(Paris) Record battu pour un tableau du peintre français d’origine russe Nicolas de Staël : son œuvre monumentale Parc des Princes a été adjugée jeudi 20 millions d’euros (29 millions $) lors d’enchères organisées à Paris par la maison Christie’s.

Parc des Princes, datant de 1952, était estimé entre 18 et 25 millions d’euros et était mis sur le marché pour la première fois.

La somme de 20 millions d’euros (frais compris) offerte par un acheteur privé européen pour cette toile de 2,5 mètres sur 3 représente quasiment le double du précédent record de Nicolas de Staël, né Nikolaï Vladimirovitch Staël von Holstein à Saint-Pétersbourg, à 12,1 millions US (15,9 millions $) pour la toile Nu debout, adjugée par Christie’s à New York en 2018.

Détenue par les descendants du peintre depuis son décès en 1955 à 41 ans, l’œuvre n’a été exposée qu’une dizaine de fois : à New York en 1953, puis à Paris au Musée national d’art moderne en 1956, avant la Fondation Maeght à Saint-Paul-de-Vence en 1972, le Grand Palais à Paris trois ans plus tard, puis Londres et Madrid en 1991. La toile a été à nouveau montrée à Paris en 2003, au Centre Pompidou.

On distingue sur cette immense toile un match de football nocturne stylisé, avec de larges empâtements de couleur rectangulaires-bleus sarcelle, malachites, bleus ciel, rouges, blancs électriques et noirs intenses.

Moment décisif

Selon Christies’s, cette peinture représente « le sommet de l’art de Nicolas de Staël, ainsi qu’un moment décisif de l’histoire de l’art occidental d’après-guerre ».

L’artiste l’a réalisée après avoir assisté avec sa femme à un match de football entre la France et la Suède au Parc des Princes à Paris.

Au Parc ce soir-là, on jouait « en nocturne avec un éclairage électrique. Et donc c’est un événement parisien auquel Nicolas de Staël décide d’assister », raconte le spécialiste Pierre Martin-Vivier, directeur du département XXe siècle de Christie’s.

« Le soir du match, Nicolas de Staël rentre chez lui, dans son atelier rue Gauguet dans le XIVe arrondissement, à côté du parc Montsouris et il peint des esquisses, il est émerveillé par ce qu’il voit, par ce jeu de joueurs, de couleurs, de lumières », poursuit-il.

« Pendant un mois, il va travailler comme un fou à peindre 25 tableaux, plus ou moins grands, plus ou moins figuratifs et il termine par ce grand tableau qui s’appelle Parc des Princes des footballeurs », un tournant dans sa carrière, alors qu’il était divisé entre abstraction et figuration, estime le spécialiste.

Né à Saint-Pétersbourg en 1914 dans une famille d’aristocrates et contraint de fuir la Russie après la révolution bolchévique, Staël s’établit à Paris en 1938. Après un bref passage dans l’atelier de Fernand Léger, il se lie d’amitié avec des membres de l’avant-garde parisienne, parmi lesquels Sonia Delaunay ou Le Corbusier, qui encouragent son penchant pour l’abstraction.

Au cours de la vente chez Christie’s consacrée à l’avant-garde et aux grands maîtres du XXe siècle, des œuvres de René Magritte, Max Ernst, Pablo Picasso, Yves Klein, Serge Poliakoff, Paul Klee, Alberto Giacometti, Jean Dubuffet ou Joan Miro étaient également proposées.

Parmi les ventes les plus élevées : Mousquetaire. Buste de Picasso a trouvé acheteur pour 3,46 millions d’euros (5 millions $), deux toiles de Pierre Soulages sont parties à 1,21 et 1,69 million d’euros (1,8 million $ et 2,5 millions $), un tableau de Zao Wou-Ki s’est vendu à 2,77 millions d’euros (4 millions $).

En ce premier jour de la Foire internationale d’art contemporain (FIAC), rendez-vous du marché artistique français et mondial, un autre artiste a enregistré un record dans une vente distincte organisée par Sotheby’s : Francis Picabia, dont le Médéa a été adjugé 2,6 millions d’euros (3,8 millions $), pour une œuvre de la série Transparence sur papier selon cette maison de ventes.