Les spectacles de percussions de tradition mandingue, c'est-à-dire guinéennes, maliennes, sénégalaises ou provenant des régions avoisinantes aux nations mentionnées, dépassent rarement la notion de folklore - aussi riche soit ce folklore. Impressionnantes lorsqu'on s'y frotte les premières fois, ces manifestations de traditions musicales finissent souvent par devenir redondantes lorsqu'on en a saisi les fondements.

Le cas de Nimbaya est différent, force était de constater sur la grande scène extérieure au Village des Nuits d'Afrique.

Autrefois en difficultés, des femmes de tous âges y ont trouvé le salut dans la percussion collective,  dans la danse, dans le chant. Qui plus est, ces Guinéennes issues de milieux défavorisés ont investi un monde d'homme, s'y sont élevées au point de devenir les égaux. Elles ont fait la démonstration de la possible ascension sociale, de la possible élévation culturelle et artistique, de la possible émancipation des femmes dans une société en pleine transition. Au fil du temps, elles sont devenues d'excellentes tambourineuses en plus de danser et chanter, rôles qui leur étaient assignés traditionnellement en Afrique de l'Ouest.

Lorsqu'elles se sont produites en 2006 au Festival Nuits d'Afrique sous la bannière Amazones de Guinée, un tambourineur mâle leur était assigné sur scène et finissait par occuper trop d'espace. Samedi soir, un tambourineur mâle a tenté de s'immiscer dans le jeu collectif pour finalement être ridiculisé et déclassé par ses collègues. Évidemment, il s'agissait d'une fiction, d'une théâtralisation... qui en disait long sur le progrès accompli par ces femmes de Nimbaya.

Non seulement font-elles désormais preuve d'une grande expertise en tant que percussionnistes (djembé, doundoun, balafon, etc.), non seulement maîtrisent-elles cette formidable polyrythmie ouest-africaine, soit l'un des plus riches patrimoines musicaux des musiques traditionnelles sur Terre,  mais encore s'affairent-elles désormais à en moderniser les propositions : chorégraphies, éclairages, scénographie s'ajoutent aux réformes de leur jeu aux tambours.

Bien sûr, il faut être connaisseur de percussion guinéenne pour se rendre compte de ces actualisations, mais quiconque peut en ressentir l'effort et la facture d'ensemble. Ces femmes sont belles, athlétiques, autonomes, compétentes et... à peine sorties d'un carcan traditionnel qui, entre autres handicaps, en a fait des victimes de l'excision.

Assurément, donc, ces femmes de Nimabaya représentent un modèle de changement au sein de la société guinéenne qui, tant bien que mal, accède à l'époque contemporaine.