Se mesurer au roi Bolt sur 100 m ou entrer en piste comme un champion le coeur haletant: le musée olympique à Lausanne, métamorphosé après deux ans de travaux, plonge le visiteur au coeur de la glorieuse incertitude du sport à travers l'histoire des Jeux.

Face au Lac Léman, le «vaisseau amiral» d'une flotte qui se monte désormais à 25 musées olympiques à travers le monde s'apprête à rouvrir ses portes le 21 décembre au public, qui pourra bénéficier de l'entrée gratuite pendant un mois.

La transformation, au prix de 55 millions de francs, n'est pas seulement physique et technologique. L'esprit du lieu a été revisité afin de raconter l'aventure olympique comme une histoire à plusieurs thèmes qui démarre dans le temple de Zeus à Olympie, et non plus en suivant le fil chronologique comme ce fut le cas pendant près de vingt ans.

«Nous sommes le musée d'une idée, d'une culture, d'une philosophie qui s'appelle l'olympisme. Cela ne s'arrête pas à la compétition pure ou à l'activité physique, elle va au-delà du sport», souligne le directeur du musée, Francis Gabet.

S'exposent comme des trésors les médailles de toutes les éditions des Jeux depuis les premiers en 1896 à Athènes et toutes les versions de la torche, qui a fait son apparition aux Jeux de Berlin en 1936, en référence aux célébrations religieuses de l'Antiquité.

Dans ces JO-1936 tout à la gloire du régime nazi, l'athlète noir américain Jesse Owens avait contrarié Adolf Hitler en enlevant quatre médailles d'or, dont l'une d'elles s'est vendue près de 1,5 M $ aux enchères le week-end dernier. Le musée aurait bien aimé mettre la main sur un tel symbole.

«La question s'est posée de savoir si nous devions nous mettre sur les rangs. Mais pour nous, une médaille n'a pas de prix et le risque est d'encourager un certain mercantilisme», commente Francis Gabet.

D'autres objets sont à jamais associés à l'or suprême, telle la robe de Carmen, dans laquelle la patineuse allemande Katarina Witt avait ensorcelé les juges, les skis d'un autre siècle de Jean-Claude Killy, l'icône des Jeux de Grenoble de 1968, la tenue de Kohei Uchimura, le maestro japonais de la gymnastique artistique ou le fleuret et la cuirasse de l'Allemand Thomas Bach, l'actuel président du Comité international olympique (CIO).

«Faire comprendre ce qu'il y a derrière le glamour»

Le musée n'est pas un «Hall of fame», ces panthéons de la renommée. «Il ne s'agit pas de nier les stars, mais nous essayons de faire comprendre ce qu'il y a derrière le glamour», souligne le directeur.

Dans les jardins, le couloir du 100 m a de quoi rendre bien modeste quiconque s'essaie à affronter l'homme le plus rapide de la planète, Usain Bolt, dont le record du monde (9 sec 58) est reproduit par un jeu de faisceaux lumineux.

Quelques heures durant, à coups de tableaux interactifs et de films sur grand écran, le visiteur s'imagine tel un champion qui défile à la cérémonie d'ouverture des Jeux, loge au Village olympique et entre enfin dans l'arène, gagné par un bouillonnement d'émotions.

«Le temps n'est plus le même quand vous êtes en compétition. Pour certains, le temps est ralenti, pour d'autres il s'accélère. C'est ce que les athlètes appellent rentrer dans la zone, un état mental de super concentration juste avant le coup de pistolet fatidique», raconte Francis Gabet.

En repartant, chacun pourra méditer la devise exacte du baron Pierre de Coubertin, le rénovateur des Jeux olympiques, dont la statue trône désormais devant l'édifice: «l'important dans la vie n'est point le triomphe mais le combat, l'essentiel ce n'est pas d'avoir vaincu, mais de s'être bien battu».