«Je me lève le matin, je cherche l'a cappella d'une des mes chansons, et voilà. Aujourd'hui, remix!» Daniel Russo-Garrido, autrement connu sous le nom de scène Boogat, a accumulé au fil des ans quelques milliers de megs de versions remixées de ses compositions sur le disque dur de son ordinateur. Il partage aujourd'hui le fruit inédit de ses distractions créatives, compilées sur le premier volume d'un album de remixes.

On y trouve ses propres versions, mais surtout celles des amis, à qui il a également envoyé ces a cappella. «Finalement, j'ai trouvé ça tellement bon que je n'ai gardé que trois de mes propres remixes!» Sur Boogat RMX Volume 1, les remodelages de noms qui nous sont familiers - DJ Manifest, Chafiik de Loco Locass, Ghislain Poirier - et un aréopage de découvertes, qu'ils se nomment Beus Bengale, Delicate Beats, 7D ou Future Boy.

D'emblée, il faut bien reconnaître que le travail de Boogat se prête merveilleusement bien à l'exercice. Ses deux derniers albums, Patte de salamandre (2006) et Tristes et belles histoires (2004), proposaient une goûteuse fusion de hip-hop québécois et de rythmes afro-latins, fruit de ses origines latines et de son ouverture d'esprit musicale.

Le résultat des manipulations met ainsi l'accent sur ses rythmes relevés, accordant d'ailleurs une belle part aux structures drum&bass. «Je suis un amateur du genre, dit-il. J'ai aussi un ami, Generic, qui a fait un remix sur l'album.» DJ Manifest colle aux codes du genre hip-hop, assoit sa version de Malgré Tout sur un imparable groove.

Deux titres se démarquent particulièrement de cet ensemble assez varié et coloré pour justifier son existence: le Rumba Soltera du Montréalais Roberto Lopez, leader du Roberto Lopez Project, brillant orchestre de ce qu'on pourrait qualifier de néo-samba, sophistication de la danse brésilienne servie sur des tons de jazz et d'électro. «Le beat de sa version est tellement différent!»

Puis, bien sûr, Ghislain Poirier, dont le style de production tranche avec l'atmosphère de fiesta qui traverse Boogat RMX Volume 1. «Le rythme à l'origine était beaucoup plus doux. Ghislain amène la chanson tellement plus loin», en construisant sa pesante rythmique autour du thème, acrimonieux, de la pièce Le jour où rien n'a changé.

«Personnellement, je crois que l'art du remix s'est perdu, dans le hip-hop québécois, en tout cas, dit Boogat. Aux États-Unis, en France même, non seulement les chansons paraissent en version single, mais elles s'accompagnent souvent de remixes - pas forcément très originaux, d'où la variété des styles qu'on retrouve sur mon disque.»

«Je crois que les artistes hip-hop doivent avoir du matériel comme ça. Si t'es un chansonnier, y'a moyen de faire vivre ton oeuvre plus facilement, je crois, en donnant des concerts, en tournant beaucoup. Dans le hip-hop, c'est plus difficile. Il faut toujours avoir du matériel inédit.»

En plus de ce nouvel album, Boogat aura l'occasion de faire vivre son oeuvre ce soir, au National, en première partie du groupe français Psy4 de la Rime.