Nikki Yanofsky a connu la plus belle soirée de sa vie hier, à Wilfrid-Pelletier. C'est elle-même qui l'a dit après avoir chanté I Believe, une chanson pop qu'on associe aux Jeux olympiques de Vancouver, accompagnée de ses musiciens et de l'Orchestre Métropolitain, dirigé par Mélanie Léonard.

Pendant une heure et demie, la Montréalaise de 17 ans, très élégante dans sa robe noire, a chanté des standards de jazz et pigé dans le répertoire de la grande chanson américaine avec en prime quelques titres qu'elle a coécrits. Elle a également emprunté aux Beatles (Oh Darling, plutôt réussie), à Don Henley (The Heart of the Matter, en souvenir du tout premier spectacle qu'elle a vu, celui des Eagles) et à Aretha Franklin (Baby I Love You, très applaudie pour son énergie rhythm and blues, mais moins convaincante à mon sens).

Nikki est une habituée du Festival de jazz, mais elle n'avait encore jamais chanté à Wilfrid-Pelletier et surtout pas avec l'Orchestre Métropolitain. Pendant Cheek To Cheek, qui n'était peut-être pas la chanson idéale pour lancer la soirée, sa voix était un peu perdue dans l'ensemble mais tout est rentré dans l'ordre dès la très swignante Sweet Georgia Brown: Nikki s'est mise à arpenter la scène micro en main et a on n'a pu faire autrement qu'être ébahis par sa voix aussi souple que puissante.

Par la suite, le mariage de l'Orchestre Métropolitain et du groupe de swing-jazz de Nikki a donné lieu à quelques beaux moments. Je pense à l'intro orchestrale de You'll Have To Swing It (Mr. Paganini), un classique d'Ella Fitzgerald que Nikki chante depuis des années, et à la juxtaposition de la voix de Nikki et des cordes au début de la fort belle Someone To Watch Over Me.

La salle s'est levée d'un trait après un numéro de scat enlevant comme elle a applaudi chaudement la jeune chanteuse quand elle s'est mise à échanger note pour note avec son guitariste ou son pianiste. Mais plus que ces acrobaties vocales dont on la savait capable, c'est la maturité de Nikki et son sens de la nuance qui m'ont frappé chez cette si jeune chanteuse.

Elle peut mordre avec énergie dans un blues comme I'd Rather Drink Muddy Water et pousser sa voix dans Ac-Cent-Tchu-Ate the Positive - «C'est ma philosophie de vie», nous a-t-elle dit - que chanter avec émotion la superbe Nature Boy dont l'histoire qui la fascine aujourd'hui lui faisait peur quand elle était «petite». Le public a ri, comme il l'a fait à quelques reprises pendant la soirée, devant tant de naturel et de spontanéité. Nikki Yanofsky a beau chanter des classiques d'une autre époque, elle n'est surtout pas une vieille âme.

Elle a remercié fréquemment ce public chaleureux auquel elle a adressé quelques mots en français. «J'ai de la difficulté à le parler, mais je peux chanter en français», a-t-elle confessé avant de chanter sa composition bilingue Bienvenue dans ma vie. Plus tard, elle a rappliqué, «en français juste pour vous» avec le standard Plus je t'embrasse pendant lequel elle n'était accompagnée que par le noyau dur de son groupe.

Après le rappel prévu au programme, le public l'a réclamée une autre fois et elle est revenue seule avec son pianiste chanter Over the Rainbow. Un beau moment de sensibilité et de retenue.

C'est l'évidence même, tout est possible pour Nikki Yanofsky. Reste à voir comment elle choisira d'orienter sa jeune carrière.