Pour qui ne connaît pas le style afro-colombien nommé afro-champeta, plusieurs chansons de Tribu Baharú semblent provenir directement de l'Afrique ou des Antilles. Rumba, soukouss ou ndombolo congolais, coupé-décalé ivoirien, konpa haïtien, zouk martiniquais-guadeloupéen, calypso trinidadien, reggae jamaïcain et plus encore.

D'accord pour l'expression hispanophone, mais musique colombienne... Vraiment ?

Cesar Urueta Figueroa, surnommé « Pocho », l'affirme sans ambages et explique les sources du concert de clôture aux 31es Nuits d'Afrique : « La culture des musiciens de Tribu Baharú s'est construite avec les picós, ces discothèques de rue d'abord popularisées sur la côte caraïbe de la Colombie - Baranquilla, Cartagena, etc. Hormis la cumbia et la salsa de Colombie, ces sound systems très influents diffusaient énormément de musiques africaines et antillaises. »

On en déduit que l'afro-champeta a ensuite gagné le continent latino-américain après avoir irradié la côte atlantique, puisque Tribu Baharú provient de Bogotá. Cesar corrobore : 

« Nous avons aussi grandi avec cette musique des picós, on l'entendait partout dans les rues de notre ville. La champeta résulte de cette mixité de genres musicaux et de contextes. À Bogotá, plusieurs groupes diffèrent de Tribu Baharú car ils mélangent la champeta avec d'autres ingrédients que les nôtres - Bazurto All Stars, La Sucursal, etc. En fait, on trouve en Colombie plusieurs variantes de champeta, urbaines ou rurales. Très souvent, les urbaines sont plus électriques, ou même plus électroniques. »

Les musiciens de Tribu Baharú ont d'abord attaqué en jouant la champeta telle qu'ils la concevaient au départ, et puis...

« Nous incluons maintenant mapalé, cumbia, rock, funk, styles africains tels ndombolo, soukouss, mbaqanga d'Afrique du Sud, highlife du Ghana, reggae. La champeta est très certainement une forme hybride, car elle repose sur cette grande diversité de rythmes et de genres. Mais tous ses praticiens ont un but commun, ils s'adressent d'abord à celles et ceux qui aiment danser, quelle que soit leur provenance. »

AU FIL DES FESTIVALS

Tribu Baharú, qui existe depuis 2009, s'est taillé une solide réputation en Colombie et parcourt le circuit des festivals au Mexique, aux États-Unis, au Canada et en Espagne. La formation est aujourd'hui constituée du chanteur Dilson Cabarcas (Makambille), du guitariste et compositeur Boris Nelson (Boricua), du MC Josue Moreno (Shaka el terrible), du bassiste Ruder Pacheco (Chindo Bass), du percussionniste Oscar Gamboa (Moniki) et du batteur Cesar A. Urueta Figueroa (Pocho).

« À nos débuts, raconte ce dernier, nous étions neuf musiciens, nous sommes six depuis 2010. » 

« Nous formons une sorte de groupe rock exploitant les rythmes africains et afro-caribéens. » 

- Cesar A. Urueta Figueroa

« Notre instrumentation est la suivante : basse, guitare, percussions colombiennes, batterie, percussions électroniques, clavier Casio SK-5, énumère-t-il. Nous voudrions d'ailleurs inclure davantage les musiques électroniques dans nos prochains enregistrements. Pour l'instant, ce que nous proposons est très organique, très roots. »

Ainsi, la facture afro-colombienne de Tribu Baharú témoigne de ce va-et-vient entre Mère Afrique et ses points d'ancrage dans le Nouveau Monde au fil des siècles... pour le pire et pour le meilleur.

« Prenons l'exemple de la rumba cubaine, fait observer Cesar, elle a beaucoup voyagé : de Cuba au Congo puis de retour en Colombie, pour ne nommer que cette destination. De plus, la rumba cubaine est tributaire des musiques africaines. Aujourd'hui, tout est désormais connecté, ces musiques ne font qu'un. Elles sont liées aux racines africaines, elles sont immensément diversifiées. Elles forment un tout. »

_________________________________________________________________________

Sur la scène TD-ICI Musique dans le Quartier des spectacles, dimanche, 21 h 30