Elle a incarné la Parisienne et, dans le monde, la Française par excellence. Issue des quartiers populaires de Paris, Édith Piaf, ou la «Môme Piaf», reste l'une des plus grandes chanteuses françaises. À Paris, une exposition rend hommage à cette artiste qui a construit sa légende, plus ou moins fidèlement à la réalité.

Padam padam, La vie en rose, L'hymne à l'amour... Le répertoire d'Édith Piaf est riche de succès qui ont traversé les décennies, traversé les modes, survécu à leur interprète, et ont été repris par des artistes en tous genres. Édith Piaf, qui aurait fêté ses 100 ans cette année, fascine, encore et toujours.

Le parcours proposé par la Bibliothèque nationale de France revient sur les visages de Piaf (en argot, le piaf est un moineau). Femme du peuple, petite silhouette éternellement figée dans une robe noire, elle le fut sans conteste. Piaf, c'est aussi une voix reconnaissable entre toutes, une amoureuse et une croqueuse d'hommes et, enfin, une légende.

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Le parcours de l'exposition sobrement intitulée Piaf s'ouvre avec des images d'Édith Piaf, bonnet phrygien sur la tête (le bonnet des sans-culottes de la Révolution française), chantant, accrochée aux grilles de Versailles: «Ah, ça ira, ça ira, ça ira, les aristocrates, on les aura!»

Ces images sont extraites d'un film de Sacha Guitry de 1953, Si Versailles m'était conté.

C'est la quintessence même de Piaf: la petite fille née dans les faubourgs de Paris, dans une famille de saltimbanques, qui chante d'abord dans les rues de Belleville et de Montmartre.

Une photo d'elle à 10 ans, titrée Miss Édith, montre qu'enfant, Édith Gassion a déjà une voix phénoménale. De ses racines, elle garde une proximité avec les gens: elle participe ainsi à des tournées dans les casernes et, en 1943, se rend dans les camps de prisonniers français en Allemagne pour un tour de chant.

À la Libération, ses sympathies pour le régime de Vichy et une certaine complaisance envers les Allemands ne lui seront jamais reprochées, relève l'exposition. Édith Piaf sort de la guerre incarnant plus que jamais la France, et la légende lui prête des sentiments résistants - la vérité semble tout autre.

La légende

Toute sa vie, Édith Piaf reçoit des milliers de lettres d'admirateurs; son enterrement, en octobre 1963, se fait sous l'oeil du public et des quidams, venus par centaines accompagner son cercueil au cimetière du Père-Lachaise.

Il faut dire qu'Édith Piaf a cultivé sa popularité en s'imposant comme une vedette, d'abord dans les music-halls parisiens, puis à l'international dès la fin des années 40. Elle vit aux États-Unis pendant un an, de 1955 à 1956, se rend en Amérique centrale, en Amérique du Sud, en Angleterre et aussi au Québec.

Elle popularise elle-même ses compositions, et la mort interrompt son projet de comédie musicale, où elle voulait inviter des artistes à chanter ses chansons. Le nom du projet? La voix.

Metteure en scène de sa vie, femme aux amours nombreuses, tumultueuses et tragiques (la mort du boxeur français Marcel Cerdan dans un écrasement d'avion participe à la légende), Édith Piaf est aussi l'une des seules artistes françaises de l'époque à avoir utilisé tous les médias. D'abord la radio, mais aussi la télévision (elle participe notamment au Ed Sullivan Show), le cinéma ainsi que les journaux à potins et la presse populaire, qui suivront chacun de ses faits et gestes jusqu'à sa mort, inventant même un lien entre sa mort et celle du poète Jean Cocteau.

Cette légende survit largement à Piaf. Icône populaire, objet de films (on se souvient de La vie en rose, d'Olivier Dahan, qui a valu à Marion Cotillard l'Oscar de la meilleure actrice en 2008, exposé à la BnF), connaît-on vraiment Piaf?

Une photo, peut-être, répond à cette question. C'est un portrait de la chanteuse fait par Raymond Depardon, alors tout jeune photographe. Son objectif a capté Édith Piaf dans un salon, loin de la scène. L'exposition se termine sur ces mots de Piaf.

«Il peut m'arriver n'importe quoi, je m'en fous pas mal.»

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À la BnF de Paris jusqu'au 23 août.