Vous aimez la photographie et ne connaissez pas la technique du sténopé? Courez voir l'exposition Empreintes d'une ville, Montréal en sténopé au Musée McCord. On y présente 18 photos en noir et blanc, des images que le photographe Guy Glorieux a créées avec cette technique qui aurait été inventée par le scientifique arabe Ibn al-Haytham (Alhazen).

Prendre en sténopé aujourd'hui, c'est aimer s'amuser avec la simplicité et vouloir prendre son temps. Alors que la plupart des photographes (même Gabor Szilasi!) se sont mis au numérique, seule une douzaine de photographes utilisent cette technique dans le monde, selon Guy Glorieux.

Si l'on veut prendre une photo depuis la fenêtre d'un édifice, par exemple, la technique consiste à utiliser une plaque opaque percée d'un tout petit trou, de la placer dans une pièce complètement sombre dans laquelle on aura placé, à l'opposé du trou, un mur constitué de papier photographique. Après une exposition de trois heures, le papier aura été imprégné (à l'envers, comme un négatif) par tout ce que la lumière aura laissé passer à travers le trou de la plaque placée contre la fenêtre.

L'exposition présente les plus belles réalisations de Guy Glorieux avec cette technique. Les photos sont de grande taille, jusqu'à 5 m de longueur. Il est intéressant d'apprécier des vues uniques de Montréal comme si l'on regardait la ville dans un miroir. Avec le sténopé, la réalité est altérée.

«Aujourd'hui, on est envahi par des images, dit Guy Glorieux. Le cerveau les capte, mais on ne les voit plus. J'essaie d'amener les gens à s'interroger. Ils sont déconcertés par l'inversion de l'image. Ils se disent: «Je connais ce lieu, mais il a quelque chose d'étonnant!»»

Sur la photo de la brasserie Molson en sténopé, par exemple, le bâtiment est situé à gauche du pont Jacques-Cartier, au lieu d'être à droite, quand on le regarde depuis la tour de Radio-Canada. Et les lettres sont inversées: NOSLOM.

Des photos prises dans le centre-ville de Montréal sont étonnantes, notamment celle de la rue Sainte-Catherine en plein Festival de jazz à midi: on ne voit personne dans la rue sauf l'ombre fantôme du vendeur de crème glacée! La pose de trois heures ne peut enregistrer une personne que si elle reste assez longtemps à la même place.

Ainsi, quand on regarde de près la photo prise à proximité de l'édifice 2.22, on voit l'ombre d'une personne demeurée assez longtemps assise sur le trottoir pour être immortalisée.

«Ces photos sont mystérieuses, angoissantes et d'une grande beauté, comme la ville de Montréal, voire l'administration montréalaise», dit en riant Suzanne Sauvage, présidente et chef de la direction du musée.

Empreintes d'une ville, au Musée McCord jusqu'au 27 mai.