Quand elle a tourné le clip de Ma peau en juin 2020, Sarahmée voulait célébrer la couleur de ses origines. « C’était peu de temps après George Floyd. Je me suis dit : “Il faut qu’on fasse un clip, qu’on danse, qu’on montre notre joie de vivre”, parce que c’était très sombre à cette époque-là », raconte-t-elle. Deux ans plus tard, cet esprit festif colle toujours à la chanson aujourd’hui transposée en un livre jeunesse coloré.

Transformer en ouvrage papier un de ses morceaux ? Sarahmée n’y avait jamais pensé. Or, lorsque la maison d’édition Kata l’a contactée avec cette idée, elle s’est empressée de dire oui.

« Je pense qu’une chanson, c’est bien. Tu peux l’écouter 1000 fois. Mais un livre, c’est un objet. Tu peux le garder, tu peux le mettre dans ta bibliothèque, tu peux le donner à quelqu’un. La portée du message et sa durée dans le temps sont tout autres. Ça devient intemporel, en fait », explique-t-elle, assise à une table de la librairie Racines, un commerce de la rue Saint-Hubert qui met en valeur les œuvres d’artistes racisés et autochtones.

Un « message universel »

« Oui ma peau fait de moi ce que je suis / Elle ne disparaît pas sous la pluie / J’la changerais pour rien au monde quoi qu’on en dise », écrit plus d’une fois Sarahmée dans Ma peau, reprenant ainsi le refrain de sa pièce parue sur l’album Irréversible en 2019.

« Cette chanson-là parle de moi, de mon enfance, […] du développement de mon estime personnelle et de l’acceptation de mon corps, de mes cheveux, de ma peau », explique la rappeuse.

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Au moment de sa sortie, elle s’est toutefois rendu compte que les paroles de cette « célébration de la peau noire » trouvaient écho chez de nombreuses personnes de toutes origines.

« Je pense que c’est un message qui est universel. »

Apprendre à s’accepter, « c’est une étape que tout le monde a à franchir dans sa vie », poursuit l’autrice-compositrice-interprète, qui se réjouit que le livre soit destiné en premier lieu aux jeunes.

« Chaque fois que tu doutes, souviens-toi toujours / Des comme toi, y en a pas d’autres / Sois ton plus grand amour », conseille la rappeuse aux lecteurs qui, dans l’ouvrage papier, découvriront des paroles légèrement modifiées de la chanson.

Place à la diversité

Pour Sarahmée, tout comme pour l’illustratrice Niti Marcelle Mueth, il était très important de montrer une grande diversité parmi les personnages qui habitent les pages de Ma peau. « Dans le livre, il n’y a pas juste un type de femme qui est représenté. Il n’y a pas juste des femmes non plus. […] On a toutes sortes de corps, toutes sortes de textures de cheveux. Des gars, des filles, des gens non binaires… C’était important pour moi que si un jeune ouvre ça, il se voie. »

À un moment de l’entrevue, Sarahmée pose un regard sur les nombreux titres qui l’entourent dans la librairie Racines. « Je n’avais pas ce genre de livres. […] Quand je grandissais, on n’avait pas autant de littérature avec de jeunes filles noires sur les couvertures. »

Cette réalité, Niti Marcelle Mueth l’a aussi remarquée dans son enfance. « C’est vraiment le genre de livre que j’aurais voulu avoir quand j’étais plus jeune », affirme l’illustratrice de 26 ans au sujet de Ma peau.

D’autant plus que le livre a un côté très festif. « On ne voulait pas que ce soit lourd », explique l’artiste visuelle à qui La Presse a parlé au téléphone.

Souvent, quand on parle des personnes noires, c’est relié à des sujets lourds, comme le racisme ou la discrimination. Là, on voulait vraiment que ce soit léger. On voulait mettre en scène des personnes de couleur qui ont du fun dans des scénarios de tous les jours.

Niti Marcelle Mueth, illustratrice

Celle dont on peut actuellement voir les œuvres sur la façade de différents commerces de Montréal-Nord dans le cadre de l’exposition de L’art en vitrine a été agréablement surprise d’avoir été choisie par Sarahmée pour illustrer ce livre jeunesse, leur premier à toutes les deux.

Entre elles, la chimie a tout de suite opéré. « C’était naturel parce qu’on a des similitudes dans nos vécus. On a aussi beaucoup de valeurs en commun. »

Dans les illustrations de Niti Marcelle Mueth, on retrouve d’ailleurs toute la musicalité des mots de Sarahmée. « Il fallait qu’on garde le mouvement, le beat. […] C’est très réussi dans le livre, je trouve », se réjouit la rappeuse.

En librairie le 3 août

Ma peau

Ma peau

Coédition de La Maison Mère et de KATA éditeur

Dès 7 ans