Une soie. Il n'y a pas vraiment d'autre mot pour décrire la Montréalaise d'adoption Elizabeth Shepherd, qui donnait dimanche le premier de deux concerts intimes au Savoy du Métropolis.

En plus d'interpréter des standards bien choisis empruntés à Cole Porter ou Nina Simone, la chanteuse, parfaitement bilingue, a glissé Les amoureux des bancs publics de Brassens et s'est racontée avec simplicité et humour dans les deux langues qui l'habitent.

Installée le plus souvent derrière un clavier rouge vif qu'elle faisait sonner comme un orgue délicatement fuzzé, la jeune femme a aussi touché un piano durant son concert. Elle se produisait avec le contrebassiste Ross Macintyre et le batteur Colin Kingsmore, musiciens avec lesquels elle forme un trio à la fois soudé et décontracté, capable d'improvisations relevées (Macintyre, tout particulièrement).

L'essentiel, ici, c'est toutefois une musicalité tamisée, en accord avec l'approche privilégiée par la meneuse du groupe. Elizabeth Shepherd possède en effet une voix gracile qui mise plus sur la sensualité que la puissance, ce qui a parfaitement convenu à Feeling Good (franchement agréable) ou Love For Sale, qu'elle a livré en tout début de programme. Ce fut moins heureux, toutefois, pour sa traduction française de Lonely House, émaillée de pas mal de fausses notes.

Des compositions originales qu'elle a glissées dans un programme surtout fait de standards (à l'image de son dernier album, le très agréable Rewind), on retient surtout une pianiste qui aime jouer avec les dissonances pour évoquer les tempêtes de l'âme, comme dans Start to Move (écrite pour un ami qui ne trouvait plus de raison de vivre) et What Else. Poussée par un groove charnel (mais pas au plan sexuel du terme), Elizabeth Shepherd qui était programmée à 19 h, a offert un apéro de qualité, présenté dans un écrin des plus sympathique. Elle remet ça lundi soir, même heure, même endroit.