe un contrat avec Island Records et déménage à Atlanta avec sa mère.

7 juillet 2009: Bieber lance sa premièrechanson, One Time.

Novembre 2009: Sortie de son premier album, My World.

Mars 2010: Sortie de son deuxième, My World 2.0.

26 novembre  2010: Bieber lancera un album acoustique. My World Acoustic.

Photo: François Roy, La Presse

Crèmerie Scoopers

Quelques chiffres

 

 

 

> En date d'hier, 6 100 107 personnes suivaient Justin Bieber sur Twitter.

> Justin Bieber utilise beaucoup ce réseau social: il a rédigé 5878 «tweets» à ce jour.

> Quatre millions d'albums vendus en un an.

> En octobre dernier, les clips de Bieber avaient été vus 962 millions de fois sur YouTube, a rapporté MTV.

Justin a dit:

«C'est aujourd'hui le premier anniversaire de mon album My World. C'est fou ce qui est arrivé depuis. Merci à vous tous.» - Justin Bieber sur Twitter, jeudi dernier.

«Mon père et ma mère étaient encore des adolescents quand ils m'ont eu: ils n'étaient pas tellement plus vieux que je le suis aujourd'hui (...) Mes parents se sont séparés quand j'avais 10 mois. Peu après, mon père a été embauché en dehors de la ville. Maman a travaillé comme une folle pour que nous gardions tous les deux un toit au-dessus de notre tête.» - Extrait de sa biographie, Justin Bieber - Mon histoire, de mon premier pas vers l'éternité.

«Je dois vivre la vie d'un gars de 16 ans.» - Sur le fait qu'il a invité ses amis pour son anniversaire à Los Angeles, dont Ryan Butler. (Source: Billboard)

«Des gens disent que je ne serai plus un bon chanteur après la puberté. Comment cela pourrait-il avoir du sens quand on regarde la carrière de gars comme Michael Jackson, Usher et Justin Timberlake?» - Sur sa voix qui mue. (Source: Billboard)

Photo: François Roy, La Presse

Centre-ville de Stratford