J’accuse (nom rétracté), dans le condo de Martin Marchand (Olivier Gervais-Courchesne), avec le bâton de golf.

Après cinq semaines d’écorniflage autour de la fermette mortuaire de Bedford, l’identité de la personne responsable des meurtres d’Aller simple : Survivre éclatera au grand jour dans le dernier épisode de ce haletant thriller écolo-policier, que relaie la chaîne Noovo ce mercredi à 20 h.

Cette finale satisfaisante, qui rattache toutes les ficelles pendantes, est offerte sur la plateforme Crave depuis une semaine et, Dieu merci, le gros punch n’a pas fuité sur les réseaux sociaux. Ç’aurait été dommage de cochonner le plaisir – et de saboter le travail de détective – d’autant de fans d’Agatha Christie, en version petit écran.

Oui, j’ai vu cet ultime épisode d’Aller simple. Non, je ne révélerai rien de compromettant dans cette chronique, à part que je n’ai deviné le nom du tueur qu’à la fin du cinquième épisode, quand le ténébreux Sacha (Anglesh Major) a confié à son otage qu’il n’avait jamais liquidé personne.

Ding, ding ! L’apprenti fermier Sacha, super louche, ne trônait donc plus au sommet de la liste des suspects. Qui le remplace au top de cette liste macabre ? J’ai trouvé, par déduction, mais il me manquait l’explication claire et précise, qui chatouille les limites de la crédibilité, vous verrez.

Les trois auteurs d’Aller simple (Annie Piérard, Bernard Dansereau et Étienne Piérard-Dansereau) révèlent le pot aux roses dans les premières minutes de leur épisode final. Rendu là dans l’enquête, c’est pas mal plus captivant de découvrir comment a opéré l’assassin plutôt que de spéculer, encore une fois, sur son identité.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Le trio de scénaristes d’Aller simple : Bernard Dansereau, Annie Piérard et Étienne Piérard-Dansereau

Car il reste un paquet de trucs nébuleux à éclaircir. D’abord, qui a empoisonné l’actrice militante Ariane (Rosalie Bonenfant), grande utilisatrice de l’expression « les cocos », avec du W-18, un opioïde 100 fois plus puissant que le fentanyl ? Sous-question : qui, dans ce groupe de six trentenaires, a les contacts pour acheter une drogue aussi rare ?

Pour ceux qui ont perdu le fil, voici un court résumé. Le cauchemar d’Aller simple : Survivre a débuté quand Ariane a abattu, par accident, le jeune Xavier Marchand (Antoine Olivier Pilon), qui lui vouait une obsession maladive. Au lieu de contacter la police, le groupe de fermiers a décidé d’enterrer le cadavre de Xavier, ce qui a déclenché une cascade inarrêtable de drames.

Ensuite, comme Ariane risquait de tout bavasser, l’assassin l’a éliminée, tout comme le grand frère de Xavier, Martin Marchand, trop curieux, trop fouineux. Il n’y a qu’un seul coupable pour tous ces crimes et il – ou elle – habite sur la fermette.

Le contrôle du téléphone cellulaire de Xavier par Félix (Simon Landry-Désy) a été longuet et a grugé énormément de temps d’antenne, je trouve. Le voyage à Niagara, les appels vocaux fabriqués avec des extraits de vidéos YouTube, les fausses publications sur les réseaux sociaux, l’élastique de la vraisemblance a été tendu à son maximum.

Maintenant, de gros soupçons pèsent sur le timide Henri (Charles-Aubey Houde), qui s’est inventé un alibi le jour de l’homicide de Martin Marchand et qui a enguirlandé Ariane quelques heures avant sa mort. Psychoridige, l’avocate Kim (Rose-Marie Perreault) a froidement menti à sa copine Yasmina (Nahéma Ricci), qui, elle, a été surprise à nourrir en cachette le chat de Xavier. On a également compris que le stoïque Félix possède l’intelligence pour couvrir ses traces, tandis que l’effacée Fanny (Sophie Nélisse) connaît les moindres habitudes et secrets de ses colocataires, ce qui lui permet de manœuvrer dans la plus grande discrétion.

C’est grâce aux indiscrétions de son conjoint Thomas (Jean-Nicolas Verreault), totalement absorbé par la vie rurale de ses voisins, que l’enquêtrice Juliette Michaud (Anick Lemay) remontera jusqu’au psychopathe en chef. Et des sondes urinaires, si, si, joueront un rôle crucial dans la résolution de ce meurtre et mystère géant.

La clé de l’énigme nous est donnée par un personnage secondaire quasi absent de la saison, ce qui est un brin décevant, parce que ce revirement est impossible à prédire, même en revoyant, à la loupe, les cinq épisodes précédents. L’histoire se tient tout de même et elle implique un changement de comportement radical de l’un des protagonistes.

Même si j’ai préféré le premier volet, je n’ai pas boudé mon plaisir avec Aller simple : Survivre, aux accents de Rear Window d’Alfred Hitchcock. C’est un genre super difficile à écrire, car il faut constamment surprendre les téléspectateurs, de plus en plus exigeants.

Il faut distiller des indices, mais pas trop. Il faut semer des fausses pistes, tout en demeurant vraisemblable. Il faut construire un suspense réaliste qui progresse et qui ne divulgue pas tout d’un seul coup.

Bref, il s’agit d’un périlleux exercice scénaristique d’équilibre entre un paquet de facteurs à doser intelligemment. Ce qui a été fait dans le cas qui nous préoccupe.

Si Aller simple atterrissait sur une plateforme comme Netflix, c’est évident qu’elle générerait de l’écoute partout sur la planète. Qui n’aime pas regarder des polars de type « whodunit » (qui l’a fait ?) à la télé ?

Pour le moment, les trois auteurs d’Aller simple n’ont pas signalé leur intention de pondre un troisième chapitre à leur œuvre. Il ne faudrait vraiment pas que Miss Marple tire sa révérence avant sa dernière énigme ou un autre rendez-vous avec la mort.