Au terme d'une longue pause amorcée en 2003, Tindersticks a repris du service en 2008 avec l'album Hungry Saw et la tournée qui s'ensuit. L'escale montréalaise, qui marque le début d'un nouveau cycle créatif pour ce groupe originaire de Nottingham, est prévue ce soir à La Tulipe.

On compose l'indicatif 514, Stuart Ashton Staples répond. Le 514? Tindersticks est en résidence montréalaise? Voici la réponse.

«J'ai un portable canadien, mais je suis actuellement à Washington, DC. Nous jouissons des services de notre label montréalais, Constellation.»

 

Et voilà pour ce rappel courtois du chanteur, dont la voix calme, le débit un tantinet hésitant et la profondeur de la rhétorique évoquent l'approche de son principal véhicule d'expression.

Depuis 1993, ce groupe anglais jouit d'un respect assez considérable pour continuer sa longue route dans l'infini champ gauche. Une route, faut-il le souligner, qui n'est jamais facile si on veut rester indépendant d'esprit et de coeur.

Il y a cinq ans environ, les membres de Tindersticks avaient atteint un point où il leur fallait prendre une pause, c'est-à-dire approfondir leurs projets personnels (deux albums solo pour Staples, entre autres) et jouir de leur vie privée. Le chanteur s'est installé avec femme et enfants dans le Limousin, Neil Timothy Fraser vit à Londres, David Leonard Boulter réside en République tchèque.

«Nous avions voyagé sans cesse pendant les 12 années précédentes. Vers 2003-2004, nous avons senti le besoin urgent de poser nos valises et de prendre une pause prolongée. Nous avons pris le temps nécessaire. Ce que nous avions à dire ensuite a adopté une forme différente», explique le chanteur.

Trois autres membres originels de la formation ont quitté le navire en cours de route. Revoilà néanmoins Tindersticks en selle, entre autres pour une tournée d'une dizaine de dates sur ce continent. Hungry Saw, septième album de la formation, a été lancé en avril 2008.

Pour servir ses mélodies soyeuses, ses ambiances spleenesques mâtinées d'humour fin, Tindersticks fut un des premiers groupes de sa génération à exploiter une instrumentation aussi singulière : glockenspiel, vibraphone, cordes, cuivres et anches s'ajoutaient au traditionnel alignement clavier-guitares-basse-batterie. Au trio régulier, s'ajouteront d'ailleurs quatre autres musiciens à La Tulipe. Le calendrier annonce aussi la venue d'invités spéciaux. La rumeur veut que Lhasa, amie personnelle de Staples qu'elle a connu a Paris, en fasse partie.

«Nous ne nous considérons pas comme un groupe rock, estime Stuart Staples, mais plutôt comme la réunion de personnes aux influences diverses. Chacun a une histoire musicale propre, chaque chanson émerge au beau milieu de ces influences. Il arrive que ces chansons adoptent de très belles formes justement à cause de ce mélange. Je dirais aussi qu'il y a toujours eu une lutte au coeur de la création. Ça n'a jamais été facile pour nous, mais j'ai fini par apprécier la nature de ce combat pour la création... qui demeure un mystère.»

Stuart Staples n'est pas très chaud à l'idée de dresser un bilan de Tindersticks, ce qui ne l'empêche pas de réfléchir aux accomplissements passés.

«Quand on regarde en arrière, on voit des cycles, nos trois premiers albums par exemple. Enfin... je dirais que les fondements de notre travail n'ont pas changé. En essayant de rester honnêtes envers nous-mêmes, nous sommes toujours à la poursuite de nos idées afin de les réaliser. Nous essayons de rester près de nos inspirations premières, tout en nous donnant de nouvelles possibilités de création.»

L'expérience, fait observer le chanteur, a favorisé l'instinct.

«Hungry Saw n'a pas émergé de longues discussions préliminaires. Lorsque les chansons ont été prêtes, nous sommes entrés en studio, nous nous sommes fait confiance. Cet album a été enregistré dans une courte période de temps, nous avons travaillé à l'instinct, nous avons pris des décisions rapides. Nous avons le sentiment d'en être sortis plus forts.»

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Tindersticks se produit ce soir, 21 h à La Tulipe.