L’humoriste et acteur Stéphane Rousseau a toujours dessiné. Concrétisant son rêve, le 21 novembre, d’exposer ses peintures dans une galerie d’art, il a accueilli La Presse dans son atelier des Laurentides pour vous faire découvrir quelques-unes de ses œuvres, miroir de ses réflexions intérieures.

« Ce qui me fait le plus vibrer, c’est de partir d’une page blanche et de créer quelque chose qui n’existe pas. Pour le meilleur et pour le pire ! »

Depuis sa tendre enfance, le dessin a toujours fait vibrer Stéphane Rousseau. Autant que le rire. Chacun a été un exutoire primordial dans sa vie. « Je ne pourrais pas me passer de l’un ou de l’autre », dit l’artiste de 53 ans. 

Stéphane Rousseau est passionné par l’art urbain. Il adore Ron English, Banksy ou encore Shepard Fairey. Les maîtres du passé tels que Picasso, Dalí, Braque, Goya, Basquiat, Keith Haring ou Miró l’ont inspiré. 

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Stéphane Rousseau devant sa toile Origine

Quand il est en tournée, dès qu’il a un moment de libre, il dessine des personnages sur des napperons, dans ses cahiers Moleskine (il en a des centaines !) ou sur son iPad. Des esquisses qu’il convertira ou pas sur toile plus tard. Ou qu’il laisse parfois dans les chambres d’hôtel, un cadeau pour la femme de ménage.

Nouvel atelier 

Il y a deux ans, il s’est construit un atelier dans sa maison des Laurentides. Il s’y retrouve « dans sa tête ». Des moments de plénitude. 

« Le dessin est un espace où je me sens protégé, dit-il. Quand j’étais petit, que tout le monde était malade autour de moi, souvent il ne fallait pas faire de bruit, alors ma sœur peignait des natures mortes et moi je dessinais. C’était nos petits refuges. » 

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Cirque royal, 2019, Stéphane Rousseau, acrylique sur toile, marqueur Posca, 30 po. x 30 po. 

Si Stéphane Rousseau fait rire depuis plus de 25 ans au Québec et en Europe, il a toujours été un garçon intérieur.

Je me pose plein de questions. Des images s’entrechoquent, souvent pas terminées, dans ma tête. Des envies, des souvenirs, des obstacles.

Stéphane Rousseau

Dans sa tête, il y a parfois plein de petits démons, dit-il, des petits monstres qu’il apprivoise et qui cheminent avec lui dans la vie, comme il essaie de le traduire dans sa toile Origine

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Cette maquette a permis de planifier la présentation de la vingtaine d’œuvres de Stéphane Rousseau,
à la galerie Yves Laroche, du 21 novembre au 14 décembre.

Avec ce crâne symbolisant la mort, omniprésente dans l’existence de Stéphane Rousseau, lui qui a perdu son père, sa mère et sa sœur, emportés par le cancer. Dans Origine, il a peint un petit oiseau et un mur de briques avec une porte. Pour évoquer comment il construit ses propres murs intérieurs, des murs qui l’empêchent de s’exprimer pleinement. 

« Parfois, on n’est pas capable de prendre son envol, car on est pris avec nos souvenirs, nos peurs, nos angoisses, nos couples déchus, la maladie, la mélancolie aussi », dit-il.  

Ses toiles reflètent donc son humeur du moment. On y retrouve des références à son enfance, comme dans Cirque royal où des animaux s’imbriquent dans sa tête. Des animaux très présents dans l’œuvre de Stéphane Rousseau. 

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Oni, 2019, Stéphane Rousseau, acrylique sur toile, marqueur Posca, 80 po. x 80 po.

« Mon père m’emmenait beaucoup chasser, même si je n’ai jamais tiré sur un seul animal dans ma vie ! Je l’accompagnais dans les bois. On se baladait de longues heures, souvent dans le silence, avec ma sœur qui n’aimait pas ça non plus, mais on aimait ça être avec notre père qui nous présentait des guides amérindiens qui le conseillaient. »

Nouvelles couleurs 

Les nouvelles œuvres de Stéphane Rousseau sont déclinées dans une économie de coloris. Le blanc, le noir et le doré constituent les trois teintes de sa série Origine, l’artiste ayant voulu se restreindre après des productions antérieures très éclatantes. 

« J’avais envie de m’imposer des balises et de raconter les choses de façon plus ordonnée que dans le passé où je m’étais parfois amusé avec une grande gestuelle, jouant à Basquiat ! C’était tripant, mais j’en ai brûlé beaucoup de ces toiles que je créais non pas pour les montrer, mais pour extérioriser mes joies et mes peines. Et ça m’a fait beaucoup de bien. » 

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Fury, 2019, Stéphane Rousseau, acrylique sur toile, marqueur Posca, 30 po. x 72 po.

La peinture de Rousseau est soignée. Il appose de cinq à six couches pour atteindre un fini uniforme. Formellement, il privilégie les courbes, les mouvements, l’arrondi d’une invagination. 

Il y a quelque chose de sensuel dans ce choix que j’aime répéter sans cesse, je ne sais pas pourquoi. Mais ces mouvements me plaisent énormément. Peut-être est-ce parce que je n’ai jamais pris la ligne droite pour me rendre quelque part, j’ai toujours emprunté les chemins sinueux.

Stéphane Rousseau 

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Automate, 2019, Stéphane Rousseau, acrylique sur toile, marqueur Posca, 40 po. x 40 po. « L’enfant pris dans un corps d’adulte, dit l’artiste. Avec les mêmes peurs que celles de l’enfance. On cherche tous l’amour. »

Style

Mais peindre n’est pas toujours aisé. « Même si j’y prends beaucoup de plaisir, c’est un combat intérieur, car il faut réussir à transposer sur la toile ce que tu as en tête. Et ce n’est pas toujours gagné d’avance. » 

Rêve concrétisé 

Exposer dans une galerie d’art, il en rêvait depuis 20 ans. Depuis qu’il s’était rendu compte qu’il avait trouvé une signature, un style fidèle à lui-même et non conforme à l’air du temps. Sa rencontre fortuite avec le galeriste Yves Laroche, à New York, a scellé le projet d’exposition. « Mon travail l’a intéressé et j’en suis encore ému », dit-il.  

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Passé composé, 2019, Stéphane Rousseau, acrylique sur toile, marqueur posca, 60 po. x 84 po.

Même si la réponse des amateurs d’art n’est pas au rendez-vous le 21 novembre, Stéphane Rousseau n’arrêtera pas de dessiner. « C’est viscéral, dit-il. Je pourrais arrêter de chanter, mais pas de dessiner. C’est un réflexe quotidien et le seul moment dans ma vie où je ne vois pas le temps passer. Je suis alors totalement dans ma bulle. » 

L’artiste rencontrera le public le jour de l’ouverture de l’exposition, le 21 novembre, de 17 h à 21 h, à la galerie d’art Yves Laroche, au 6355, boulevard Saint-Laurent. 

Origine, œuvres de Stéphane Rousseau, à la galerie Yves Laroche, jusqu’au 14 décembre