Le Midem, la grand-messe annuelle de l'industrie musicale, qui a pris fin mercredi à Cannes, a révélé l'ampleur de la crise qui touche le secteur depuis plus de six ans, encore aggravée par la débâcle financière et économique mondiale.

Le Midem a connu une baisse d'affluence de 12 % par rapport à 2008. Au total 8000 professionnels de 80 pays ont participé à ce 43e Marché international du disque et de l'édition musicale, de dimanche à mercredi, contre 9100 de 91 pays l'an passé (avec une matinée en plus) et 9400 en 2007.

«L'industrie musicale est en crise, particulièrement sa partie CD, et en plus la crise économique a frappé le secteur», a commenté la directrice du Midem, Dominique Leguern, en estimant qu'il ne fallait «pas se focaliser» sur les chiffres d'affluence.

Cette année, aucune révolution technique n'a bouleversé le secteur de la musique ces derniers mois. Cela s'est ressenti dans les débats du Midem et du MidemNet, son volet numérique organisé samedi, axés sur des aspects sociétaux plus que technologiques.

En d'autres termes, le cadre général du nouveau business de la musique est désormais posé, reste à savoir comment organiser les affaires en son sein.

Le rôle central de l'artiste dans cette nouvelle ère semble être une grande tendance, à en juger par les deux thèmes qui ont dominé ce Midem.

D'abord, la relation entre artistes et fans via Internet, et la manière pour l'industrie d'en tirer des revenus.

Ensuite, les liens grandissants entre artistes et marques commerciales, qui associent leur image selon des stratégies de communication jumelées.

Ces pistes sont symptomatiques du fait que l'industrie cherche à diversifier ses revenus face à l'effondrement des ventes de CD, toujours pas compensé par le marché numérique (Internet et téléphonie mobile).

Si la théorie qui fait de l'artiste le pivot des futurs modèles économiques se vérifie, le rôle des maisons de disques sera sans doute bouleversé.

Elles pourraient être contraintes de s'adapter au profil individuel de chaque musicien pour lui fournir des services sur mesure.

Ainsi, l'indépendant Pias vient de lancer un service appelé Intégral, pour «proposer aux artistes autre chose que les majors en termes de promotion, de marketing ou de distribution».

Cette structure à la carte a conclu des contrats avec le groupe Oasis (pour l'album Dig Out Your Soul) et Paul McCartney (pour son projet The Fireman), qui ont délaissé les majors. Et Pias a annoncé au Midem la signature du groupe Placebo, auparavant chez EMI.

Au-delà des ces tâtonnements, l'industrie espère que 2009 marquera enfin un vrai décollage du numérique. La suppression annoncée des verrous anticopie sur la musique téléchargée pourrait y contribuer.

En France, les producteurs attendent beaucoup de la loi antipiratage, dont la ministre de la Culture Christine Albanel a indiqué qu'elle pourrait être examinée par l'Assemblée nationale «fin mars au plus tard».

Samedi au MidemNet, le Britannique Eric Nicoli, l'ancien président d'EMI, a esquissé une autocritique de l'industrie musicale, facilitée par le fait qu'il n'est plus à la tête de la major: «L'une de nos erreurs a été de nous laisser distraire, y compris en faisant des procès aux internautes, du coeur de notre activité, qui est de créer de bons contenus».

Cette volonté de recentrage sur l'artistique est partagée par le Midem, qui a musclé son programme de concerts. Cette année, il a accueilli deux possibles révélations de 2009, l'Anglais Charlie Winston et le Français Sliimy.