Créée dans le bureau d'avocat de Me Stephen Angers, la galerie Angers procède au vernissage, ce jeudi à 17h30, des oeuvres de la peintre montréalaise Malgosia Bajkowska qui élabore une peinture abstraite toute en douceur et en caractère.

Inspirée par le Catalan Antoni Tàpies et par l'Américain Cy Twombly, récemment décédé, Malgosia Bajkowska est née à Cracovie dans l'univers artistique de sa grand-mère sculpteure. Elle a suivi un atelier il y a une dizaine d'années avec Françoise Belu, qui l'a amenée à se consacrer à la peinture abstraite.

Sa production des neuf derniers mois découle d'impulsions ressenties lors de ses rencontres avec le design contemporain, l'environnement urbain et la nature. Du coup, ses 17 oeuvres ne sont pas des abstractions nées du hasard d'un geste mais le résultat d'une réflexion qui la conduit à façonner un art conceptuel attrayant au regard en ce qu'il a de poétique et d'interrogatif.

Leurre des perceptions convient bien pour qualifier l'état d'incertitude et d'étonnement que l'on a à contempler ces grands tableaux où la géométrie se marie à des formes et à des couleurs reposantes et où chaque titre est un récit en soi.

Sa toile Exit, faite de fils de métal et de petits joints d'étanchéité, est à la fois belle, impressionnante et éloquente. On y trouve une humanité stoïque d'où émerge une créature unique qui semble partir sur un long fil rouge se forger un autre destin, tandis que ses comparses ont choisi de végéter ou de se perdre.

Sa technique de mêler à l'acrylique des petits morceaux de fil métallique est originale et lui permet d'aborder des domaines variés de l'introspection. En hommage à Giacometti, elle a joint deux cadres verticaux dans lesquels l'homme et la femme semblent se compléter: deux immenses larmes blanches allongées et tête-bêche auxquelles se greffe un bel agencement de tons doux et forts à la fois.

Dans un certain nombre de toiles, le geste est épuré et, pourtant, la profondeur et le mouvement y sont notoires, donnant au cadre une atmosphère apaisante, comme pour Scission ou Chute lunatique et sa touche nippone.

L'humour est même parfois présent, comme dans Où es-tu?, un cadre où le visiteur est invité à choisir sa case imaginaire.

Dans d'autres tableaux, on sent le tempérament pétulant sourdre de cette artiste qui a trouvé sa voie dans la jeune quarantaine. Évanescence, Fixer l'ivresse (clin d'oeil à Rimbaud) et son magnifique Rosée au déjeuner (référence à Jacques Prévert) ont les attraits du recueillement, du temps suspendu et aussi de cet émoi dynamique qui crée l'envolée artistique.

«C'est difficile d'expliquer ce qu'on fait mais ce sont les émotions qui parlent, dit Malgosia Bajkowska à La Presse. Par exemple, pour Silence brisé, il y a une douceur avec l'eau rectangulaire au milieu du tableau et comme des oiseaux ou des feuilles qui s'envolent. Ma démarche est de faire revivre les formes géométriques de l'abstraction.»

Jouant avec son imagination et des réalités qui l'intriguent, Malgosia Bajkowska a une aisance et un talent qui laissent augurer une belle carrière dans cet espace singulier qu'elle habite avec goût et où l'abstraction folâtre avec une sorte de figuration intérieure. Comme une abstraction habitée.

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Leurre des perceptions

Malgosia Bajkowska

Du 15 septembre au 16 octobre 2011 àa la Galerie Angers

405, rue Saint-Dizier, Vieux-Montréal

www.galerieangers.com