Donner à des jeunes touchés par la violence les moyens de s'en sortir et de s'épanouir. Telle est la mission de l'organisme montréalais LOVE depuis 25 ans. Une mission que le Musée des beaux-arts embrasse pour la cinquième fois en exposant, jusqu'au 31 mars, des photographies réalisées avec des jeunes de 13 à 21 ans qui ont trouvé dans l'art les germes d'une renaissance.

« Ce que LOVE fait pour la jeunesse, c'est magnifique, surtout quand on fait des rencontres et, en même temps, de la photographie, de la peinture et de l'écriture. Cela donne une voix à la jeunesse et des exemples aux autres jeunes. LOVE a réellement changé ma vie. » 

Elle s'appelle Rina. Elle a 15 ans et une étonnante maturité. L'été dernier, avec d'autres jeunes qui ont eu des problèmes personnels marquants, elle a participé à un programme de l'organisme LOVE qui vise « à bâtir une société sans violence ». 

Avec les autres participants, Rina s'est rendue à plusieurs reprises, l'été dernier, au Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) pour découvrir les collections d'oeuvres d'art, parler d'enjeux de société, développer son estime de soi... et créer une oeuvre.

Le MBAM présentait alors l'exposition D'Afrique aux Amériques : Picasso en face-à-face, d'hier à aujourd'hui, qui suggérait notamment combien nos perceptions identitaires ont changé au cours des dernières années en faveur d'attitudes plus respectueuses des différences. 

L'artiste Moridja Kitenge Banza, qui est responsable des programmes éducatifs Cultures du monde et vivre-ensemble au MBAM, avait justement créé une oeuvre photographique (Authentique no 1) dans le cadre de cette expo.

Il l'a utilisée pour inspirer les jeunes qui devaient au départ choisir un objet qui les représentait pour créer leur oeuvre. « L'idée était de travailler sur l'identité multiple, que j'évoque dans Authentique no 1, dit Moridja Kitenge Banza. Sur le fait qu'on peut avoir plusieurs identités, que l'on vienne de la diversité ou non. Mais l'idée était aussi de travailler sur l'estime de soi. » 

Pour son oeuvre Free Your Spirit, Rina a utilisé le motif de la feuille, car elle aime l'automne, « une saison de réflexion », dit-elle, et la couleur dominante du vert, « car elle représente l'espoir, que l'on doit toujours garder à l'esprit », ajoute-t-elle, la voix un peu tremblante. 

Selena, 18 ans, a aussi bien apprécié ses deux semaines au musée, une sorte de thérapie, dit-elle : « J'ai rencontré des personnes qui avaient les mêmes intérêts et les mêmes vues que moi. C'était agréable de rencontrer de nouvelles personnes ayant environ le même âge et avec lesquelles je suis devenue amie. »

« Ce projet m'a permis de m'exprimer et après les deux semaines avec LOVE, j'ai trouvé que j'avais plus confiance en moi, ajoute Rina Michalopoulos. C'était comme une deuxième famille pour moi. J'ai pu créer des liens forts et échanger des choses personnelles avec les autres participants. » 

Les oeuvres que ces jeunes « à risque » ont créées sont actuellement présentées, avec des textes, à l'Atelier international d'éducation et d'art-thérapie Michel de la Chenelière, au MBAM. L'exposition s'intitule Transformation : le retour de LOVE au Musée. 

« Ces projets qui permettent aux jeunes de s'exprimer et de partager ce qu'ils ressentent sont de belles occasions pour eux de se sentir valorisés, dit G. Vanessa Sérant, coordonnatrice des communications et du développement à LOVE. Notre organisme fête ses 25 ans, mais malheureusement, cela fait 25 ans que les jeunes sont en quête de soutien social. Ils se questionnent beaucoup sur leur identité. On espère qu'ils vont pouvoir s'épanouir en étant qui ils sont vraiment. » 

Moridja Kitenge Banza dit avoir été ému de constater, le jour où l'on a pris ces jeunes en photo devant leurs oeuvres, que chacun et chacune avait pris soin de son apparence, exprimant une belle confiance en soi, une belle fierté. 

« En participant avec eux à ce projet, j'essaie de transmettre l'estime personnelle et la confiance en moi que j'ai reçues, dit Moridja Kitenge Banza. Moi-même, j'aurais aimé participer à ce genre de projet au Congo, quand j'étais jeune. Cela permet de faire comprendre à ces jeunes qui ne sont pas artistes qu'avec l'art, en partant de zéro, on peut réussir à créer, et que quand on a confiance, on arrive à faire beaucoup de choses. » 

Transformation : le retour de LOVE au Musée, jusqu'au 31 mars, au MBAM