L'oeuf ou la poule? Le disque ou le spectacle? On n'arrive jamais vraiment à déterminer ce qui est l'étincelle de départ des chansons d'Antoine Gratton. Il brouille encore les pistes avec Le problème avec Antoine, album enregistré sur le vif... dans une grange transformée en studio.

Un mot revient constamment dans la bouche d'Antoine Gratton lorsqu'il parle de sa musique: énergie. Donner un spectacle, selon lui, c'est canaliser son humeur du moment et ses énergies pour embarquer l'auditoire. Enregistrer un disque, c'est tenter de capter l'énergie et l'esprit de liberté qu'il retrouve sur les planches. «Le show vient du disque, convient-il, mais le disque vient aussi du show.»

 

Antoine Gratton n'est pas le plus célèbre des rockeurs québécois. Sa bouille ne passe pourtant pas inaperçue. Antoine Gratton, c'est le gars avec une étoile peinte sur l'oeil droit qu'on a vu toucher le clavier au sein du groupe Mimosa et, il y a quelques semaines à peine, chanter avec Daniel Boucher à l'émission Studio 12 à Radio-Canada.

Son étoile, c'est bien sûr un «symbole rock» qui trahit le vieux fan de Kiss en lui. Mais c'est surtout un flash intéressé (la première fois, c'était pour draguer une maquilleuse), qui est devenu sa marque de commerce. Se tracer une étoile sur l'oeil est désormais son rituel d'avant-spectacle. «C'est devenu mon suit de travail, c'est comme ma cravate», illustre-t-il.

Cet élément visuel constitue aussi la porte d'entrée de son disque Le problème avec Antoine, un voyage musical aux allures de comic book éclaté. Antoine Gratton n'a rien contre le folk où prime l'authenticité, mais ce n'est pas sa tasse de thé. «C'est bien beau écrire des affaires qui viennent du coeur et être le plus honnête possible, mais il y a quelque chose de cool dans la possibilité de vivre ou d'explorer quelque chose d'extrême à travers un personnage.»

Le livret coloré ne laisse aucun doute: Le problème avec Antoine relate les aventures d'un superhéros musicien. En tandem avec son bon ami Éloi Painchaud, Antoine Gratton s'est donc offert tout un trip où l'on reconnaît son penchant pour le rock seventies, qu'il croise ici avec des pistes rythmiques numériques, ou là avec de la guitare classique. Parfois, il y a des paroles, parfois, il s'agit de pistes instrumentales. Bien malin celui qui inventera le mot pour décrire cet univers musical mouvant et éclatant.

Même si l'expression «album concept» a circulé (une affaire de numérologie: les cinq pointes de l'étoile, les cinq sens, etc.), Antoine Gratton n'est pas entré en studio avec un plan quinquennal. Il n'en avait pas, de plan. Il s'est installé dans une grange des Laurentides, pas trop loin de chez Éloi Painchaud et, jour après jour, ils ont écrit, composé, enregistré, effacé et recommencé, cherchant à composer des musiques qui font naître des images.

Pas pour la radio

Le problème avec Antoine n'a pas été fait dans le but de tourner à la radio. En paix, un chanson plus folk, est la seule qu'on imagine se frayer un chemin sur les ondes. Le reste, c'est du matériel pour faire des spectacles. Des canevas sur lesquels ses accompagnateurs Marc et Guillaume Chartrain auront tout le loisir d'improviser sur scène.

Et c'est déjà commencé. Le trio rock d'Antoine Gratton a déjà des concerts mensuels programmés dans de petites salles de cinq villes du Québec, dont Montréal (à La Place d'à côté) et Saint-Hyacinthe (au Zaricot). Il promet que chaque spectacle sera différent du précédent. «Le show doit rester malléable. Comme ça, on ne trouve jamais ça plate. On demeure intéressés et je pense que ça nous rend intéressants.»