Annie Lafleur est une voix importante de la poésie québécoise. Ses recueils sont le fruit de longues gestations et nous offrent toujours un souffle immense. Idem dans Puberté, un livre qui remonte le temps jusqu’à son adolescence.

Ces poèmes forment une jungle luxuriante où les plantes et les bêtes se heurtent, créant des vers forts et crus dans une langue incantatoire pour repousser l’arrivée de l’âge adulte. Annie est cette « mutante », décrite par son amie la Ménine, aux yeux grands ouverts sur un monde fermé qui rêve en imaginant l’inimaginable.

On peut relire 100 fois Puberté et ne jamais trouver les traces de l’acné juvénile au même endroit sur un visage qui « ment si bien ». Ce regard fait table rase de tout ce qui cherche à l’ignorer « sur un sentier qui mène nulle part, dans une ville où l’on n’arrive jamais ». Toujours surprenantes, les images n’en sont que davantage percutantes. « J’ai appris à lire et à écrire au son de ma voix/ le premier cri par le cri de ma mère toute nue ».

Ce flot de paroles percutantes possède quelque chose de libérateur, voire de jubilatoire. La poète s’amuse en créant parfois des vers de 12 pieds sans rime et des formes graphiques rappelant les arts visuels. Elle nous fouette la cervelle de grandes bourrasques en concluant : « C’est la fête ! »

Mario Cloutier, collaboration spéciale

Puberté

Puberté

Le Quartanier

144 pages

8/10