L'artiste visuelle Jacynthe Carrier présente de nouvelles photographies et une vidéo à la galerie Occurrence jusqu'au 12 janvier. Dans Parcours, on retrouve sa recherche à la fois théâtrale et technique sur le corps collectif et nos différentes façons d'habiter l'environnement.

Finaliste du prix Pierre-Ayot 2012 qui sera remis mercredi à Montréal, lors du Gala des arts visuels, Jacynthe Carrier aime créer des oeuvres où il est question de tradition, de cycle et de quête perpétuelle. L'été dernier, Parcours a surgi, comme toujours chez la Lévisienne, d'une idée saisie au vol.

«Le projet a été un peu amorcé par la Galerie de l'UQAM qui participait au projet Montréal-Brooklyn et qui nous invitait à présenter une vidéo en tenant compte d'une structure de temps, dit-elle. On ne devait pas aller au-delà de cinq minutes.»

Dans le cadre de cette contrainte, l'artiste âgée de 30ans a vu un groupe en train de courir dans un paysage donné. En résulte l'exposition Parcours, soit un dialogue entre une vidéo de type documentaire qu'elle a réalisée avec des coureurs dans une sablière de Saint-Casimir de Portneuf et des portraits tirés ce jour-là des mêmes participants.

La vidéo de cinq minutes montre un groupe de 20 personnes qui courent à l'aube d'un jour grisâtre dans une carrière de sable. Ces personnes ont été choisies, car elles travaillent et s'expriment avec leur corps dans leur quotidien. Ce sont des danseurs, des coureurs ou des performeurs.

Dans le film, la carrière devient un manège équestre où les chevaux sont remplacés par des coureurs à pied qui tournent en rond pendant une heure. L'idée de la meute et du rite fascine Jacynthe Carrier autant que les mouvements du corps dans un habitat donné.

Mais Parcours est moins théâtral ou symbolique que son travail antérieur. «C'est plus physique et mon projet le plus minimal de tout ce que j'ai fait, dit-elle. On est dans le corps, la nature et un rapport primitif, voire animal, le tout dans un certain rythme.»

Ses personnages courent, marchent et grimpent un petit monticule de sable, portent tous un objet et souffrent visiblement, la vidéo ayant été tournée par le directeur photo Julien Fontaine sous une pluie battante. Les coureurs fatigués, en sueur et trempés jusqu'aux os se sont arrêtés au bout d'une heure. Regroupés et immobiles, ils donnent d'eux-mêmes des portraits où on lit l'effort voire l'héroïsme sur leurs visages, leurs crânes et leurs cheveux ruisselants.

«Je les ai très peu dirigés, dit Jacynthe Carrier. Je leur demandais juste de se placer, de diriger le regard dans le point neutre et je prenais les détails, dans une tradition du portrait photographique. On sent que leur corps a vécu quelque chose. Ce sont des expériences qui nous transforment et nous amènent un peu ailleurs. J'aime voir ce que ces personnes ont à dire dans ce contexte.»

Effectivement minimaliste, l'exposition Parcours peut paraître un peu moins forte et suggestive que ce qu'a déjà montré Jacynthe Carrier quand elle s'est consacrée au corps statique puis, depuis deux ans, au mouvement. Mais elle assure qu'elle ne fait qu'ouvrir une porte vers quelque chose de plus proche de la danse et de la performance avec une technique de la vidéo qu'elle embrasse depuis peu et dont elle découvre peu à peu tout le potentiel.

«Je ne suis qu'au début de quelque chose, dit-elle. Je pense avoir trouvé une nouvelle brèche.»

Parcours, jusqu'au 12 janvier à la galerie Occurrence.